Intervention de Claire Pitollat

Réunion du mercredi 28 octobre 2020 à 9h30
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaClaire Pitollat, rapporteure :

Mes chers collègues, je vous remercie pour toutes vos questions très intéressantes, et pour cette unanimité au sujet de ce nouveau rapport pour avis. Il est effectivement très important que la commission des affaires sociales s'investisse toujours davantage sur le logement, dont la dimension sociale est importante.

Monsieur Perrut, vous m'interrogez sur la baisse du rythme de construction et sur les dispositifs utiles à l'accession au logement. Comme je l'ai souligné dans mon propos liminaire, l'habitat neuf ne doit pas mobiliser toute notre énergie, car c'est une goutte d'eau si on le rapporte au parc existant. Nous devons encourager la réhabilitation des logements vacants, réorienter leur destination pour augmenter le volume des logements, car nous manquons clairement de logements durables ou adaptés. De plus, c'est une démarche vertueuse sur le plan écologique. Je préférerais favoriser des systèmes qui accélèrent le rythme des rénovations.

Vous avez parlé de la rénovation thermique, qui est mal accompagnée. C'est un fait, la rénovation thermique n'est pas simple à entreprendre. Il peut être long de mobiliser les dispositifs. Le Gouvernement s'est attelé ces dernières années à les simplifier, et le rythme des rénovations commence à s'accélérer, comme vous l'avez souligné. Il est temps de ne plus opposer rénovation thermique du logement et réhabilitation sanitaire. Je développerai davantage mon propos lorsque je répondrai à la question de M. Bazin.

Action Logement est un partenaire essentiel du logement, avec lequel il faut bien entendu travailler. Il importe également de veiller à améliorer l'efficience de son fonctionnement. Les discussions avec le Gouvernement vont dans ce sens. Action Logement est en train de modifier son système de gouvernance et vise l'efficience.

Vous avez souligné la nécessité d'une politique à plus long terme. C'est effectivement le sens de mes propos. Nous devons viser avant tout le logement durable.

Madame de Vaucouleurs, toutes les structures de l'hébergement collectif ont été affectées par des contraintes sanitaires. Il a fallu effectivement fermer les espaces collectifs, mais les chèques services et la distribution alimentaire ont été au rendez-vous : plus de 110 000 personnes en ont bénéficié.

Vous demandez également comment éradiquer l'habitat indigne. Il n'est pas prévu d'augmenter les crédits. Cependant, les ordonnances prises sur le fondement de la loi « ELAN » ont été publiées au mois de septembre dernier. Nous devrons veiller, en particulier, à la mise en place de la police de l'habitat. Les acteurs que j'ai auditionnés ont souligné que l'action contre l'habitat indigne est plurielle sur le territoire : elle nécessite un réseau d'acteurs mobilisés – les collectivités, les services de l'État, les différents bailleurs et les entreprises effectuant les travaux.

M. Paul Christophe et M. Perrut ont posé des questions sur les APL. Les crédits dédiés aux APL augmentent cette année, alors qu'ils avaient diminué les années précédentes. Il faut surtout noter que l'année 2021 verra la réforme dite de la contemporanéisation, c'est‑à‑dire, pour parler plus simplement, une évolution en temps réel des APL, une révision plus régulière de leur montant sur une moyenne annuelle visée par trimestre, une moyenne glissante qui permet vraiment de coller aux besoins de la personne. Cette réforme peut inquiéter, mais elle est vraiment nécessaire : elle permettra de faire en sorte que les personnes ayant besoin d'une aide au logement en bénéficient rapidement. Elle devrait se passer au mieux. La Caisse nationale des allocations familiales nous a indiqué que les premiers essais avaient été concluants. Aussi, nous l'attendons avec impatience.

Monsieur Delatte, vous m'avez interrogée sur les foyers de jeunes travailleurs et le FSL. S'agissant des FJT, il faut veiller au respect de la durée maximale de séjour, fixée à deux ans. Ces structures d'hébergement offrent un accompagnement en vue d'accéder à un logement ordinaire. Nous devons veiller à ce que ce soit bien le cas, pour éviter qu'elles ne soient suroccupées. Elles ne sont pas spécialisées ; les jeunes travailleurs qui y sont accueillis sont dans des situations diverses.

Elles accueillent de plus en plus de mineurs non accompagnés. La question de la coordination de l'accueil des migrants est difficile à traiter. Nous avons régulièrement entendu dire, au cours des auditions que nous avons menées, que le programme 177 risque la saturation, en raison d'une surutilisation de ses crédits au profit de personnes relevant plutôt du programme 303 Immigration et asile. Nous devons nous atteler à la question du logement des personnes à droits incomplets, qu'il s'agisse des mineurs non accompagnés, susceptibles de se trouver à terme en situation irrégulière, ou des étrangers qui s'y trouvent déjà. Nous devons adopter une approche bien plus réaliste de ces questions. Certaines de ces personnes resteront sur le territoire français ; il faut leur donner les moyens de s'insérer.

