Intervention de Pierre-Franck Chevet

Réunion du jeudi 30 novembre 2017 à 9h00
Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques

Pierre-Franck Chevet, président de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) :

– Tout à fait, les déchets de moyenne activité à vie longue encapsulés dans une matrice en bitume posent deux difficultés. D'une part, il s'agit souvent de déchets anciens, issus principalement du CEA. Leur contenu radioactif est incertain. D'autre part, à partir d'une certaine température, le bitume peut créer des risques d'incendie, ce qui est compliqué dans les ouvrages sous-terrain. Je citerai pour mémoire le précédent de STOCAMINE, en Alsace, qui ne concernait pas des déchets nucléaires, mais des déchets ultimes, stockés dans d'anciennes mines de potasse. Nous émettons donc une réserve sur les déchets radioactifs bitumeux, compte tenu de leur dangerosité potentielle. Deux options sont possibles : sécuriser davantage Cigéo, ou prétraiter ces déchets, pour diminuer fortement leur potentiel calorifique, avant de les introduire dans le stockage. Pour l'instant, nous préférons la solution du prétraitement.

La demande d'autorisation de création de Cigéo est prévue pour 2019. Il s'agira d'un rendez-vous très complexe, aussi bien sur le plan technique que sociétal. On s'imagine souvent qu'un entreposage de long terme est tout aussi efficace qu'un entreposage souterrain, voire davantage. Ce n'est pas vrai, car les déchets en question ont une durée de vie de plusieurs centaines de milliers d'années. Le principe d'un stockage géologique souterrain, en profondeur, constitue, pour l'instant, la seule solution raisonnable et responsable. Certes, le Parlement a décidé, dans la loi sur les déchets, que le stockage de Cigéo devait être réversible pendant une centaine d'années, la science pouvant dans le futur nous apporter d'autres moyens pour traiter ces déchets. Mais cela ne signifie pas, pour autant, qu'il faille les entreposer pendant cent ans. Je le répète, entreposer ces déchets sur le long terme ne serait pas une solution responsable.

Autre sujet, les autorités européennes ont travaillé, suite à Fukushima, sur les conséquences des accidents, notamment en ce qui concerne les mesures de protection. À l'unanimité, elles ont décidé d'élargir les plans d'urgence, notamment autour des centrales nucléaires. Cette mesure a été approuvée par le Gouvernement en 2016. Reste maintenant à déployer cette stratégie de protection étendue sur l'ensemble du territoire. Les commissions locales d'information, autour des installations, devront se mobiliser sur ces questions. Elles auront également besoin de moyens pour faire face aux extensions de périmètre, surtout à partir de 2018.

Face à l'ensemble de ces enjeux, nous réfléchissons aux moyens d'optimiser notre action, pour la rendre plus efficace.

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