Monsieur le ministre, le 13 octobre dernier, je vous interrogeais sur la stratégie vaccinale de la France alors que se profilait l'arrivée, avant la fin de l'année, de deux vaccins aux États-Unis et que le gouvernement britannique avait déjà déterminé sa propre stratégie. Je craignais des retards en France. Vous m'aviez alors répondu : « Rassurez-vous, tout est prêt ! » et aviez considéré ma question comme une vaine polémique. J'y avais vu une marque de l'habituelle suffisance du Gouvernement ; c'était en fait de l'insuffisance.
Une course contre la montre s'est engagée face à la menace du variant anglais et peut-être du variant sud-africain. Le second confinement n'a pas atteint les objectifs qui lui avaient été assignés et le déconfinement demeure incertain dans ses méthodes et ses effets. Vous accélérez donc, en promettant qu'un million de Français seront vaccinés à la fin du mois de janvier – à cette date, 2,3 millions de Britanniques l'auront été – et en prévoyant que 14 millions le seront avant l'été alors que nos voisins d'outre-Manche atteindront ce chiffre le 14 février prochain. La question demeure : comment allons-nous faire ? Ce retard est évidemment un désastre économique et social ; c'est aussi une tragédie humaine.
Bien d'autres questions se posent, du reste. Pourquoi ne vous êtes-vous pas préparés plus tôt ? Pourquoi une logistique si laborieuse et un recours si tardif et si prudent à l'armée, à la différence de ce qu'ont fait d'autres nations ? Pourquoi ne pas avoir anticipé le consentement, notamment pour les résidents des EHPAD ? Pourquoi y a-t-il seulement cinq plateformes interrégionales de répartition du vaccin dans le flux A ? Pourquoi ne pas avoir engagé une communication à destination du grand public, donnant ainsi le sentiment que vous abordiez la vaccination à reculons ? Pourquoi les collectivités locales n'ont-elles pas été associées plus en amont ? Pourquoi les super-congélateurs n'étaient-ils pas tous opérationnels fin décembre ? Pourquoi y a-t-il, dans certains établissements de santé, plus de doses que d'aiguilles pour les administrer ? Pourquoi seulement 10 % à 15 % de doses ont-elles administrées sur le million reçu ? Pourquoi les pharmaciens ne sont-ils pas autorisés à vacciner, alors que l'enjeu est d'opérer une montée en puissance du nombre de vaccinateurs ? Pourquoi la stratégie d'approvisionnement des centres de distribution concernant le vaccin Moderna était-elle encore en cours de définition il y a trois jours ? Pourquoi n'envisage-t-on pas, en France, de super-centres de vaccination ? Pourquoi vous a-t-il fallu recourir à McKinsey ?
Les questions de la représentation nationale, monsieur le ministre, sont précises ; elles ne relèvent pas de la polémique, elles sont une exigence envers les Français que nous représentons.