Intervention de Catherine Procaccia

Réunion du jeudi 4 mars 2021 à 10h00
Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques

Catherine Procaccia, sénateur, vice-présidente de l'Office, rapporteure :

. – Les phages sont connus depuis plus d'un siècle. C'est un savant franco-canadien dénommé Félix d'Hérelle qui les a découverts et utilisés à partir de 1917. On a traité de façon empirique des infections bactériennes par des phages jusque dans les années 1940. Les phages sont des virus naturels des bactéries. Ils sont présents en abondance dans notre environnement et ont la particularité de pouvoir infecter une bactérie-hôte, se multiplier au sein de celle-ci jusqu'à la tuer, puis infecter les bactéries identiques voisines. Cette propriété est intéressante sur le plan thérapeutique puisque l'on peut ainsi traiter des patients atteints d'infections bactériennes.

Mais tout n'est pas si simple car il faut trouver le bon phage, celui qui correspond à la bactérie ciblée. Les phages ont en effet un spectre d'action étroit. Par ailleurs, certains phages ne sont pas lytiques mais lysogéniques : ils intègrent leur code génétique dans la bactérie hôte et ne s'y répliquent pas. Ils n'ont donc pas d'intérêt thérapeutique. La phagothérapie et donc une thérapie de précision.

L'arrivée des antibiotiques dans les années 1940 et leur développement spectaculaire après la Seconde Guerre mondiale ont rendu la phagothérapie obsolète. Peu coûteux et à large spectre d'action, capables d'être efficace contre plusieurs types d'infections bactériennes, les antibiotiques ont vite remplacé les phages, sauf dans les pays du bloc soviétique, où ils ont continué à être utilisés car l'accès aux antibiotiques y était restreint. Il y a toujours aujourd'hui une très bonne connaissance, une utilisation et une fabrication de phages, en particulier en Géorgie où Georges Eliava, disciple de Félix d'Hérelle, a fondé un institut qui porte son nom. L'Institut Eliava détient une collection importante de bactériophages et soigne les patients qui sont accueillis, y compris des patients venus de France, qui n'accèdent pas à la phagothérapie dans notre pays.

En France, les phages étaient dans le Vidal jusque dans les années 1970 et l'Institut Pasteur détenait une collection de phages pouvant être utilisés par les médecins. Leur fabrication a depuis cessé et l'on ne peut plus en trouver aujourd'hui en pharmacie.

Pourquoi s'intéresser de nouveau aux phages ? Parce qu'avec la multiplication des bactéries multi-résistantes (BMR), l'antibiothérapie peut se trouver en échec et il faut alors trouver des alternatives. On dénombre plus de 25 000 décès par an en Europe dus à l'antibiorésistance et ce nombre est appelé à fortement augmenter dans les années qui viennent. L'enjeu est donc considérable. Avant de poursuivre, je vous propose de regarder une courte vidéo de présentation des phages.

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