Nous sommes nombreux à nous réjouir que cette question de la fin de vie et du droit des malades arrive enfin dans notre commission, après les multiples évaluations des lois précédentes, après les tergiversations des mandats passés, après plus de trois ans d'un groupe d'études très suivi et ayant effectué beaucoup d'auditions afin de combler quelques lacunes dans les textes antérieurs. En ce moment, il est plus impérieux que jamais de développer en même temps les soins palliatifs et l'aide active à mourir, et surtout l'écoute attentive des malades en fin de vie. La pandémie de covid‑19 a révélé à tous les Français les problèmes non résolus des conditions de fin de vie, en dépit d'un dévouement exceptionnel et sans faille des professionnels en charge des patients.
C'est une loi visant à garantir le droit des malades : droit à attendre la fin naturelle plutôt que de subir des euthanasies clandestines, sans avoir été consultés ; droit à être dispensé d'agonie pour ceux qui récusent les souffrances de cette phase ultime. Je précise que ce droit n'impose à aucun malade ni à aucun médecin un choix qui n'est pas le sien. Au contraire, il offre la liberté de choix à tous. Chacun sait bien qu'avec l'aide active à mourir aucun médecin ne tue un malade. Comme l'écrivaient Anne Bert et Chantal Sébire, c'est la maladie qui nous tue, pas le médecin, pas le juste qui apporte un geste d'amour, de compassion qui humanise l'agonie.
J'ai conscience que certains d'entre nous, hostiles à ce progrès, proposent une fois encore de s'adonner à la procrastination, invoquant la nécessité d'évaluer les textes antérieurs. Je respecte parfaitement la diversité des opinions, surtout sur un tel sujet, éminemment personnel et relevant de convictions intimes, mais cet argument ne peut pas être entendu. Jamais loi n'a été autant évaluée que la loi Claeys‑Leonetti, qui confortait le décret Fillon de janvier 2010. L'IGAS l'a évaluée, le CESE a effectué une évaluation très complète et poussée, suivie d'un excellent rapport. Plusieurs études ont été conduites par le CNSPFV. Une loi peu appliquée est habituellement une loi peu applicable. Tout va dans le sens de l'urgence de la compléter.
Surtout, les Français l'ont évaluée. Nombreux sont ceux qui se rendent chaque année dans les divers pays limitrophes qui nous ont précédés dans ce progrès. Inversement, aucun habitant de ces pays ne vient terminer sa vie en France, où les insuffisances n'ont pas encore été corrigées. Mes chers collègues, entendons la demande des Français. Ne nommons pas encore une commission pour enterrer le problème, comme le disait Clemenceau. Le général de Gaulle rappelait en 1963 que l'essentiel n'était pas ce que pensaient le comité Gustave, le comité Théodule ou le comité Hippolyte, mais ce qui était utile au peuple français.