Mesdames les sénatrices, vous soulignez à juste titre toute l'ampleur de la réflexion qui justifie l'adoption d'une loi d'expérimentation permettant de mieux discerner ce que nous voulons et ce que nous ne voulons pas. Je suis habité par les mêmes interrogations que vous. Dans notre travail d'analyse scientifique, nous avons seulement cherché à dénombrer les applications de reconnaissance faciale développées par différentes entreprises. Dans la grande distribution, les laboratoires de Carrefour ou de Monoprix ont en effet conduit des réflexions sur des applications marketing, mais celles-ci ne peuvent aujourd'hui être déployées à grande échelle.
À travers cette expérimentation, nous cherchons à mesurer ce qu'il en est, mais aussi à sensibiliser les Français grâce à une consultation citoyenne. Notre collègue député Jean-Michel Mies a participé aux mêmes travaux que moi sur la reconnaissance faciale. Dans le sondage mené par Ipsos pour Renaissance numérique, il ressortait que les Français rejetaient effectivement toutes les applications marketing. Ils ne souhaitent pas se faire reconnaître au restaurant ou dans un magasin. La recours à la reconnaissance faciale dans la sécurité a en revanche été plébiscité.
N'oublions pas non plus, dans ce travail de réflexion, les collectivités locales. Cela fait des années qu'elles ont installé des caméras pour sécuriser ou, en tout cas, donner un sentiment de sécurité à la population. Mais elles sont en train de franchir un cap, en passant de la vidéo protection à la vidéo-verbalisation par reconnaissance des plaques d'immatriculation. Comme l'ont montré les auditions de l'Association des maires de France (AMF), elles peinent pourtant à bien maîtriser les aspects techniques liés à la reconnaissance. Cela les met en difficulté lorsqu'il s'agit de communiquer correctement avec la population, en l'informant en amont.
Les habitants ne comprennent pas qu'ils aient pu être vidéo-verbalisés et frappés d'une contravention parce qu'ils étaient mal garés en utilisant un système de vidéoprotection, alors que la police n'a pas pu identifier la personne qui a cambriolé leur logement… Telles sont les limites de l'emploi de ces outils par les collectivités locales. D'où le recours éventuel à des aides à la décision s'appuyant sur l'intelligence artificielle.
De la part de la Quadrature du Net, nous n'avons pas encore reçu de réaction officielle. Je pense que les responsables de l'association attendent pour réagir que le texte soit officiellement déposé. Dans ce texte, nous en restons en tout cas aux éléments biométriques du visage ; il n'est pas prévu d'élargir à la main, aux yeux ou à d'autres éléments potentiellement biométriques.