Nous abordons cet après-midi une question complexe compte tenu de ce qui se passe depuis quelques mois mais aussi, peut-être, depuis quelques années, avec un chômage de masse durable.
Collectivement, nous avons posé voilà quelques décennies le principe du plein emploi, lequel devait guider nos choix et nos orientations pour que chaque homme et femme trouve sa place dans notre société grâce à l'emploi. Cette ambition est devenue problématique mais je considère qu'elle doit rester notre bel horizon, fût-il utopique. Peut-être doit‑elle être transformée en une ambition d'une activité professionnelle pour tous, même si elle ne relève pas d'un contrat de travail classique. Il faut être pragmatique : il serait déjà essentiel de donner à chaque homme et à chaque femme une activité.
Nous avons donc appréhendé le budget de la mission et le plan de relance pour l'année 2021 en tenant compte de la première vague de la crise sanitaire, économique et sociale. Celle-ci nous plaçait déjà en situation d'urgence, caractérisée notamment par un taux de chômage de 10 ou 11 % selon les prévisions des organismes. Notre point de vue sur votre budget n'était donc pas le même que les trois premières années : à nouvelle donne, nouvelles difficultés liées à l'emploi, avec leurs conséquences sur l'équilibre financier des organismes chargés du travail et de l'emploi.
La deuxième vague épidémique bouleverse déjà notre vision d'il y a quelques semaines. Nous serons suspendus aux lèvres du Président de la République ce soir, comme nous attendons le débat que nous aurons demain sur les choix qui seront faits, mais on sait déjà que la récession économique va être terrible et que le nombre de demandeurs d'emploi va augmenter en 2021.
D'où la nécessité d'une politique publique de l'emploi non seulement ambitieuse, comme cela vient d'être dit, mais aussi très novatrice. Osons casser certaines pratiques, faire fonctionner le logiciel qui nous aidera à trouver d'autres solutions ; surtout, restons à la fois exigeants et bienveillants envers les structures chargées de l'accompagnement et de la réinsertion professionnelle. Au-delà des chiffres, le travail est un sujet de fond : il y va de sa place dans notre société, de notre cohésion sociale, de la valeur travail – autant de questions qui méritent d'être soulevées en 2020 et 2021.
Gérard Cherpion a eu la grande honnêteté de relever l'augmentation des crédits de la mission. Il faut évidemment prendre des mesures favorisant l'emploi et, surtout, repenser l'accompagnement des demandeurs d'emploi, avoir d'autres exigences à leur endroit, d'autres réflexes pour les inciter à l'activité.
Ce matin, nous sommes parvenus à un accord en CMP sur la proposition de loi relative au renforcement de l'inclusion dans l'emploi par l'activité économique et à l'expérimentation « territoires zéro chômeur de longue durée ». J'ai noté, madame la ministre, vos orientations et les mesures de votre budget en la matière.
S'agissant d'emploi, nous ne pouvons que vous inviter à envisager des solutions locales. Il y a dans chaque bassin de vie, dans chaque bassin d'emploi des ressources, des hommes et des femmes, des collectivités territoriales, des entreprises, des organismes de formation, au plus près des possibilités existantes, disposés à agir. Pourtant, cette année, il n'y a plus de crédits pour les maisons de l'emploi, alors que leur mission n'a fait l'objet d'aucune évaluation et qu'il n'existe aucun « plan B », et on ne fait pas grand-chose pour mobiliser les associations, qui disposeraient pourtant de leviers pour remettre les gens au travail et bénéficieraient ainsi de ressources humaines supplémentaires.
En matière d'IAE, vous avez récemment pris un virage après les débuts atones de votre majorité, mais la question de l'aide au poste se pose encore – nous y reviendrons.
S'agissant des jeunes, enfin, vous n'apportez qu'une réponse budgétaire concernant les dispositifs qui existent déjà, alors qu'il aurait fallu proposer des solutions innovantes.