Après l'attribution du label, monsieur le président, nous intervenons régulièrement pour vérifier les améliorations éventuelles, étant entendu que nous n'excluons en rien une visite impromptue si nous avons le sentiment que cette attribution ne se justifie plus en raison de tels ou tels faits signalés par les syndicats ou les directions d'entreprise.
Généralement, une entreprise suit la politique qu'elle doit décliner en la matière et s'assure des résultats obtenus. S'ils ne sont pas satisfaisants, elle se doit de modifier sa politique de manière à atteindre les objectifs établis à partir du constat initial. C'est toute la philosophie du label : « Vous traitez vos propres maladies, pas celles du voisin, et parmi elles celles qui sont les plus graves », ce qui implique une hiérarchisation, donc, la mise en exergue du problème récurrent. L'entreprise doit donc mener un certain nombre d'actions et vérifier leur avancée de manière à pouvoir nous faire part tous les deux ans au moins de la totalité des objectifs qui ont été atteints, lesquels peuvent être d'ailleurs modifiés à tout moment en fonction des dispositifs d'alerte dont elle s'est dotée. Par exemple, lorsque la situation de personnes de telle ou telle origine ou de telle ou telle religion évolue défavorablement, le label impose d'intervenir de manière à régler le problème. Ce dispositif, avec ses paramètres et ses indicateurs, « colle » à la vie de l'entreprise. Après quatre ans d'attribution, nous réalisons un audit général afin d'étudier le renouvellement ou non du label, que certaines entreprises ont perdu faute d'avoir pu poursuivre une politique efficace.
Les améliorations, madame la rapporteure, visent à la fois les moyens et les résultats, les deux étant bien entendu liés. Nous demandons donc aux entreprises de travailler en interne afin d'éviter toutes les dérives et d'obtenir des résultats quantifiables car, comme vous l'avez rappelé, il est en effet possible de « compter » dans un certain nombre de domaines. Nous vérifions qu'une entreprise voulant atteindre tel seuil avant telle date y est parvenue, ce qui ne signifie d'ailleurs pas qu'un échec soit catastrophique : peut-être a-t-elle surestimé ces efforts ou sous-estimé le problème et doit-elle repenser son action. Nous ne la sanctionnerons que si de nouvelles mesures n'ont pas été prises.
Ce label ne comporte pas d'objectifs généraux tels que, par exemple, la présence de tant de pour cent de personnes en situation de handicap dans tel comité de direction. De la même manière, nous ne vérifions pas ce qui relèverait d'une politique de « quotas » telle que l'entend la loi du 27 janvier 2011 relative à la représentation équilibrée des femmes et des hommes au sein des conseils d'administration et de surveillance et à l'égalité professionnelle, dite « loi Copé-Zimmermann ». En revanche, si une entreprise se fixe des objectifs qu'elle n'atteint pas, il est de notre responsabilité d'intervenir afin qu'elle nous explique cet échec et comment elle se propose d'y remédier.
Toute la politique de l'État repose sur le processus au cœur de la démarche, allant de l'autoévaluation au label. La première étape, pour les employeurs qui s'engagent dans la lutte contre le racisme, consiste à savoir ce qui se passe dans leur entreprise et à diagnostiquer la maladie dont elle souffre. La deuxième, en liaison avec l'État, les partenaires sociaux et l'Association nationale des directeurs des ressources humaines, c'est la labellisation à proprement parler, qui elle est contraignante sur le plan des résultats et des vérifications. Enfin, troisième étape : le résultat, que nous espérons positif, après plusieurs années d'engagement.
L'autoévaluation ne suffit donc pas mais constitue un passage obligé : il n'est pas possible d'être labellisé sans en être passé par là. Le constat objectif initial que j'ai évoqué relève précisément de l'autoévaluation objective. Le tiers impartial et professionnel que nous sommes en vérifie ensuite le bien-fondé, comme il vérifie les politiques menées.
Par ailleurs, oui, nous relevons les bonnes pratiques. Avec l'État, nous travaillons en ce moment même à les répertorier et à les consolider, dans tous les domaines, de manière à élaborer un recueil qui pourrait être mis à la disposition de l'ensemble des employeurs intéressés. Ces bonnes pratiques concernent la communication, la sensibilisation – y compris des fournisseurs, qui jouent un grand rôle, et des clients –, la lutte contre les stéréotypes, la formation, les objectifs, etc.
Ainsi certifions-nous le groupe France Télévisions. L'une des bonnes pratiques, en l'occurrence, consiste à proposer des programmes qui font place à une certaine diversité – par exemple, une série où des acteurs jouent un rôle dans lequel ils ne sont pas attendus. L'approche est la même pour de grands groupes de distribution comme Casino.
Dans la fonction publique d'État, l'État se montre assez exemplaire. François Fillon, lorsqu'il était Premier ministre, avait décidé que l'ensemble des employeurs publics, donc, des ministères, devait obtenir le label, ce qui est aujourd'hui le cas de la quasi-totalité d'entre eux, à l'exception de deux ou trois qui sont encore engagés dans cette démarche. Les services du Premier ministre sont également candidats au label et, si les résultats sont positifs, ils devraient l'obtenir avant la fin de l'année, la décision relevant de la commission indépendante.
Globalement, les ministères font preuve de volontarisme, y compris à l'égard des personnes morales dont ils ont la tutelle. C'est par exemple le cas du ministère de la culture, dont le travail est remarquable, et des établissements publics dont il a la charge comme l'Opéra de Paris, des écoles d'architecture, des musées, lesquels introduisent une certaine diversité dans la programmation de leurs expositions temporaires.
Dans la fonction publique territoriale, de grandes villes comme Paris ou Bordeaux sont engagées, de même que des départements, comme la Seine-Saint-Denis, tant en ce qui concerne leurs ressources humaines que la politique de la diversité à destination de la population.
Dans la fonction publique hospitalière, en revanche, la situation est beaucoup plus mitigée. Quelques hôpitaux sont engagés ; une réflexion est en cours avec des grands acteurs hospitaliers mais, malheureusement, la crise sanitaire a tout bouleversé.
J'ajoute qu'en fonction de leurs dirigeants et de la situation, des établissements publics de coopération intercommunale (EPIC) se sont également engagés et déclinent des politiques remarquables. Il en est de même pour des sociétés dont l'État est actionnaire, comme ENGIE, où de très bonnes pratiques sont instituées, en particulier en matière d'inclusion et de non-discrimination à l'égard des jeunes, des personnes handicapées ou de telle ou telle origine.