Intervention de Antoine Bouvier

Réunion du mardi 24 juillet 2018 à 15h30
Mission d'information relative à la prochaine génération de missiles anti-navires

Antoine Bouvier :

Depuis 2014, nous avons recruté chaque année près de mille personnes, sur un effectif total de dix mille personnes dans les différents pays où nous sommes présents. Cela signifie qu'entre 30 % et 40 % de nos employés ont moins de cinq ans d'ancienneté. La majorité de ces nouveaux collaborateurs est tout juste sortie d'école ou d'apprentissage ou n'a que quelques années d'expérience. Ces embauches massives sont le résultat d'une vague importante de départs à la retraite mais aussi d'une croissance nette de l'activité en France et au Royaume-Uni et, dans une moindre mesure, en Allemagne et en Italie. C'est d'ailleurs en France et en Grande-Bretagne que nous employons le plus de personnes.

Nous nous sommes posé la question que vous soulevez il y a environ cinq ou six ans. Une entreprise de défense comme la nôtre ne peut en effet pas se contenter d'embaucher les meilleurs ingénieurs ou ceux qui se présentent chez nous car la technologie et les produits sont intéressants. Le fait d'être une entreprise internationale et un bon employeur ne suffit pas. Si nous nous limitons à cela, année après année, un fossé se creusera entre notre culture d'entreprise et notre responsabilité, notre mission qui est de servir, en tant qu'industriel, les intérêts de défense de la France et de la Grande-Bretagne. C'est pourquoi nous avons constitué en interne des groupes de réflexion et tenu des sessions de discussion au cours desquelles nous avons cherché à provoquer nos collaborateurs qui travaillaient parfois chez nous depuis vingt ou trente ans. Nous leur avons demandé les raisons qui les amenaient à travailler pour MBDA, les raisons pour lesquelles ils contribuaient à fabriquer des missiles, si le fait que leurs compétences soient utilisées pour améliorer les performances létales de nos produits ne leur posait pas de difficulté. Il s'agissait bien sûr de provocations mais nous voulions forcer les gens à répondre.

Or, la réponse n'est pas que MBDA est une entreprise qui fabrique des missiles mais une entreprise qui garantit aux pays européens l'accès à des technologies militaires critiques. Personne ne se satisfait de fabriquer un objet destructeur mais tous sont volontaires pour assurer la protection de nos pays et de leurs valeurs. Ce travail interne explique que, par la suite, lorsque nous avons lancé les campagnes d'embauche, les jeunes ont rejoint une entreprise qui connaissait et comprenait sa mission. Nous avons pris soin de ne jamais occulter la responsabilité et le caractère assez agressif d'une entreprise comme MBDA. Nous n'avons jamais prétendu travailler à la paix mondiale, mais à fournir un accès à des capacités militaires à des pays européens. Il n'y a pas d'ambiguïté pour ceux qui rejoignent l'entreprise et nous nous en assurons durant les entretiens d'embauche en demandant bien aux candidats s'ils comprennent la nature des produits fabriqués par l'entreprise ainsi que sa mission. Nous sommes donc très attentifs à cette question culturelle, car pour l'industrie de défense, oublier avec le renouvellement de générations les raisons qui nous animent serait un péril mortel.

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