Intervention de Bastien Lachaud

Réunion du jeudi 4 juin 2020 à 9h30
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBastien Lachaud :

Cette proposition de loi prétend favoriser la reprise de l'économie après le confinement en exonérant de cotisations sociales les patrons dont les salariés reprendraient le travail à temps plein dans les cinq jours suivant sa promulgation.

Pour le groupe La France insoumise, ce dispositif relève de la pensée magique. Tout d'abord, il postule que la reprise du travail à temps plein est une affaire d'incitation ou de bonne volonté. C'est faux et insultant : celles et ceux qui sont contraints au temps partiel ne sont pas des fainéants. Les études sur la fraude sont très claires : au moins un quart des salariés ont été indûment maintenus en activité aux frais de l'État par leur employeur. Exonérer les patrons de cotisations lorsque ces salariés reprendront le travail, cela revient tout bonnement à récompenser la fraude.

Du reste, il existe bien des raisons de ne pas reprendre le travail à temps complet, à commencer par le respect des précautions sanitaires imposées par l'épidémie. Certains donnent une prime aux travailleurs qui prennent des risques. Comble de l'absurdité, ce texte avantage les patrons qui se désintéressent de la santé de leurs salariés. En outre, pour reprendre le travail à temps plein, il faut pouvoir confier ses enfants à l'école ou à une crèche. Or, bien souvent, les préconisations du ministère de l'éducation nationale ne le permettent pas. Combien de mairies doivent demander aux parents de trouver des solutions alternatives à la scolarisation ?

Enfin, inciter à la reprise de l'activité par des exonérations de cotisations, c'est, encore une fois, déséquilibrer les comptes sociaux. C'est une mesure purement idéologique, qui vise tout bonnement à affaiblir le système de protection sociale pour affirmer, bientôt, qu'il est inefficace. Qui veut privatiser la protection sociale organise sa faillite...

En réalité, pour protéger les petites entreprises et relancer l'économie, c'est l'inverse qu'il faut faire. L'argent public ne devrait pas servir à affaiblir la protection sociale, mais à compenser directement le manque à gagner de ceux qui ont dû fermer boutique pendant le confinement.

Les nécessités du déconfinement devraient aussi inciter à prendre de la hauteur et à constater que le chômage partiel compensé est en réalité la préfiguration d'une nécessaire diminution du temps de travail. Au lieu d'inciter les salariés à reprendre à temps complet, mieux vaudrait orienter les crédits vers la reprise d'activité de celles et ceux qui sont complètement au chômage. Ce faisant, nous soutiendrions la demande intérieure et relancerions l'activité. C'est plus ou moins ce qu'a décidé la Première ministre néo-zélandaise en instaurant la semaine de quatre jours. Cette mesure a en outre un avantage écologique certain, puisqu'elle supprime une journée de déplacement entre le domicile et le travail.

Cela suppose évidemment un transfert d'argent du capital vers le travail, ce qui vous est insupportable.

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