Il est toujours difficile, psychologiquement, de penser la catastrophe, car nul ne veut qu'elle advienne. Nos concitoyens se concentrent plus sur la fin du mois que sur la fin du monde ! Les nouvelles générations n'ont pas connu de périodes très difficiles et bien des choses leur semblent acquises. Le sentiment de sécurité est très vif. Sans doute conviendrait-il que nos concitoyens prennent conscience que nous vivons dans un monde instable.
La dépendance technologique est également de plus en plus prégnante et ils devraient se préparer psychologiquement, en cas de rupture, à ne pas se retrouver en état de sidération. Le maire de Saint-Martin-Vésubie nous a fait part de ce phénomène de sidération lorsque, à 6 heures de l'après-midi, il n'y avait plus de téléphone, ni d'eau ni d'électricité. Il nous a confié qu'il se devait de rester debout alors que le cataclysme était aussi dans sa tête : « Quand un chef met un genou à terre, c'est toute la troupe qui se couche… » En tant qu'autorité, il a dû faire preuve de résilience. La vallée a été également sauvée par un fort sentiment d'appartenance et une cohésion sociale très puissante qui confèrent à ses habitants une grande force morale et une grande solidarité.
Comment promouvoir une telle force morale et l'adhésion non forcée à un projet collectif ? Ne pourrait-on pas permettre aux maires qui le souhaitent d'inscrire un tel projet pédagogique dans les écoles ? L'uniforme, les traditions n'ont-t-ils pas un rôle à jouer pour consolider l'appartenance à un collectif et favoriser ce que l'ancien chef d'état-major des armées appelait l'« esprit guerrier » ? Les pays asiatiques, qu'ils soient démocratiques ou autoritaires, ne résistent-ils pas d'ailleurs mieux que nous à la crise sanitaire ? Leur rapport au collectif est très différent du nôtre et leurs habitants, sans qu'il leur soit imposé quoi que ce soit, sont capables de se discipliner.