Ce chiffre de 70 % correspondait plus à un ordre de grandeur, car en réalité il est très difficile de déterminer précisément la proportion de réservistes « clandestins ». En tout état de cause, nous savons que ce chiffre est élevé. Pour remédier à cette situation, il est clair qu'une solution réside dans la signature de conventions de partenariat. En effet, lorsqu'il conclut une convention, l'employeur peut ensuite communiquer avec ses collaborateurs afin de leur faire savoir que leur hiérarchie est favorable à ce qu'ils s'engagent comme réservistes, et même qu'elle attache de l'importance à un tel engagement, qui s'effectuera dans un cadre contractuel bien défini – c'est ce qu'a fait récemment le groupe Casino.
Je suis intervenu récemment à un colloque de l'Institut des hautes études de défense nationale (IHEDN jeune), et ils étaient de plus en plus nombreux à faire figurer sur leur CV leur engagement de réserviste. De même, des DRH m'ont indiqué que cette mention pouvait attirer leur attention lorsqu'ils doivent sélectionner un CV. Ce sont autant de signaux qui témoignent d'un mouvement de fond. L'hébergement n'est pas à proprement parler un frein mais plutôt un facteur de complexité, particulièrement dans l'organisation des périodes de formation initiale venant s'ajouter aux difficultés à disposer de suffisamment de champs de tir, de places de restauration, etc. En dehors de ces périodes, le réserviste n'est pas hébergé, à moins d'être déployé pour un exercice ou une mission. En revanche, il est vrai que nous avons parfois des difficultés à disposer des locaux dont nous avons besoin – salles de cours ou de sport, vestiaires, etc. –, ce qui est une problématique à laquelle les armées sont également assez largement confrontées pour l'active : en la matière, la situation est souvent tendue. C'est pourquoi nous avons fait en sorte d'obtenir, dans le cadre de la loi de programmation militaire, un budget – hors masse salariale – nous permettant de réhabiliter un certain nombre d'espaces destinés aux activités des réservistes.
La garde nationale est un concept, un label qui manifeste et favorise la transition entre les réserves d'hier et celles de demain. La seule structure ayant une existence propre est le secrétariat général de la garde nationale, qui n'a pas de personnalité juridique, mais dispose d'un certain nombre de délégations du ministre des Armées, ce qui lui permet notamment de signer les conventions avec les employeurs, donc de s'engager pour l'ensemble de la communauté des réservistes à l'égard de leurs employeurs.
Nous entretenons des relations étroites avec la police nationale – j'ai moi-même rencontré à plusieurs reprises son directeur général. Si la police est plutôt modestement représentée au sein de la garde nationale – moins de 5 000 policiers ou anciens policiers sur 70 000 réservistes –, il y a actuellement une volonté du directeur général de la police nationale de développer et de réformer le mode de recrutement des réservistes de la police : alors que le recrutement actuel porte principalement sur les anciens policiers, notamment ceux qui sont à la retraite, la police devrait ouvrir plus largement son recrutement à la société civile dans les mois qui viennent, comme la gendarmerie et les armées l'ont déjà fait. La garde nationale montre en la matière son effet fédérateur et catalyseur, puisque la police s'est rapprochée de la gendarmerie nationale pour essayer de mettre sur pied un mode de recrutement sur le modèle de ce qui est fait pour les armées et la gendarmerie.
Certes, l'engagement des réservistes se traduit par des absences professionnelles dont les administrations ou les entreprises doivent s'accommoder, mais les employeurs gèrent au quotidien l'absentéisme de leurs collaborateurs, et de ce point de vue, les cinq jours minimum qu'un réserviste peut prendre chaque année, en respectant un préavis d'un mois, ne me paraissent pas insurmontables. En la matière, il est essentiel que s'établisse un dialogue entre le réserviste et son employeur direct. J'insiste sur le fait que, hors situation exceptionnelle relevant de la RSN, la garde nationale n'impose jamais à un réserviste de prendre sur son temps de travail quinze ou trente jours d'affilée : si nous exprimons des besoins, en particulier au cours de certaines périodes, il revient à chaque réserviste de voir ce qu'il peut raisonnablement faire en fonction de sa situation personnelle, professionnelle et familiale.
J'en viens à la relation entre l'employeur et le salarié. Nous avons conclu de nombreuses conventions avec les entreprises, mais aussi avec les administrations – je l'ai fait avec un conseil régional, un rectorat d'académie, une université et même des communes. Nous avons également commencé à signer des « chartes d'engagements réciproques » avec certaines branches ou équivalent, comme récemment avec l'Union des entreprises de sécurité privée (USP) ainsi qu'avec la fédération des sociétés d'intérim. Nous privilégions évidemment les branches correspondant à des métiers où l'engagement de réservistes présente un sens et un intérêt particulier. Je précise qu'avec les branches, on ne parle plus de conventions, car elles ne font que représenter des entreprises, sans être elles-mêmes des employeurs directs : l'engagement conclu porte alors le nom de « charte d'engagements réciproques ». À titre d'illustration, j'ai évoqué tout à l'heure la charte d'engagements réciproques que nous avons conclue avec le barreau de Paris, afin d'encourager les entreprises qui emploient des avocats à leur permettre de s'engager au sein de la garde nationale.
Nous attachons une grande importance à ce que les femmes qui veulent s'engager dans la réserve soient bien accueillies et y trouvent toute leur place. Mais nous n'avons pas de raisons objectives de favoriser un sexe plutôt qu'un autre.