Intervention de Marc Pichard

Réunion du mercredi 11 décembre 2019 à 14h15
Mission d'information sur l'adaptation de la politique familiale française aux défis du xxie siècle

Marc Pichard, professeur des universités, :

Deux grands modèles étaient envisagés dans les débats, avant que la discussion ne s'ouvre. Du point de vue théorique, deux modèles cherchaient à préserver au maximum l'égalité entre les couples. C'était d'une part, la déclaration commune anticipée qui devait s'appliquer à l'ensemble des couples ayant recours à une PMA avec tiers donneur, qui est en particulier porté par le rapport écrit par Irène Théry et Anne-Marie Leroyer. Ce premier modèle proposait un nouveau mode de filiation, dès lors qu'il y a une PMA avec tiers donneur.

Un deuxième modèle avait été proposé, qui était une extension pure et simple des modalités du titre VII, en cas de PMA avec tiers donneur, ce qui n'est pas ce qu'a choisi l'Assemblée nationale. Même si les dispositions restent intégrées au titre VII, ce sont des dispositions spécifiques, qui ne s'appliqueront qu'aux couples de femmes.

Nous avions deux modèles égalitaires entre les couples qui étaient défendus. Ils avaient chacun leurs défauts. Si nous reprenons les grilles que nous pouvions évoquer, nous pouvions reprocher au premier modèle un risque d'assez forte ineffectivité, parce que pour les couples de femmes, il semble évident qu'elles allaient recourir à cette technique, mais pour les couples de personnes de sexe différent, il est moins évident qu'ils souhaitent le révéler. Comment, en réalité, aurions-nous pu savoir qu'il y avait eu une PMA avec tiers donneur, au moment de la naissance de l'enfant ? Il y avait des défauts dans ce modèle, c'est évident.

La mobilisation du titre VII du livre premier du code civil pouvait beaucoup interroger en termes de cohérence, dès lors que ce titre a été conçu eu égard à la procréation charnelle et que s'il y a deux lignes, une maternelle et une paternelle, c'est au regard de cette procréation charnelle, même si techniquement, on pouvait bloquer ces filiations comme on le fait pour les couples de personnes de sexe différent.

Les deux propositions étaient discutables. Elles avaient néanmoins l'immense mérite de préserver l'égalité entre les couples. Le texte adopté par l'Assemblée nationale me semble cumuler en réalité un certain nombre de faiblesses et précisément abandonner cette ambition de traiter également tous les couples. Nous sommes dans une vraie logique « d'en même temps ». Effectivement on ouvre la PMA, tout en disant que ce n'est pas un enjeu d'égalité, les débats à cet égard étaient extrêmement intéressants. Les ministres porteuses du projet ont explicitement dit que ce n'était pas une loi d'égalité, alors que nous aurions parfaitement pu dire que c'était une loi d'égalité dans la mesure où la situation d'une femme mariée à une autre femme qui ne peut pas avoir d'enfant n'est pas fondamentalement différente de celle d'une femme mariée à un homme stérile et qui souhaiterait pouvoir recourir à une PMA avec tiers donneur.

Vous aurez compris que je ne suis pas très convaincu par la solution qui a finalement été retenue.

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