Je ne vais pas apporter un témoignage de directeur d'unité, parce que je ne le suis plus depuis bien longtemps. Je suis ici parce que j'ai en charge le sous-comité agronomie, environnement, biotechnologie du comité d'experts des ZRR. J'ai aussi en charge l'ensemble des infrastructures scientifiques de l'INRA, et donc je « touche » directement aux questions du potentiel scientifique du pays dans le domaine considéré. Par ailleurs, en raison d'activités passées, je coordonne des programmes de mobilité européens de post-doctorants, mobilité entrante ou sortante de grande ampleur, ce qui me permet d'avoir une idée des pratiques d'échanges de scientifiques entre différents pays, qu'il s'agisse des collègues qui vont à l'étranger ou des post-doctorants que nous recevons dans différents laboratoires d'agronomie. Je vais donner quelques éléments précis permettant d'apprécier la charge que représentent les nouvelles modalités de la PPST. Depuis 2015-2016, le sous-comité a analysé 44 entités, dont 36 ont été proposées par les services du HFDS, les autres étant proposées par des établissements qui avaient souhaité qu'un certain nombre d'unités soient analysées. Ces unités concernent des établissements publics scientifiques et techniques (EPST), des universités, des établissements d'enseignement supérieur, des unités propres de certains établissements, des unités mixtes de recherche (UMR), mais aussi des unités de service et des plates-formes technologiques. Sur ces 44 unités, 26 analyses ont été achevées, et seulement 7 ont conduit à proposer des ZRR. Vous voyez la parcimonie du comité dans son activité pratique en termes de nombre de ZRR. L'ensemble des ZRR qui ont été proposées sont le plus souvent partielles, zonées, comme l'a évoqué M. Raoul. Cela tient beaucoup à notre domaine spécifique, géographique, bâtimentaire, scientifique et technologique. Tout le monde n'est pas dans le même laboratoire. Le zonage présente un certain intérêt.
Les premières années de mise en œuvre de la PPST ont été un peu compliquées dans le dialogue, puisqu'il fallait épurer des listes d'unités à traiter, auxquelles s'ajoutaient des ERR qu'il a fallu transformer en ZRR. Cela a conduit à un travail assez important du sous-comité. Mais ensuite, le sous-comité a eu un travail de présélection des entités soumises par le HFDS, de façon à éviter d'avoir trop de travail à mener et d'être prudents en termes de nombre de ZRR à traiter. On évolue vers un dialogue de plus en plus développé entre la proposition d'analyse et ce que peut en faire le sous-comité et les propositions qu'il fait ensuite au HFDS en matière de classement. En effet, certains laboratoires peuvent refuser l'autoanalyse par le questionnaire, ou même refuser d'avoir une ZRR. Dans ces cas-là, une discussion bilatérale est mise en œuvre, qui consiste à dialoguer en présentiel entre le sous-comité et le directeur d'unité qui conteste la décision. Dans notre cas, nous n'avons eu que deux réunions bilatérales, et à chaque fois la solution a été trouvée après le dialogue. En matière de mise en œuvre, globalement les directeurs d'unité font une analyse du coût de transaction, plutôt administrative, versus la protection apportée, protection juridique, ou la mise en œuvre de solutions par l'établissement qui ensuite adapte la ZRR aux conditions réelles. Par ailleurs, se développe une sensibilité aux questions de sécurité et de protection. C'est l'un des avantages déjà soulignés.
Au niveau de l'INRA, 2 ZRR existent, et 6 autres sont en cours de création. Dans la mise en œuvre de ces ZRR, 104 demandes d'accès ont été faites sur les 2 ZRR existantes, avec un délai d'attente de 23 jours (délai de départ du FSD) et aucun refus. Nos ZRR étant très orientées sur des risques 3 et 4 en matière de sécurité et de microbiologie, ces entités n'ont pas généralement vocation à être complètement ouvertes. Cela s'explique par la nature de la technologie qui est mise en œuvre. Sur l'ensemble des coopérations internationales demandées en 2018, le temps de réponse moyen enregistré à l'INRA était de 16 jours, avec un seul refus. À ce stade, globalement, pour le domaine assez large dont je m'occupe, agronomie, environnement, étude des écosystèmes, nutrition humaine et biotechnologie, qui est probablement l'endroit où il y a le plus de risques économiques de type R1, il semble pour le sous-comité, et il me semble dans la mise en œuvre, que l'évolution des modalités de déclaration et d'identification des ZRR va plutôt vers un dialogue qui conduit, au bout d'un certain temps, à une acceptation par les directeurs d'unité. Pour autant, ces ZRR ont été mises en place il y a très peu de temps, entre 2015 et 2017, et donc il faudra éprouver cette impression de bonne acceptabilité sur la durée. La lourdeur s'accumule au fur et à mesure des années. La question de la récurrence de ces lourdeurs se posera inévitablement.
Dernier point : l'INRA est dans une période de vive tension, du fait qu'il traite de questions sociétales compliquées, faisant l'objet de vives controverses : pesticides, OGM, expérimentation animale… Cela entraîne de forts risques d'atteinte du potentiel scientifique et technologique. Des atteintes et des destructions ont déjà eu lieu. Bien sûr, nous sommes très éloignés des grandes questions d'aéronautique, de cybernétique, qui ont précédemment été évoquées. Mais concrètement, dans le passé, il y a déjà eu des alertes. Il nous semble que la protection juridique apportée par le dispositif ZRR est un élément très important pour l'établissement INRA. Cette protection juridique est une valeur ajoutée plutôt pour le directeur d'établissement que directement pour le scientifique en charge des coopérations internationales ; on peut voir cet écart dans le bénéfice comme une source des débats, qui sont légitimes, entre l'intérêt d'une ZRR et les lourdeurs administratives de leur mise en œuvre, au moins telles qu'elles sont vues dans le domaine dont je m'occupe au niveau du sous-comité des experts.