Le premier point concerne l'impunité et les organes de contrôle. J'ai deux réponses là-dessus. La première concerne l'institution chargée du contrôle des déviances policières : il est clair qu'aujourd'hui que, quand bien même elle ferait bien son travail, l'IGPN subit une suspicion de la part de l'opinion du simple fait que ce sont des policiers qui enquêtent sur d'autres policiers.
On lit par ailleurs en une du Parisien que la chef de l'IGPN déclare réfuter totalement le terme « violences policières » à propos des « gilets jaunes » en jouant sur des distinctions conceptuelles très fines. Ce sont des déclarations qui, si l'on est attaché à la philosophie nominaliste sont sans doute très justes, mais qui ont des effets catastrophiques sur les citoyens.
Plusieurs intellectuels ont récemment proposé de faire en sorte que l'autorité de tutelle de l'IGPN ne soit plus la police, mais une autorité administrative indépendante telle que la Commission nationale des droits de l'Homme. Ce sont des solutions qui méritent d'être très rapidement discutées.
Vous savez que là où la police est locale, régionale, comme en Angleterre, en Allemagne, aux États-Unis, ou municipale, le chemin est beaucoup plus court : on n'a pas besoin de passer par le ministre ou par le préfet. Tous les acteurs, le maire, le député, et le policier siègent à la même table. Nous avons un souci structurel de la police française, qui ne sait pas se dépêtrer d'une décision prise par un beau matin de 1941, qui a consisté à nationaliser ce qui relevait depuis la loi de 1884 de la compétence du maire. C'est par « accident » que la police a été nationalisée et nous en payons encore aujourd'hui les conséquences.
De plus en plus, la gendarmerie intervient dans les mêmes zones que la police. Vous êtes députée du Val-d'Oise. Vous avez comme interlocuteurs possibles des policiers et des gendarmes. Le phénomène de périurbanisation de la France fait que les gendarmes sont confrontés aux mêmes problèmes que les policiers, mais il y a une culture de la discipline et du respect qui est sans doute plus forte en gendarmerie qu'en police.
Ce constat d'une plus grande proximité entre gendarmes et population qu'entre policiers et population était déjà formulé à la fin du rapport dit « rapport Peyrefitte » Réponses à la violence de 1977 qui portait sur l'état de la violence en France. Le rapport recommandait déjà à l'époque que la police s'inspire précisément de la discipline et du savoir-faire des gendarmes dans son action. C'est plutôt l'inverse qui a été fait.