Intervention de Patrick Karam

Réunion du jeudi 23 juillet 2020 à 11h05
Mission d'information sur l'émergence et l'évolution des différentes formes de racisme et les réponses à y apporter

Patrick Karam, vice-président du conseil régional d'Île-de-France en charge des sports, des loisirs, de la jeunesse, de la citoyenneté et de la vie associative, inspecteur général de l'éducation, du sport et de la recherche, fondateur et président d'honneur du Conseil représentatif des Français originaires d'outre-mer (CREFOM), président de la Coordination pour les chrétiens d'Orient (CHREDO), ancien délégué interministériel à l'égalité des chances des Français d'outre-mer :

En Île-de-France, trois sujets sont majeurs : la place des femmes dans la société et les nouvelles formes de discriminations et de soumission qui peuvent leur être imposées ; l'homophobie ; l'antisémitisme.

Il ne faut pas non plus occulter le racisme anti-Chinois que nous avons vu naître et déferler au moment de la covid. La violence était alors absolument abominable sur les réseaux sociaux. Nous avons tenu à recevoir la communauté chinoise, et plus largement asiatique, car beaucoup ne font pas la différence.

Vous avez raison, l'antisémitisme est un sujet majeur et une nouvelle forme d'antisémitisme se développe en plus de celui de l'extrême droite. Dans les banlieues, certains courants confondent Israël et les juifs. Ils considèrent qu'un juif est un sioniste et qu'un sioniste doit être combattu. Régulièrement, des incidents interviennent dans les écoles contre les enfants, simplement parce qu'ils sont juifs : quand on prend un enfant, qu'on le met dans la poubelle de la classe et que le corps enseignant ne réagit pas, cela n'incite pas les agresseurs à ne pas recommencer… Les victimes et les témoins nous font part de pressions dans les quartiers.

Les inspecteurs généraux de l'éducation, du sport et de la recherche (IGÉSR), auxquels j'appartiens, ont demandé une mission d'inspection sur les dérives communautaristes et islamistes dans les associations sportives et de jeunesse. Dans le sport, il peut y avoir quelques dérives antisémites, mais cela n'a pas la violence que l'on peut connaître dans d'autres secteurs de la société.

Vous m'interrogez sur ma mission. La charte que j'évoquais s'applique à tous les secteurs auxquels la région verse des subventions. Elle permet d'éliminer les acteurs qui tiendraient des propos ou des discours non conformes. Avant de verser une subvention, nous réalisons des recherches approfondies sur l'association et ses dirigeants. Ainsi, ceux qui prônent le boycott d'Israël, comme les membres du mouvement « Boycott, désinvestissement, sanctions » (BDS) ne peuvent être subventionnés puisque la Cour de cassation a indiqué que ce type d'action était illégal. Nous respectons donc le cadre légal. Il ne s'agit pas seulement de laïcité, mais aussi de défense des valeurs de la République.

Que finançons-nous ? À la fois des actions de prévention et de sensibilisation, du testing, non uniquement pour témoigner, mais comme base de procédures judiciaires, avec SOS Racisme, la Maison des potes ou des dizaines d'autres associations œuvrant dans le secteur de l'emploi, du logement, de la promotion des femmes ou contre toutes les formes de racisme.

Tous les ans, nous finançons un appel à projets contre les violences, qui recoupe nos actions en faveur des femmes, contre les discriminations, l'homophobie et l'antisémitisme. L'an passé, 800 000 euros ont été versés, auxquels s'ajoutent 2 millions d'euros au titre de la politique de la ville. Là encore, nous finançons des associations qui poursuivent en justice ceux qui s'en prennent aux populations en raison de leur origine, de leur couleur de peau, de leur religion, quelle qu'elle soit.

Pour les femmes, nous nous battons contre toutes les nouvelles formes de dérives : port forcé du voile intégral, abandon imposé de la scolarité, excision, violences intraconjugales et sur la voie publique. Nous finançons là encore des actions de prévention, de sensibilisation et de formation des professionnels, mais aussi des actions répressives car il nous semble que la sanction est pédagogique.

Je regrette que beaucoup d'associations que nous finançons aient du mal à trouver les compléments de financements pour disposer de l'intégralité de leur subvention – nous ne pouvons pas aller au-delà de 50 % de subvention. Ainsi, Stop homophobie est l'association qui engage le plus de procédures judiciaires. Quand nous lui octroyons 50 000 euros, elle a beaucoup de mal à trouver les 50 000 autres euros. La Délégation interministérielle à la lutte contre le racisme, l'antisémitisme et la haine anti-LGBT (DILCRAH) finance des opérations de sensibilisation plus que des procédures judiciaires, et les villes ne financent pas ces dernières. Or il faut utiliser toute la palette d'outils.

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