. – En matière de mortalité globale et de mortalité par Covid, nous disposons de chiffres et d'un graphique, qui doivent être commentés. Le graphique diffusé à l'écran est extrait de la base Euromomo qui réunit des informations sur la mortalité en Europe, et il est à jour à date de la semaine 42. La mortalité globale apparaît dans certains pays, notamment en France, inférieure à la mortalité moyenne pour la même période dans les années précédentes. Effectivement, la méthode le plus fiable pour estimer l'effet de la crise sanitaire sera de faire une comparaison avec les autres années ; cela permettra de prendre en compte de nombreux facteurs, par exemple le fait qu'il y a eu confinement, que la population a rencontré des problèmes psychiatriques, des problèmes financiers, etc. mais que la crise a aussi permis de réduire la mortalité routière et les accidents de façon générale. On pourra donc faire le compte des « plus » et des « moins », sous forme d'une comparaison globale.
Tous les experts rappellent qu'il y a les décès directs du Covid – le taux de létalité étant compris entre 0,5 % et 1 %, sachant que nous bénéficions d'un système de santé développé et de la possibilité d'accéder à des dispositifs de réanimation –, mais qu'il y a aussi une mortalité indirecte : si le système de santé est saturé et ne peut plus accepter les patients Covid, bien sûr, mais aussi s'il ne peut plus accepter les autres patients, ceux qui ont besoin de chimiothérapie, d'opérations, etc. De nombreux médecins sont plus inquiets de cette dernière catégorie que des malades du Covid. Si le système de santé devient saturé, on sera confronté à de vrais dilemmes éthiques quant aux priorités d'accès, qu'il faudra trancher.
Le sujet des primes et autres éléments à caractère social est très difficile à apprécier ; toute estimation doit se garder de la polémique politique. Il faudrait pourtant évaluer l'état psychologique effectif des troupes dans les hôpitaux, qui est un facteur absolument majeur de la lutte contre l'épidémie.
S'agissant des enfants, les scientifiques eux-mêmes ne sont pas vraiment d'accord. Sur un plan théorique, la charge virale qui est portée par les enfants est importante. Si l'on s'en tient aux analyses in vitro, il n'y a donc pas de raison que les enfants soient moins contaminants. Mais sur le terrain, dans les écoles, on a observé que les enfants étaient peu malades et peu contagieux – il y a eu un consensus là-dessus au moment de la première vague. Quand on a pu reconstituer les chaînes de transmission, la contagion dans les écoles venait des adultes bien plus que des enfants. Les auditions que nous avons conduites étaient très claires : les spécialistes d'infectiologie nous disaient : « Attention, ça peut être contagieux ! » et les services de pédiatrie nous disaient : « Ce que l'on voit sur le terrain, c'est que les enfants ne sont pas un problème ». Il est vrai qu'une étude portant sur un grand nombre de pays suggère que, dans certains, les écoles jouent un rôle important dans l'épidémie ; par exemple en Israël, l'ouverture des écoles à la rentrée a été identifiée comme un facteur majeur. Les épidémiologistes français que nous avons consultés relativisent ces résultats parce qu'en réalité, on n'arrive jamais à distinguer vraiment l'effet éventuel de l'école des autres facteurs puisque les conditions des « expériences » ne sont pas contrôlées ; en particulier, dans le cas d'Israël, une forte chaleur avait conduit à forcer la climatisation dans les établissements scolaires, ce qui avait provoqué une dispersion plus importante ; dans d'autres cas, les mesures liées aux écoles ont été prises en même temps que d'autres mesures plus générales, comme un confinement. Le consensus français dit que la contagion est plus importante chez les jeunes adultes que chez les adolescents, plus importante chez les adolescents que chez les jeunes enfants, etc. Ce ne sont pas les seuls en Europe à penser ça : d'ailleurs, d'autres pays se lancent dans un confinement en gardant les écoles ouvertes. Mais il est certain que le sujet va prêter à polémique, au vu de ces articles scientifiques contradictoires.