Intervention de de la CNSA

Réunion du mercredi 7 avril 2021 à 9h30
Commission des affaires sociales

de la CNSA, présidente :

Monsieur le rapporteur général, vous m'avez interpellée sur la question de la future COG et c'est effectivement une question décisive. La COG qui s'achève actuellement – pour laquelle nous allons construire un avenant pour 2021 – contient une cascade d'objectifs tous plus techniques les uns que les autres et présente une visibilité assez problématique, à tel point que nous ne savons pas très bien ce que nous évaluons en tentant de l'évaluer. Je suis donc assez critique sur ce type d'exercice de style administratif.

La COG est le sens de l'histoire, l'articulation de la branche à l'État, un outil technique mais aussi politique. La COG doit garantir que le résultat que nous nous sommes fixé est bien atteint à son terme, après quatre années. Si nous ne parvenons pas à construire une ossature porteuse de sens, nous passerons à côté de l'objectif. Nous constituons donc actuellement au sein du conseil une commission permanente consacrée à la COG. Son premier travail sera de préparer la COG pour 2021. Ce sera une sorte de galop d'essai de la COG suivante et nous devons tout de suite commencer à réfléchir à ce que doit être une COG.

Une COG n'est pas une œuvre technique mais une œuvre politique. C'est pourquoi je veux dire à la représentation nationale que le conseil que je préside est ouvert aux échanges. Nous devons dialoguer et c'est le sens de la création de la COG. C'est le sens des futurs travaux et des futurs débats que vous conduirez, qui ne feront pas de la CNSA une espèce d'annexe au débat parlementaire sur la loi de financement de la sécurité sociale mais un véritable sujet à part entière. Je ne demande pas mieux que d'avoir un échange approfondi avec vous sur cette COG, qui sera en quelque sorte le bras armé de la branche et de l'État pour atteindre les objectifs et l'ambition de la vie autonome pour nos concitoyens.

Annie Vidal pointait les schémas que nous avons utilisés par construction : la question de l'évolution du PIB, de l'inflation. Nous les avons repris essentiellement dans les annexes à la loi de financement de la sécurité sociale. Dès lors que nous décidons d'utiliser comme type de recette cette CSGA, un travail paramétrique peut être réalisé. La valeur 0,28 que nous indiquons est indicative ; il nous semble que, dans le contexte des hypothèses actuelles, cette valeur permet de solvabiliser le besoin et d'être à maturité en 2030. Cela ne signifie pas que la représentation nationale n'aurait pas à intervenir sur le niveau et sur le paramétrage de ce compartiment de CSGA lors du débat en loi de finances et en loi de financement.

Ce qui m'intéresse dans la CSGA est la solidité de son rendement, son efficacité, son assiette particulièrement large. Elle constitue une forme de réponse à ce que disait le député Thibault Bazin concernant les choix que porte ce système de financement. D'autres hypothèses sont possibles ; celle-ci nous a semblé inscrite dans les équilibres actuels de la sécurité sociale. Elle nous paraît susceptible de paramétrages et donc d'adaptations au contexte de notre pays. Elle nous semble donc satisfaire ce besoin d'une ressource juste dans la mesure où elle touche tous les revenus.

Nous avons même fait l'hypothèse que, dans une construction un peu audacieuse, nous pourrions y greffer une fraction de droits de succession. Pourquoi, en effet, ne pas élargir encore un peu ce compartiment de CSGA ? À la différence du rapport de Laurent Vachey en particulier, nous souhaitons éviter cette énumération de mesures et de dispositions entre lesquelles nous ne savons pas trancher et qui ne sont pas suffisamment lisibles pour un débat avec la Nation. L'idée est donc de pouvoir paramétrer et adapter la ressource à la situation économique de notre pays et aux enjeux en matière de vieillissement.

