Intervention de Olivier Véran

Réunion du mercredi 7 octobre 2020 à 16h15
Commission des affaires sociales

Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé :

La réforme de la tarification en psychiatrie et en soins de suite et de réadaptation n'est pas repoussée et sera effective comme prévu, au début de 2021.

Le PLFSS propose une forme de droit d'option pour un financement à la dotation populationnelle dans l'ensemble des hôpitaux. Nous avons choisi une expérimentation très active en faisant confiance aux territoires et aux établissements de santé pour qu'ils postulent à un appel à projet national et dessinent eux-mêmes leur modèle de financement.

Des discussions sont en cours avec les partenaires sociaux à propos du fractionnement du congé de paternité et du délai de prévenance, étant entendu qu'on ne peut pas tout fractionner au risque de perdre en cohérence.

La question du sous-objectif de l'ONDAM « Santé publique et prévention » a bien souvent été débattue. En réalité, la détermination de ces dépenses est très difficile à réaliser dans un PLFSS puisque la prévention y est partout. Ce qui ne serait pas défini dans un sous‑objectif de l'ONDAM laisserait penser qu'il ne figure pas ailleurs. J'y reste plutôt défavorable.

S'agissant des modalités de financement de la protection sociale, nous avons un agenda social pour beaucoup de réformes – les retraites, l'autonomie... Les discussions sont en cours et nous rendrons des arbitrages afin d'y voir plus clair. Par ailleurs, j'ai annoncé la saisine du HCAAM sur la rénovation du modèle de financement qu'est l'ONDAM ; j'ai évoqué le rapport Vachey et d'autres autorités susceptibles de nous faire des propositions, tout en précisant bien que l'objectif est que la sécurité sociale, comme elle l'a toujours fait, paie ses dettes.

Nous avons choisi de reconnaître automatiquement la covid-19 comme maladie professionnelle pour tous les soignants. Les non-soignants peuvent déposer un dossier pour qu'il en soit de même. Le coût est estimé entre 10 et 15 millions d'euros pour la branche AT‑MP, et il sera vraisemblablement de 5 millions pour les libéraux – cette fois, sous l'égide de l'État à travers le programme 204. Les hypothèses seront beaucoup plus assurées dans quelques mois.

Je vous remercie le groupe LaREM pour sa confiance à l'égard d'un texte en effet porteur de très grandes avancées sociales, que j'ai hâte de discuter avec vous dans l'hémicycle.

S'agissant du « Ségur », il est totalement faux que les ambulanciers et les personnels du SAMU ne seraient pas concernés par la revalorisation salariale : la totalité des métiers de l'hôpital est concernée, ambulanciers et SAMU compris. Pour ce qui est du secteur privé, nous sommes à moins de quarante-huit heures de la signature d'un accord majoritaire entre la Fédération de l'hospitalisation privée et les syndicats représentatifs. Comme le Gouvernement s'y était engagé, la totalité des salariés du secteur privé lucratif et non lucratif bénéficiera de ces mesures de revalorisation.

M. Grelier votera-t-il la hausse de salaire, qui représente 8,8 milliards par an et qu'il juge insuffisante ? Votera-t-il en faveur du financement exceptionnel de 2,4 milliards supplémentaires pour l'autonomie et la cinquième branche ? Votera-t-il en faveur des 500 millions supplémentaires pour la branche famille afin d'allonger le congé de paternité ? Ce n'est jamais assez, a-t-il dit, mais quelles mesures de financements supplémentaires proposera-t-il par voie d'amendement ?

La démocratie sanitaire est, en effet, un enjeu essentiel pour lequel nous devons nous battre plus encore. Depuis la loi du 4 mars 2002 défendue par Bernard Kouchner, j'y crois fermement. La crise sanitaire a d'ailleurs montré, et j'en prends ma part de responsabilité, qu'elle a peut-être été le parent pauvre lors d'un certain nombre de processus décisionnels territoriaux et nationaux. Elle relève moins du PLFSS que du « Ségur », où j'ai eu à cœur, avec les associations, de restaurer et d'amplifier la place des usagers. Je reste ouvert à vos propositions.

