Intervention de François-Michel Lambert

Réunion du mercredi 31 mars 2021 à 21h00
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançois-Michel Lambert, rapporteur :

Merci pour toutes ces interventions, qui s'accordent à une très large majorité à reconnaître l'échec des politiques actuelles de répression, même si elles ont des ambitions différentes quant à la voie à emprunter pour assurer l'efficacité de l'action politique en s'éloignant d'une idéologie qui n'a plus lieu d'être.

Il a été rappelé que ce débat est novateur dans notre enceinte. Le tabac et l'alcool, on en parle depuis longtemps, et souvent – tous les ans même à l'occasion du projet de loi de finances. Mais légaliser le cannabis, le placer dans un cadre autorisé, c'est la première fois que nous en débattons pleinement. C'est appréciable, alors que les débats dans la chambre haute sont beaucoup plus verrouillés.

Ludovic Mendes, pour La République en Marche, reconnaît que la légalisation a des atouts, mais propose de renvoyer à la prochaine législature pour se donner du temps. Il s'interroge sur le rôle de la SECA, sur les risques de croiser le tabac et le cannabis chez les buralistes ou sur les lieux d'autorisation ou d'interdiction. J'aurais aimé qu'il propose des amendements pour enrichir le texte sur ces sujets.

Bernard Perrut s'interroge sur la date choisie pour examiner ce texte, mais il connaît cette maison mieux que moi. Il se trouve que le groupe Liberté et Territoires dispose d'une niche le 8 avril, peu avant les conclusions de la mission d'information commune sur le cannabis : nous saisissons cette occasion pour avancer, proposer, débattre. Bien loin de minimiser la menace que représente le cannabis pour la santé, nous nous inquiétons de la situation actuelle, où le contrôle a été perdu. Des jeunes, des très jeunes consomment du cannabis issu de trafics, donc forcément frelaté, d'origine inconnue, avec un taux de THC élevé ; il faut trouver une voie. Quant à savoir si la légalisation sera suffisante, c'est une question intéressante. Nous devons travailler à convaincre, et c'est le chemin que je vais emprunter.

Michèle de Vaucouleurs rappelle que tout le monde fait le constat de l'échec de la politique de répression. Elle semble vouloir aller de l'avant, mais s'inquiète d'un manque de consultations et d'avis. Toutefois cette proposition de loi a été présentée, il y a bientôt deux ans, de façon concomitante avec un rapport du Conseil d'analyse économique, rattaché au Premier ministre, qui avait la même approche. D'autres études présentent le sujet sous le même angle, même si d'autres encore ont d'autres visions. En tout cas, la mission d'information commune nous a, me semble-t-il, largement fournis en informations.

Je remercie Michèle Victory, vice-présidente de la mission d'information commune, pour ses propos. Elle perçoit clairement l'enjeu, et ses critiques portent sur la mise en œuvre : les buralistes, la SECA... Quoi qu'il en soit, il faut avancer, et alors les dispositions prévues par ce texte pourront évoluer.

Je remercie très chaleureusement Annie Chapelier de son soutien depuis plus de deux ans sur le sujet. Elle rappelle les échecs subis et montre la voie dans laquelle nous devons nous engager, tout en faisant part de quelques questionnements. En expliquant que sa position n'est pas partagée par l'ensemble de son groupe, et j'en tiens compte, elle démontre qu'il s'agit bien d'un sujet de société.

L'expérience de Valérie Six est extrêmement intéressante, et elle conforte peut‑être justement le sentiment que nous sommes dans une impasse. Nous sommes, pour une grande part d'entre nous, des parents, parfois des grands-parents. Vous avez sans doute connu, comme moi, l'inquiétude du passage de l'adolescence. Je le vois dans ma circonscription, nos enfants évoluent dans un cadre qui les met plus au contact du cannabis que je ne le suis moi‑même ! Nous devons avoir cette réalité en tête. L'éducation et la prévention ne seront pas suffisantes. Nous devons trouver d'autres leviers pour agir, comme pour le tabac et l'alcool, sur des produits qui ne doivent absolument pas être consommés avant 18 ans, voire plus. Il nous semble que la légalisation nous permettrait de reprendre la main et sans aucun doute de faire reculer le nombre de jeunes qui sont au contact du cannabis. C'est une conviction personnelle.

Frédérique Dumas a parlé de non-politique de santé publique. Effectivement, nous en sommes à cinquante ans d'aggravation et d'échecs. D'autres ont fait ce que nous proposons. L'Europe dans son ensemble avance, à des niveaux différents. Ludovic Mendes, qui est voisin du Luxembourg, sait très bien que dans quelques mois, peut-être un an, la vente de cannabis y sera légale. Je ne sais pas comment la France pourra avoir une position beaucoup plus restrictive que ce pays si proche dont la frontière est à peine plus visible qu'entre deux régions françaises.

Je remercie Caroline Fiat de son soutien. Elle a rappelé les bilans positifs des politiques menées à l'étranger – il y a eu aujourd'hui encore une avancée à New York – et leurs résultats en termes de santé – on connaît son expertise professionnelle en la matière. Oui, nous devons aller de l'avant.

Pierre Dharréville a rappelé que le sujet n'est pas simple et soulève beaucoup de questions. Notre seul objectif est celui de la santé publique, je le confirme : on peut entendre parler, dans la présentation de cette proposition de loi, de données économiques ou d'emplois dans les territoires, mais ce qui me conduit et ce que j'ai entendu dans chacune des interventions, c'est le souci de la santé publique. Chacun veut éviter un échec qui pourrait être pire que la situation actuelle. Alors débattons, voyons comment aller de l'avant avec une légalisation encadrée du cannabis.

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