Intervention de Olivier Kempf

Réunion du mercredi 22 septembre 2021 à 16h30
Mission d'information sur la résilience nationale

Olivier Kempf, chercheur associé, Fondation pour la recherche stratégique (FRS) :

Je suis également fondateur et vice-président de l'Institut national pour la cybersécurité et la résilience des territoires. Nous avons rapproché ces notions de résilience et de cybersécurité et celle de territoire, car ces espaces ne sont pas épargnés par les risques systémiques qui se multiplient. Si la résilience des territoires était surtout appréhendée sous le prisme des calamités naturelles, de nouvelles menaces systémiques pouvant affecter la résilience des territoires se manifestent avec une ampleur particulière, en particulier depuis les derniers mois : pensons à la pandémie, aux chocs climatiques ou aux risques cyber. Une sorte de « pandémie cyber » s'est même abattue sur nos territoires, nos entreprises, nos collectivités, nos concitoyens, qui se traduit par une véritable explosion des cyberagressions – terme que je préfère à celui de cyberattaques – qui me semble plus approprié aux usages militaires – reposant sur deux principaux vecteurs : le rançonnage, qui est désormais bien connu ; le « minage » clandestin des ordinateurs visant à extraire des bitcoins et autres cryptomonnaies ; ce phénomène ne doit pas être négligé.

Ces cyberagressions affectent de larges pans de l'activité et affichent une croissance à la fois quantitative – plus personne ne peut considérer qu'il est trop petit pour être agressé – et qualitative – nous observons une industrialisation et une élévation du niveau des agressions, même si la plupart d'entre-elles frappe surtout les premiers échelons de défense. L'image du pirate informatique capable de casser le code de la CIA depuis son garage de Saint-Pétersbourg ou de San Francisco relève désormais du mythe. Les pirates informatiques se sont professionnalisés et regroupés pour intensifier leurs activités. Ils peuvent tirer parti de la croissance continue du cyberespace, dont l'extension est liée aux vagues successives de révolutions informatiques – la transformation numérique étant la dernière en date – que nous connaissons depuis quarante ans. Ces acteurs bénéficient également de la multiplication des usages du numérique – que la pandémie a d'ailleurs accélérée à travers la généralisation du travail à distance.

Nous constatons par ailleurs un accroissement de la cyberconflictualité, qui relève du niveau politique et géopolitique. Il ne saurait cependant être question de « cyberguerre », dans la mesure où cette conflictualité se maintient en deçà d'un seuil de létalité dont les contours restent à définir. La difficulté d'attribuer les actions dans l'espace cyber à un agent ou à un commanditaire déterminé permet une multiplication des initiatives, qui perturbent nos alliances traditionnelles. Nos amis sont peu nombreux, puisque tout le monde avance masqué, sans connaître réellement les actes de l'autre. Tout le monde s'espionne. Dans la mesure où cette cyberconflictualité non létale n'impressionne ni les populations ni les dirigeants, il est difficile de l'entraver.

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