Bernard Perrut m'a interrogée essentiellement sur la question des financements nationaux et territoriaux. Je me pose la question de la soutenabilité des financements territoriaux et de leur équité compte tenu de la disparité des situations des départements donc de la réalisation très contingente des objectifs de nos politiques d'action sociale. Il nous semble que nous avons la possibilité, en renforçant les ressources du système de financement de l'autonomie, de renforcer les concours faits aux départements. Ceux-ci ont fondu entre la création de la CNSA, avec une relation à peu près à égalité, et la situation d'aujourd'hui, où les concours de la CNSA ont stagné tandis que, du fait de l'accroissement des besoins de financement, les concours départementaux se sont accrus. Cela nous semble problématique car l'évolution des ressources des territoires est fragile.

Comment introduire des effets péréquateurs réels et efficaces si la solidarité nationale ne renforce pas les dotations aux collectivités territoriales ? Si elle le fait, il faut en revanche changer le pilotage mais cela ne signifie pas partir dans une vision centralisatrice qui mépriserait les réalités territoriales. Cela signifie inventer un État moderne qui sait piloter à l'aide d'une contractualisation librement consentie entre les parties.

Nous pouvons imaginer que, pour les départements particulièrement engagés, disons de façon un peu caricaturale plus engagés pour l'autonomie que pour les ronds-points, nous pourrions avoir un effet de proportion sur la mise en œuvre de ces concours et l'affectation de concours prenant en compte la qualité des politiques de l'autonomie, le niveau de mobilisation de l'acteur territorial, la capacité à mobiliser les intercommunalités, les communautés de communes et l'ensemble du maillage infraterritorial.

Ce maillage est aujourd'hui un contributeur à la politique de l'autonomie qui passe à travers les écrans radar. Nous pourrions donc nous engager dans de véritables schémas partagés pour l'autonomie dans les territoires, soutenus par des politiques publiques toutes convoquées à la politique de l'autonomie. Les CPOM territoriaux me paraissent être l'outil de ce pilotage partagé des politiques de l'autonomie. Nous n'aurons ainsi ni gagnant ni perdant, ni bons ni mauvais, ni chefs ni indiens, mais une communauté d'actions pour la vie autonome de nos concitoyens.

J'ajoute que nous avons commencé, à travers une démarche de prototypage à laquelle nous sommes très attachés, à travailler dans cette logique avec des présidents de conseils départementaux. Nous constatons qu'ils sont demandeurs de cette approche et n'ont pas le sentiment que l'État entrerait par la fenêtre pour ôter aux collectivités territoriales leurs spécificités. Je ne connais pas de politique efficace sans un pilotage, un contrôle et une évaluation renforcés. Leur absence n'est bénéfique pour personne et notre système de financement propose d'aborder cette vision partenariale assumée, partagée et rigoureuse.

Cyrille Isaac-Sibille m'a interrogée sur la proposition d'un fonds qualité présentée par Dominique Libault et a insisté sur la question de la prévention, qui est évidemment tout à fait centrale. Dans la mesure où notre système de financement permet d'accroître la capacité de financement de la branche, la structuration d'un fonds qualité est évidemment envisageable mais la prévention doit absolument apparaître à tous les étages. Nous devons la retrouver au niveau de la formation des professionnels et dans la transformation du modèle de l'EHPAD domiciliaire de demain.

Nous devons aussi la retrouver dans des dispositions de grande vulgarisation comme le programme ICOPE de soins intégrés pour les personnes âgées du Pr Vellas. Ce programme permet à chacun, dès l'âge de 50 ans, alors qu'il est en pleine possession de ses moyens, d'avoir la « grammaire » de ce qu'est l'avancée en âge et la longévité. La grammaire de la longévité consiste, pour schématiser, à être capable de se lever cinq fois de suite de sa chaise sans prendre appui sur les bras, à bénéficier dans son alimentation des capacités à assurer son capital santé, à ne pas avoir des relations sociales qui se limitent à dire bonjour et au revoir au boulanger chaque jour. Cette grammaire de la longévité doit devenir une grille partagée par tous afin de détecter au plus vite tout ce qui précipite l'effet du vieillissement au lieu de garantir la qualité de la longévité.

