Intervention de Pierre Cunéo

Réunion du jeudi 17 juin 2021 à 10h00
Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques

Pierre Cunéo, membre de la task force vaccins rattachée à la ministre déléguée à l'Industrie :

. ‑ Je vais donner un exemple parlant : Pfizer-BioNTech est un vaccin qui fait intervenir 280 intrants provenant de 19 pays, parmi lesquels nous comptons notamment les États-Unis.

Au-delà de toutes les discussions sur la propriété intellectuelle et les brevets – qui ont été scientifiquement rigoureuses et ont répondu au principe de la contradiction –, la sécurité de l'approvisionnement est évidemment clé pour produire et vacciner. Il faut construire ces réseaux et filières d'approvisionnement, s'assurer de leur fluidité, de leur résilience aux aléas, en particulier par une forme de diversification du sourcing ; et, a fortiori, en une période de montée en charge des capacités de production, il faut prévoir les flux d'approvisionnement et les flux aval.

L'exemple de composants en tension le plus connu, sans doute, est celui des nanoparticules lipidiques, soit la couche de cholestérol qui entoure l'ARNm pour le protéger, en l'occurrence pour le Pfizer-BioNTech. Cette tension doit conduire les États à exercer leur plein rôle de protecteurs sanitaires et le cas échéant, en cas de défaillance de marché, d'orienteurs des acteurs économiques et en particulier les industriels. Aux États-Unis – c'est à cela que je faisais allusion dans mon intervention – existe le Defense Protection Act (DPA), qui est une loi de 1950 remaniée à plusieurs reprises par les présidents successifs. Cette loi a des effets vertueux, car elle consiste à rendre prioritaire la production vaccinale contre la Covid-19 sur d'autres productions des laboratoires, en intervenant auprès des entreprises américaines pour les accompagner dans le réordonnancement de leurs priorités de production ou de la manière de produire, tel l'accord Merck‑Johnson & Johnson intervenu aux États-Unis sur le fondement de l'activation de ce DPA. Cette loi a aussi son revers. En 48 heures, elle peut faire prévaloir l'utilisation domestique d'un produit fabriqué aux États-Unis sur une demande d'exportation. D'une certaine manière, ceci crée une forme d'incertitude sur la sécurité réelle de l'approvisionnement attendu de la part des entreprises américaines, sous l'empire du DPA.

Cela a été fait sur bien des composants et intrants, ainsi que sur des extrants et des éléments concourant à la production de vaccins, comme les pompes nécessaires au conditionnement et le fill & finish. Cela a été activé sur les micro-filtres, éléments clés dans la fabrication du vaccin, sur certains sels et dérivés sacchariques, qui maintiennent la salinité d'un côté et, de l'autre, favorisent la conservation à froid des vaccins, et sur les seringues à faibles résidus qui permettent d'extraire tout ce qu'il est possible d'extraire des fioles multidosées pour maximiser notre capacité d'effection vaccinale.

Les intrants viennent de partout. Les dispositifs nationaux ont leurs vertus parce qu'ils remettent la production des intrants nécessaires aux vaccins Covid tout en haut de la pile et du merite order interne des différentes entreprises. Mais ils peuvent aussi générer de l'incertitude sur la continuité de nos chaînes d'approvisionnement pour sécuriser la production, ce qui est préjudiciable, même si ce n'est pas activé toujours et partout.

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