S'agissant du FSL et des fortes disparités existant selon les départements, nous n'avons pas pu, dans le délai qui nous était imparti, auditionner l'Assemblée des départements de France, mais la question doit être approfondie. Nous devons étudier la manière dont le FSL est utilisé dans les départements. Depuis le début de la crise, de nombreux départements ont ouvert l'accès au FSL de façon plus large, au profit de publics en principe non éligibles. Sur ce point comme sur d'autres, la crise peut offrir des enseignements.

Monsieur Vigier, ce rapport pour avis en appelle d'autres, avez-vous dit ; je suis tout à fait d'accord avec vous. Un travail de fond doit être mené sur la dimension sociale du logement, notamment sur le devenir du travail social. Les travailleurs sociaux œuvrent quotidiennement pour l'hébergement et le logement des plus fragiles. Il est clair que leurs outils, ainsi que l'organisation de leur travail, doivent être améliorés. Dans ce domaine comme dans d'autres, nous avons fort à faire.

Vous déplorez que les maires manquent de moyens pour lutter contre l'habitat indigne. Ils n'en sont pas totalement dépourvus. En la matière, il faut mener une action globale et coordonnée dans les territoires. Nous pourrions par exemple envisager de recenser les expérimentations du permis de louer, qui constitue un moyen assez efficace d'agir de façon préventive. L'ANAH peut également être mobilisée, mais elle ne peut agir sans les collectivités territoriales. À ce jour, onze projets partenariaux d'aménagement ont été lancés, accompagnés notamment par la direction de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages. Le maire n'est plus seul, il peut s'appuyer sur des dispositifs d'accompagnement. Certes, tout cela prend du temps ; c'est pourquoi il vaut mieux agir en prévention qu'après coup. Les agences régionales de santé (ARS) contribuent également au ciblage de l'action publique en effectuant des recherches de logements indécents ou insalubres. Les maires auraient tout intérêt à essayer de construire des politiques de territoire avec l'ARS.

Monsieur Belhaddad, vous m'avez interrogée sur les copropriétés dégradées. En la matière, l'action la plus efficace est celle de l'ANAH, qu'il faut intensifier. Toutefois, l'agence ne peut pas agir seule ; une mobilisation volontariste des territoires est nécessaire. Les ordonnances prévues par la loi « ELAN » visant à réformer la police de l'habitat, notamment la police de l'habitat indigne, permettront sans doute d'inciter les territoires à agir. L'ANAH soutiendra leur action, qui bénéficiera également de l'élargissement de MaPrimeRénov' à la rénovation énergétique des copropriétés.

Monsieur Bazin, vous avez abordé l'approche sanitaire du logement, qui m'est chère. Je suis tout à fait d'accord avec vous : plutôt une haute qualité sanitaire que la HQE. Nous nous autorisons à noter la performance énergétique des logements, mais nous ne sommes pas capables de noter leur performance sanitaire. Or nous passons 80 % de notre temps à l'intérieur – et 90 %, chez nous, qui plus est, pendant le confinement. La dimension sanitaire du logement est donc fondamentale. Vous déplorez que les nouvelles constructions offrent des espaces relativement confinés. La rénovation énergétique des logements tend à en faire des boîtes étanches, dont il importe d'assurer la ventilation. Lors de l'examen du projet de loi « ELAN », j'ai défendu des amendements visant à élargir le champ d'application du DPE des logements, en vue d'établir un diagnostic de performance global, permettant notamment de valoriser leur respirabilité pour les occupants.

Le permis de louer pourrait être un moyen d'agir. Les communes pourraient y inclure la dimension sanitaire du logement. Quoi qu'il en soit, on ne peut plus laisser dire que la rénovation énergétique des logements a pour seul objet la réduction de la consommation d'énergie. On ne peut plus l'envisager sans prendre en considération la ventilation des logements et la qualité de l'air intérieur. Au demeurant, les grandes solutions de rénovation énergétique procèdent toutes de façon globale. Nous devons réaliser des avancées en ce sens. Monsieur Bazin, je serai à vos côtés si vous ouvrez ce débat dans l'hémicycle.

Madame Tamarelle-Verhaeghe, vous m'avez demandé si le renforcement des mesures coercitives est associé à celui des mesures préventives. Je suis d'accord avec vous : il est nettement plus facile d'agir préventivement qu'après coup. Depuis quelques années, l'intérêt pour la dimension sanitaire du logement a fait naître de nouveaux métiers. Les conseillers médicaux en environnement intérieur en font partie ; ils sont trop peu sollicités. Ils permettent de renouveler l'approche des logements dont les occupants développent des pathologies, et d'agir plutôt que de laisser la situation se dégrader. C'est l'un des axes du plan national santé environnement. On a tendance à aborder la question en silos, sans l'associer au logement et à l'hébergement : il faut mener une politique décloisonnée, tenant compte de la dimension sanitaire du logement et permettant d'agir préventivement. Le permis de louer et l'élargissement du champ de MaPrimeRénov' peuvent constituer des solutions. Plus généralement, il faut élargir la perspective sur la rénovation énergétique, en rappelant qu'elle doit être globale, et qu'elle ne se réduit pas à une amélioration de la consommation énergétique, mais inclut une amélioration du confort et des qualités sanitaires des logements.

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