Intervention de Corinne le Quéré

Réunion du jeudi 21 janvier 2021 à 9h30
Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques

Corinne le Quéré, présidente du Haut Conseil pour le Climat :

. ‑ La SNBC est élaborée par la Direction générale de l'Énergie et du Climat (DGEC). Elle a construit un nouveau scénario lors de la deuxième révision de la SNBC, et le modifiera lors de la troisième révision prévue dans trois ans.

Notre mandat prévoit que nous devons donner un avis tous les cinq ans sur la SNBC, mais nous n'avons pas de rôle prospectif. Il est assez difficile de mener nos missions sans pouvoir explorer différents scénarios. Par exemple, il est compliqué de déterminer la part appropriée du stockage de carbone sur la base d'un seul scénario.

La CCC a proposé 150 mesures. C'est une initiative remarquable, comme nous l'avons écrit dans notre rapport annuel. 150 citoyens, venant d'horizons géographiques différents, avec des connaissances tout à fait hétérogènes, ont réussi à converger vers des mesures acceptables par la société. Aujourd'hui, il est essentiel que le gouvernement réponde de manière très claire à cet engagement, soit en suivant les recommandations de la CCC, soit en expliquant pourquoi certaines mesures ne sont pas retenues. Pour atteindre rapidement la neutralité carbone, il est essentiel que les citoyens soient engagés.

Le HCC ne va pas prendre position sur les recommandations de la CCC. En revanche, nous allons évaluer la manière dont la loi climat est construite. Il y a un an, nous avons publié, à la demande du gouvernement, un cadrage des évaluations. Nous avons recommandé qu'elles soient faites avant la mise en place des mesures, et qu'elles soient menées de manière transparente, indépendante, continue, et quantitative. Nous allons donc examiner l'évaluation de la loi climat à la lumière de ces bonnes pratiques.

Cette évaluation montre que les mesures envisagées ne permettent de faire que la moitié du chemin de réduction de 40 % des émissions d'ici 2030. C'est une contribution importante, mais insuffisante. Dans sa réponse à notre rapport annuel 2019, le gouvernement s'est engagé à demander, à tous les ministères, une feuille de route précisant comment ils pensaient atteindre leur objectif de budget carbone. Ces feuilles de route doivent compléter les mesures de la loi climat et du plan de relance.

Le transport est le secteur le plus problématique en France, puisqu'il est responsable de 31 % des émissions. La crise sanitaire risque d'accroître le recours aux voitures individuelles, malgré le succès de la marche et du vélo.

La SNBC met l'accent sur l'électrification du parc de véhicules, le biogaz et l'hydrogène concernant essentiellement les poids lourds. La décarbonation des transports passe aussi par un changement modal vers le transport public, par le développement du ferroviaire et de l'autopartage. Pour accélérer la transition vers les véhicules électriques, la France doit favoriser leur production sur son territoire. Or aujourd'hui, elle soutient les producteurs automobiles, sans conditionner son aide à la transition vers la construction de véhicules électriques. Les conditions des aides ne permettent pas aux entreprises de franchir une étape pourtant essentielle à l'atteinte de la neutralité carbone.

L'Europe a pour objectif de diminuer ses émissions de 55 % en 2030, mais les moyens de l'atteindre ne sont pas clairs. Elle mise beaucoup sur le Système d'échange de quotas d'émission de l'Union européenne (SEQE‑UE), alors que ce mécanisme reste insuffisant. Il est indispensable de définir une stratégie d'ensemble, de mettre en place un Haut conseil pour le climat au niveau européen, et de renforcer les standards pour le transport. En effet, cet objectif de 55 % de réduction ne pourra pas être atteint sans mesures fortes sur les transports.

Le Royaume-Uni a annoncé l'interdiction de vente de véhicules thermiques dès 2030. Une compétition va donc s'installer entre les pays européens, et les entreprises françaises ont tout intérêt à franchir le cap de la production de véhicules électriques le plus rapidement possible.

Pour le stockage de carbone, j'ai déjà mentionné les puits de carbone, qui sont encore peu utilisés, mais qui figurent dans la SNBC. La capacité de stockage de la France reste faible.

Sur la coordination internationale, l'Union européenne discute de la mise en place d'un Haut conseil pour le climat européen. Je pense qu'il verra le jour en 2022 et qu'il travaillera en étroite collaboration avec les différents conseils nationaux.

Les émissions supplémentaires liées à la 5G proviennent de la fabrication de nouveaux appareils. Le recyclage des appareils est donc essentiel pour développer l'économie circulaire, mais le HCC n'a pas encore étudié en détail ce sujet.

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