Le forfait patient urgences n'est pas inéquitable ; c'est le système actuel qui l'est. Pour certains patients qui passent aux urgences, le reste à charge peut coûter cher alors que le plafond sera désormais de 18 euros et pris en charge à 95 % par les complémentaires santé. Cette réforme ne rapporte aucun euro à l'État ni, évidemment, à la sécurité sociale, puisqu'elle se fera à budget constant. Par ailleurs, le système de facturation des urgences était si complexe qu'il nécessitait d'y affecter des équivalents temps plein (ETP) administratifs qui auraient été fort utiles en soins. Ce n'est donc pas une mesure d'économie mais de simplification, de clarification et d'équité.

Je n'ai pas suffisamment parlé des grossistes-répartiteurs pendant la crise. Pourtant, comme me le demandait la présidente de l'Ordre national des pharmaciens que j'ai reçue juste avant cette réunion, il ne faut pas les oublier, car eux aussi ont été en première ligne, n'ont jamais cessé de travailler et se sont montrés indispensables. Nous l'avons d'ailleurs reconnu puisque nous avons augmenté leurs indemnités pour la distribution de masques.

De surcroît, la crise économique a eu des conséquences sur leur activité, qui a baissé en raison de moindres commandes de médicaments et de dispositifs médicaux remboursables, alors que ces professionnels sont soumis à des coûts fixes. J'ai pris une mesure d'urgence dont l'effet sera pérennisé en 2021 grâce à un financement de 30 millions d'euros, ce qui est éloquent quant à la reconnaissance de la nation à leur égard si on se réfère aux amendements discutés les années précédentes.

Nous nous engageons pour les EHPAD non lucratifs comme pour les EHPAD publics. Les partenaires sociaux doivent simplement transposer les mesures prises lors du « Ségur » dans leurs conventions collectives, ce qui sera très rapidement le cas. L'enveloppe financière est prévue et, à nouveau, l'État tiendra son engagement.

Je ne ferai pas ici un long exposé philosophique sur les collectivités, la société et l'État dans la gestion de crise. Certaines collectivités ont été parties prenantes de la gestion de crise sanitaire dès le premier jour et ont apporté leur aide ; d'autres ont eu plus de mal à le faire et certaines, enfin, sont plus ou moins « aidantes », voire « opposantes ». Je vous le dis, moi, ministre des solidarités et de la santé, la gestion du risque sanitaire restera une prérogative nationale, régalienne, parce que l'État doit prendre ses responsabilités. Néanmoins, chaque fois que c'est possible, utile, et sauf avis contraire, nous nous appuyons davantage chaque jour sur les territoires, en les consultant, en se concertant. Je pourrais vous parler longuement de mes échanges, au plus fort de la crise, avec différents présidents de collectivités, quel que soit leur bord politique, afin de leur apporter l'appui de l'État pour l'importation ou la distribution de masques ou quand il a fallu s'occuper des EHPAD. Nous avons demandé leur appui aux départements, et je remercie Dominique Bussereau, président de l'Assemblée des départements de France, d'avoir accepté de nous aider. Le mieux est sans doute l'ennemi du bien et je revendique le rôle déterminant qu'a joué l'État.

Mme Fiat a pu lire le texte il y a quelques jours. Levons un voile pudique sur cette pratique très courante dont personne ne parle : le texte circule depuis des jours, il est publié sur des sites de presse spécialisée et il est envoyé aux caisses nationales de sécurité sociale. Une tradition d'ordre constitutionnel veut que les parlementaires en prennent connaissance après la présentation en Conseil des ministres mais, nous n'allons pas nous mentir : chacun d'entre vous y a accès par les caisses de sécurité sociale, les syndicats ou sur internet depuis un certain nombre de jours.

Le développement de la télémédecine était bloqué à 10 000 actes par semaine, voire moins, et nous l'avons dynamisé à un million en deux semaines grâce à la multiplication des supports et à la facilitation de l'accès, mais aussi parce que le reste à charge est nul et qu'il n'y a pas d'avances de frais. Pour en avoir discuté avec vous lorsque nous étions sur le même banc dans l'hémicycle, madame Bagarry, je sais que vous êtes favorable à ce que l'assurance maladie obligatoire couvre une plus grande partie du risque sanitaire. Je n'ai donc pas peur du déploiement de la télémédecine, au contraire, je n'y vois que du bien, les retours d'expérience étant très positifs. Enfin, l'arrêté que j'ai reconduit jusqu'au 31 décembre 2020 comporte, sinon des garde-fous, du moins des règles de bonnes pratiques. Les négociations conventionnelles avec les syndicats de médecins libéraux permettront également de définir les conditions grâce auxquelles la télémédecine pourra continuer sur sa lancée.

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