Nous avons de nombreux contacts avec la délégation parlementaire au renseignement, notamment pour l'élaboration de son rapport annuel, consacré cette année au renseignement territorial.
Je ne parlerai pas d'insuffisances : la délégation a souligné, chiffres à l'appui, que le renseignement territorial était monté en puissance, tant du point de vue de ses effectifs que de ses moyens techniques et budgétaires. Le renseignement généraliste, qui correspond aux capteurs du bas du spectre, pour le suivi des troubles à l'ordre public et des subversions violentes, a été remis à niveau.
La délégation parlementaire au renseignement a fait un très bon travail mais on peut aussi considérer que le verre est à moitié plein et rappeler que l'on partait de zéro. Le rapport pointe surtout les effets extrêmement néfastes de la réforme menée en 2008, qui a supprimé les renseignements généraux. Il a fallu reconstituer les capteurs du bas du spectre – ceux qui permettent de détecter le séparatisme, la radicalisation et les subversions violentes – dont nous avions été privés ces dernières années. C'est un exercice qui a débuté sous le quinquennat précédent et que nous avons poursuivi en renforçant les effectifs des services de renseignement.
La délégation parlementaire suggère de faire du renseignement territorial une direction en tant que telle – il relève actuellement de la direction générale de la police nationale et de la direction centrale de la sécurité publique. Ces réflexions sont en cours d'expertise. Nous allons les intégrer mais il faut tout d'abord que le renseignement territorial achève sa montée en puissance. Nous avons tiré les leçons des échecs du passé en fluidifiant les relations entre les services : au lieu de faire des réformes structurelles, nous avons poussé les services à travailler ensemble, avec une efficacité importante puisque cela a permis de déjouer trente-six attentats. De même, concernant les gilets jaunes, le renseignement territorial s'est très vite adapté et a été en mesure de prévenir un certain nombre de violences graves. Plus personne ne conteste la nécessité d'un renseignement territorial généraliste : il y a un consensus politique sur ce point.
La crise sanitaire crée beaucoup d'incertitudes dans l'opinion et a pu générer un certain nombre de mouvements, de groupuscules, de mouvements sectaires. Cela relève du champ d'action du renseignement territorial, qui n'a pas, je le crois, connu de défaillance sur ce sujet. La crise a eu un impact sur la montée du complotisme, des théories d'ultradroite et de la remise en cause des institutions démocratiques représentatives – cela va souvent de pair. En réveillant des peurs, elle a pu pousser certains de nos compatriotes, en nombre limité, à adhérer sur les réseaux sociaux à ce type de théories, voire à s'engager dans des groupuscules d'action violente. Certains membres des groupes que nous avons démantelés, y compris celui qui avait enlevé la petite Mia, se sont connus lors de manifestations complotistes, antivax, antipass, etc. La crise sanitaire a joué un rôle dans la montée de cette mouvance et sur sa forme assez nouvelle de remise en cause des institutions.