Lorsque nous avons examiné le texte issu du Sénat, la commission des lois a délibérément souhaité ne pas lier le devoir précontractuel d'information, consacré à l'article 1112-1, et la réticence dolosive. La réticence dolosive consiste à retenir sciemment une information dont on sait le caractère déterminant pour l'autre partie, information qui, si elle avait été connue de cette dernière, l'aurait amenée à ne pas contracter ou à contracter à des conditions substantiellement différentes.
Cette réticence dolosive doit être sanctionnée par la nullité du contrat, même en l'absence de manquement au devoir précontractuel d'information. Ce choix se justifie par la volonté de sanctionner plus largement la mauvaise foi que la simple négligence : le dol impliquant l'intention de tromper, il n'a donc pas à être encadré dans les mêmes limites que le devoir d'information. La commission est attachée à l'affirmation du principe de bonne foi dans les relations contractuelles et à la sanction de la réticence dolosive.
J'avais pris l'engagement devant vous, monsieur Huygue, de supprimer la principale difficulté que peut susciter la déconnexion entre dol et devoir d'information, en excluant l'estimation de la valeur de la prestation de l'objet de la réticence dolosive. À l'instar de l'article 1112-1, qui exclut expressément du devoir d'information l'estimation de la valeur de la prestation, il apparaît cohérent d'introduire également cette exception dans le texte sur la réticence dolosive, d'autant plus que l'article 1139 le prévoit également et que cela correspond à une traduction dans le code civil du célèbre arrêt Baldus de la Cour de cassation.
Une telle exclusion de la nullité du contrat lorsque le silence porte seulement sur l'estimation par le contractant de la valeur de la chose, et non sur les qualités essentielles de celle-ci, permet de ne pas pénaliser excessivement la vie des affaires et donc de pouvoir conclure à un prix qui n'aurait pas été le prix réel de la chose : c'est là l'objet même de nombreux contrats.