Intervention de Fabien Jobard

Réunion du jeudi 9 juillet 2020 à 9h00
Mission d'information sur l'émergence et l'évolution des différentes formes de racisme et les réponses à y apporter

Fabien Jobard, politologue, directeur de recherche au CNRS, au CESDIP :

En Angleterre, la police a fait l'objet d'accusations très fortes de racisme et de comportements discriminatoires. Des émeutes se sont multipliées en Angleterre à partir de la deuxième moitié des années 1970 jusqu'au milieu des années 1980. Elles peuvent d'ailleurs resurgir de temps à autre. En août 2011, par exemple, il y a eu trois morts. Mais l'Angleterre se distingue de la France sur trois dimensions : la première, c'est que les guerres coloniales n'ont pas eu la même dimension en Angleterre et ne se sont pas portées sur le territoire métropolitain.

La deuxième dimension, c'est que la société s'est longtemps méfiée de la police en Angleterre. Les polices sont traditionnellement des institutions municipales très étroitement contrôlées par les municipalités. Depuis le début du XIXe siècle, la doctrine policière en Angleterre se résume dans l'idée « Policing by consent » : il faut toujours rechercher le consentement de la population. Il y a une culture iconique, avec l'image du bobby par exemple, qui est très différente de cette police centrale très rattachée au gouvernement qui s'impose aux citoyens pour faire régner l'ordre que nous avons en France.

Enfin, dès les émeutes de Brixton en 1981, le rapport de Lord Scarman de 1981 – qui évoquait d'emblée la question du racisme – a amené une réforme de la procédure pénale britannique, le Police and Criminal Evidence Act (PACE) de 1984 qui touchait notamment aux contrôles d'identité. Dix ans plus tard, nous avons eu le rapport dit « rapport MacPherson » sur le racisme institutionnel.

Je reviens à la France. Le récépissé aurait un effet indubitable. En alourdissant la charge de travail des policiers lorsqu'ils procèdent à un contrôle, on est sûr de diviser par 10 ou par 100 le nombre de contrôles effectués. Si on demande aux policiers de remplir un carnet souche à chaque contrôle, il y en aura beaucoup moins. Du même coup, le taux de succès des contrôles remonterait en flèche.

Les caméras-piétons ont été introduites en 2014 par le ministre de l'Intérieur, Manuel Valls, parce qu'il ne voulait pas des récépissés. Les caméras-piétons sont un bon instrument, mais tout dépend des manières de les faire fonctionner. Il semble qu'elles suscitent l'intérêt de la part des personnes contrôlées qui savent que les policiers sont filmés, et qui savent qu'elles-mêmes également sont filmées. Ces caméras permettent d'enregistrer l'ensemble de l'interaction, pour autant qu'elles se déclenchent au bon moment, etc. En ce sens, elles offrent du matériel intéressant.

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