Intervention de Stéphanie Rist

Réunion du mardi 9 mars 2021 à 21h00
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaStéphanie Rist, rapporteure :

La commission mixte paritaire de la semaine dernière ne nous a malheureusement pas permis d'aboutir à un accord avec nos collègues sénateurs sur ce texte. Je le regrette vivement. Toutefois, je tiens à souligner que, peut-être plus encore qu'à l'habitude, la navette parlementaire a considérablement enrichi ce texte.

Tout d'abord, elle a permis de préciser les dispositions initiales de la proposition de loi, qui ont beaucoup évolué au cours des débats, à l'Assemblée comme au Sénat, en commission, puis en séance. Je me félicite de ces évolutions, qui montrent la plus-value et le sérieux du travail parlementaire.

Surtout, nos travaux et ceux du Sénat ont permis de faire émerger de nouveaux sujets nous tenant à cœur en tant que parlementaires, mais qui sont aussi très importants pour les acteurs du terrain.

Ainsi, au terme de son examen en première lecture par nos deux assemblées, cette proposition de loi, qui comptait seulement quinze articles initialement, rassemble désormais neuf articles adoptés ou supprimés conformes et quarante-six articles encore en discussion. Dix-sept articles nouveaux ont été ajoutés par le Sénat.

Plusieurs propositions de notre Assemblée ont fait l'objet d'un consensus, ce que reflètent les articles adoptés conformes au Sénat.

C'est notamment le cas de l'élargissement des compétences des sages-femmes. Le Sénat a adopté les articles, très attendus sur le terrain, permettant aux sages-femmes de prescrire enfin des arrêts de travail de plus de quinze jours et de les renouveler. Cela permettra à la fois de mieux reconnaître les compétences des sages-femmes et de réduire les inégalités d'accès aux soins.

Le Sénat a par ailleurs adopté conformes la plupart des articles visant à simplifier la gouvernance des organismes mutualistes. Les dispositions votées permettront de protéger les mutuelles et la logique de solidarité qu'elles promeuvent.

Nous avons également convergé sur la simplification des démarches des personnes en situation de handicap. Considéré comme une priorité par la majorité depuis le début de la législature, ce chantier connaît, à travers ce texte, un progrès décisif, avec la mise en place d'une plateforme numérique pour centraliser les démarches de ces personnes et de leurs aidants.

Un certain nombre de dispositions adoptées au Sénat constituent de réelles avancées pour notre système de santé, qu'il convient de préserver.

Je pense notamment à l'extension des compétences de certains professionnels de santé. Je salue ainsi la possibilité, introduite au Sénat, pour les ergothérapeutes de prescrire des dispositifs médicaux, notamment des aides techniques. Je me félicite également de la disposition votée au Sénat permettant la pleine entrée en vigueur de la compétence des masseurs-kinésithérapeutes en matière d'adaptation de prescriptions médicales d'actes de masso-kinésithérapie. Je salue aussi l'extension des compétences des orthophonistes en matière d'adaptation et de renouvellement des prescriptions médicales d'actes d'orthophonie.

Malheureusement, l'écart séparant les deux chambres s'est illustré sur plusieurs points de la proposition de loi. C'est en particulier le cas sur les protocoles de coopération, prévus à l'article 1er bis, auxquels je tiens beaucoup. Ce dispositif permet aux professionnels de santé travaillant en équipe de s'engager, à leur initiative, dans une démarche de coopération pour mieux répondre aux besoins des patients. La mise en place des protocoles de coopération a été récemment simplifiée par la loi d'accélération et de simplification de l'action publique, dite « ASAP ». L'Assemblée a adopté, à mon initiative, des dispositions permettant d'étendre ces protocoles de coopération simplifiés au secteur médico‑social et à l'exercice coordonné en ville. Le Sénat, lui, est revenu sur les dispositions de la loi « ASAP », rendant ainsi beaucoup plus complexe, voire impossible, la mise en place de protocoles de coopération. Je proposerai évidemment le rétablissement de cet article.

En ce qui concerne la gouvernance hospitalière, je me réjouis que le Sénat partage notre vision sur le principe fondamental posé par cette proposition de loi : redonner de la place aux soignants. Nous sommes également d'accord sur certaines propositions concrètes, notamment celles issues du rapport du professeur Claris.

Toutefois, des désaccords importants sont apparus sur plusieurs points de la rénovation de la gouvernance hospitalière. Une première divergence porte sur la dissociation du statut de directeur des soins et de président de la commission des soins, à l'article 6. Cette dissociation, qui n'est pas demandée par les acteurs du terrain, déstabiliserait la gouvernance et nuirait à l'attractivité des postes de directeur de soins.

Le Sénat a également supprimé, à l'article 9, la possibilité pour des étudiants d'être membres du directoire, qui me tient très à cœur. De même, il a supprimé l'article 11, relatif au projet de management des établissements de santé, alors que cette attente avait été exprimée lors du Ségur de la santé et que de nombreux amendements, de tous les bancs, avaient été adoptés en première lecture sur cet article.

Sur ces sujets de gouvernance hospitalière, je proposerai le retour aux rédactions issues de l'Assemblée, notamment sur ces derniers points, tout en essayant au maximum de maintenir les rédactions issues du Sénat lorsque c'est possible.

Enfin, une divergence fondamentale est apparue au sujet de la nécessaire lutte contre les dérives de l'intérim médical.

La loi de modernisation de notre système de santé de 2016 a permis de plafonner par voie réglementaire la rémunération des prestations d'intérim. Toutefois, malgré ce signal extrêmement fort, le cadre réglementaire fixé reste très insuffisamment respecté et appliqué. Il est temps désormais de se montrer le plus ferme possible contre ces pratiques abusives, qui grèvent les finances de petits hôpitaux publics. Il faut, pour cela, doter les agences régionales de santé (ARS) d'outils dissuasifs. C'est l'objet de l'article 10 de la présente proposition de loi. Aussi, la suppression pure et simple par le Sénat de cet article en séance publique est, pour moi, inconcevable. Je proposerai, ainsi que nombre de nos collègues, le rétablissement de l'article 10 dans sa version adoptée à l'Assemblée en première lecture.

En résumé et pour conclure, j'aborde cette nouvelle lecture dans un esprit d'ouverture à l'égard des propositions du Sénat, sans pour autant renoncer aux évolutions importantes adoptées à l'Assemblée en première lecture.

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