Intervention de Benoît Semin

Réunion du jeudi 4 novembre 2021 à 9h30
Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques

Benoît Semin, membre du collectif « Projet CO2 » :

Oui, même en restant très prudents, nous savons que c'est plus faible, beaucoup plus faible pour la même durée.

De très nombreux articles sur la transmission par aérosols ont été publiés depuis le début de la pandémie dans les principaux journaux scientifiques et médicaux et ils affirment clairement la réalité d'une telle transmission.

Une manière de limiter le risque de transmission par aérosols est la ventilation ou l'aération – ce sont des synonymes – qui consiste à renouveler l'air d'une pièce par apport d'air extérieur ; ceci permet de diluer les aérosols et donc de réduire le risque.

Mesurer les aérosols émis lorsque nous parlons ou respirons est difficile puisque d'autres aérosols sont présents dans la pièce, notamment les particules fines de pollution. Une méthode pour savoir si une pièce est bien ventilée est d'utiliser le fait que, quand nous expirons, nous émettons non seulement des aérosols mais aussi du CO2. La dilution et le mouvement du CO2 sont similaires à ceux des aérosols. Plus la concentration en CO2 est faible, meilleure est la ventilation. La mesure de CO2 est une mesure de la qualité de la ventilation. Elle présente l'avantage d'être connue et validée dans le domaine du bâtiment et de la qualité de l'air.

Je vous donne quelques valeurs de référence du taux de CO2. Le taux à l'extérieur est de 0,04 %, ce qui est usuellement noté 400 parties par million (ppm). Dans ses avis, le Haut Conseil de la santé publique a conseillé de ne pas dépasser 800 ppm dans les zones avec masques et 600 ppm dans les zones sans masque comme les restaurants.

Dans les standards pré-Covid donnés par l'Association américaine des professionnels de la ventilation, une bonne ventilation était définie comme une valeur inférieure à 1 000 ppm, ce qui correspond aux valeurs des hygiénistes du XIXe siècle.

Pour mesurer le CO2, il faut acheter un capteur de CO2. Un point de vigilance important est que de très nombreux capteurs ne sont pas fiables. La technologie de référence est celle appelée infrarouge ou NDIR (non-dispersive infrared sensor). La technologie photo-acoustique est prometteuse. Par contre, il faut proscrire les technologies MOX ou électrochimiques. Nous avons constaté que certains capteurs NDIR ne sont malheureusement pas fiables et c'est pourquoi nous proposons sur notre site une liste de capteurs fiables que nous avons testés – à nos yeux, ceci ne crée pas de conflit d'intérêts vis-à-vis des fabricants.

L'utilisation de tels capteurs est relativement aisée. Il faut en étalonner certains en les plaçant à l'extérieur pendant dix minutes et en appuyant sur un bouton. Ces capteurs s'utilisent en présence des occupants. Il faut les placer à la hauteur où nous respirons, entre un et deux mètres de hauteur, et loin des entrées et des sorties d'air, sur une table ou sur un mur.

Ce graphe donne un exemple de mesures issues d'un capteur que nous avions prêté à un collège. Trente personnes sont présentes dans la salle et le taux de CO2 est initialement de 400 ppm. Au bout d'une heure, le taux est monté à 2 000 ppm puis il atteint 2 500 ppm. Ce qui est intéressant est que, en ouvrant portes et fenêtres, le taux descend très vite et revient à 400 ppm. Ce sont des valeurs qui sont tout à fait similaires à celles des études systématiques réalisées par l'Observatoire de la qualité de l'air intérieur, qui relevait que beaucoup d'écoles ont un air très confiné, ce qui signifie avec un fort taux de CO2. C'est similaire à ce qui est observé dans les autres pays européens.

Nous avons mesuré que, comme le dit la littérature scientifique, la qualité de la ventilation varie beaucoup au sein d'une même catégorie de locaux. Il existe des logements bien ventilés ou mal ventilés, des transports en commun mal ou bien ventilés. Cela montre que les solutions existent – l'ouverture des fenêtres, la ventilation mécanique contrôlée – mais qu'elles ne sont pas mises en œuvre partout.

Pour finir, je parlerai de l'intérêt de la mesure du CO2 et de la ventilation hors contexte Covid-19. La transmission par aérosols n'est pas propre au SARS-CoV-2. De très nombreuses maladies peuvent se transmettre par aérosols comme la rougeole, la tuberculose, la varicelle, la grippe. Cela montre deux choses. Premièrement, la ventilation peut être utile pour lutter contre les maladies saisonnières telles que la grippe et elle est également un moyen de se protéger et de se préparer en cas d'émergence d'une nouvelle maladie respiratoire qui se transmettrait par aérosols. Deuxièmement, et c'est particulièrement important pour les écoles, les taux de CO2 élevés diminuent de façon réversible les capacités intellectuelles.

En conclusion, les capteurs de CO2 permettent de mesurer de façon quantitative la ventilation dans une salle et, lorsqu'il existe des ouvertures comme les fenêtres, ils permettent de sensibiliser les occupants. Ils permettent aussi de déterminer quand il faut ouvrir les fenêtres.

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