Nous avons la possibilité de traiter cet enjeu décisif avec ces financements accrus. C'est la même question que la mobilisation de toutes les branches en faveur de la longévité. Thibault Bazin en a parlé de façon un peu tronquée en affirmant qu'il s'agissait de prendre les financements d'une branche pour les apporter à l'autonomie mais notre système de financement n'est pas du tout fondé sur un tel transfert. Il est fondé sur l'idée de ressources accrues pour la branche autonomie et sur la mobilisation de chaque branche puisqu'elles qu'elles sont toutes concernées par la question de la vie autonome. Il s'agit de faire en sorte que, au-delà de la bonne santé de nos concitoyens, la question de leur vie autonome fasse partie des objectifs de l'assurance maladie, sans transfert à la branche autonomie.

Agnès Firmin Le Bodo m'a interrogée principalement sur l'« utopie atteignable » qui l'a rendue perplexe parce qu'une incantation exacerbée à la solidarité nationale pourrait se traduire par une forme de déresponsabilisation, pour caricaturer un peu son propos. Je crois que la question sous-jacente au problème du financement est vraiment la vie autonome de la personne en tant que citoyen à part entière. L'idée que ce citoyen s'en remettrait aveuglément à la protection sociale pour traiter le problème de sa vie autonome serait comme si, en matière de santé, il faisait n'importe quoi en s'en remettant à l'assurance maladie. Je ne dis pas que certains de nos concitoyens n'ont pas de type de réflexe mais, globalement, le rôle de l'assurance maladie est de soutenir une certaine culture générale en santé en même temps que d'apporter des réponses lorsque la maladie survient.

De même, pour la branche autonomie, à travers le libre choix et la contribution individuelle à la vie quotidienne, à travers la construction des prestations – APA, PCH – qui sont fondées sur le projet de la personne, la dimension de la responsabilité de la personne est très importante. Nous pensons même que cette liberté accrue permettra à nos concitoyens de se prémunir contre les conséquences du vieillissement et de mieux comprendre les enjeux de la prévention.

La prévention se heurte souvent à une forme de distanciation. Si ce qui est proposé avec des actions de prévention me fait plus peur qu'il ne me rassure, je ne suis pas acheteur de la prévention. En revanche, lorsque la prévention me garantit que je vivrai mieux parce que j'ai adopté des comportements de prévention et de responsabilité, je suis acheteur de cette prévention.

La conférence des financeurs a effectivement aujourd'hui un horizon trop étroit qui contribue à son caractère impressionniste. Le pilotage est d'autant plus vertueux qu'il a un horizon responsabilisant, qui permet de construire une véritable trajectoire.

Valérie Six m'a interrogée sur les composantes du rapport Vachey. Le conseil de la CNSA a pris une option avec ce système de financement. Nous n'avons aucune prétention à atteindre une quelconque forme de vérité mais il nous est apparu que quelqu'un devait essayer de définir un possible. Ce n'est pas très simple lorsque se trouvent autour de la table des représentants des territoires, des organisations syndicales, des fédérations, des professionnels... Parvenir à se mettre d'accord sur un schéma de financement a demandé beaucoup de résilience aux membres du groupe.

Pourquoi ne pas choisir la TVA sociale ? J'ai fait une campagne législative voici quelques années après une élection au cours de laquelle l'hypothèse de la TVA sociale avait été faite par les candidats durant la période entre les deux tours. C'est un souvenir traumatique que celui de la réaction de mes concitoyens sur le marché de Nogent-sur-Marne. J'ai pensé ce jour-là que notre pays devait être vraiment accompagné pour assumer une disposition de type TVA sociale afin d'éviter une très forte incompréhension, tellement j'avais perçu l'hypersensibilité des personnes que je rencontrais.

Nous avons gardé l'option de la CSGA parce que c'est par construction une option que porte notre branche. Cela nous semblait logique de poursuivre ce que vous avez engagé lors de la création de la branche en la dotant d'une fraction de CSG. Avec son assiette large, notre CSGA est dans le même esprit que la CSG pour la Caisse d'amortissement de la dette sociale.

Je reviens avec la question de Thierry Michels sur cette opération de prototypage. Il nous semble que les conseils départementaux seraient prêts à entrer dans cette démarche de pilotage partagé. Nous avons pu le tester avec l'opération de prototypage réalisée par le conseil de la CNSA.

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