Intervention de Véronique Hammerer

Réunion du mercredi 14 avril 2021 à 16h30
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaVéronique Hammerer, rapporteure :

Comme vous le savez, la MSA constitue une caisse de sécurité sociale singulière dans le paysage français. Avec ses cinq millions de ressortissants, elle est le deuxième plus grand régime de sécurité sociale. À la différence du régime général, la MSA fonctionne sur un modèle de guichet unique. Elle délivre des prestations relevant des branches maladie, famille, vieillesse, accidents du travail et maladie professionnelle, et assure le recouvrement des cotisations sociales. Elle verse vingt-sept milliards d'euros de prestations sociales. Ses missions lui sont conférées par le législateur. La MSA est au service de l'ensemble des habitants, notamment dans les territoires ruraux, mais pas uniquement, et elle contribue également au développement sanitaire et social.

La création de la cinquième branche de la sécurité sociale a conduit à s'interroger sur le rôle de la MSA et son positionnement par rapport à la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA), qui a une vocation universelle. Lors de l'élaboration du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2021, nous nous sommes aperçus avec M. Nicolas Turquois que la MSA n'était pas nommée explicitement dans le dispositif portant création de cette cinquième branche. La LFSS pour 2021 a donc permis de préciser que la MSA participe, avec la CNSA, à la détermination des orientations en faveur du soutien à l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées, et qu'elle contribue à la mise en œuvre de cette politique.

Ce moment de latence démontre cependant bien une chose : les missions des MSA en matière d'action sanitaire et sociale demeurent souvent méconnues des décideurs publics, sinon des publics en eux-mêmes. Mes collègues soulignent fréquemment que la MSA fait bien sûr un excellent travail, mais son action réelle est souvent méconnue dans les ministères.

J'ai voulu valoriser ce savoir-faire des MSA en matière de prévention de la perte d'autonomie, que je connais bien pour y avoir travaillé six ans comme assistante sociale. Je me suis attelée à un tour de France des caisses locales de la MSA. Pour alimenter cette mission, j'ai rencontré des décideurs et des travailleurs sociaux.

J'ai souhaité, suite au rapport de Mmes Mireille Robert et Josiane Corneloup sur l'accueil familial, porter plus avant ma mission, constatant que la MSA avait une forte présence sur le territoire et un grand savoir-faire. Je me suis demandé pourquoi ne pas mettre ce savoir-faire à disposition des départements sur la question de l'accueil familial, qui est complètement sous-développé en France, pour le promouvoir, le soutenir et l'animer.

Je tiens à apporter des remerciements avant de poursuivre. J'ai une pensée très forte pour les caisses de la MSA de Gironde, du Grand Sud, de Loire-Atlantique-Vendée, de Lorraine, du Nord‑Pas-de-Calais, de Picardie, du Poitou, de Sud Aquitaine, la caisse générale de la sécurité sociale de La Réunion, et les personnels de la caisse centrale, dont je remercie également le président, M. Cormery, le directeur général, M. Blanc, M. Bondonneau et Mme Rasc, qui a été d'une présence exemplaire, ainsi que M. Simon, qui ont permis que cette mission se déroule le mieux possible.

La MSA regroupe cinq millions de ressortissants et s'appuie sur trente-cinq caisses, constituant un maillage territorial très important ; elle fonctionne sur le modèle du guichet unique, et verse vingt-sept milliards d'euros de prestations. Son savoir-faire est confirmé et ancré.

Elle propose beaucoup de prestations individuelles extralégales ; il s'agit principalement des aides à domicile, notamment à destination des personnes âgées, mais pas uniquement. La MSA effectue du portage de repas ; elle propose aussi un service de téléassistance, Présence verte, que tout le monde connaît, je le pense. La MSA finance également des adaptations de logements. Je voudrais rendre hommage à la MSA Grand Sud, qui développe notamment avec des ergothérapeutes des actions très spécifiques, qu'il convient de renforcer et qui sont très intéressantes. Depuis le mois de juin 2020, des rendez‑vous de prévention sont proposés à de jeunes retraités.

Le programme national de prévention de la MSA prévoit également des actions collectives, qui se déroulent dans un cadre interrégimes sur le « bien vieillir ». Des ateliers sont développés sur la vitalité, le « bien vieillir », par exemple les ateliers Peps Eureka, avec des programmes qui portent sur la mémoire, la nutrition, le numérique, pour aider nos aînés à se familiariser avec les nouvelles technologies.

Ces actions collectives de prévention touchent quatre-vingt mille personnes par an, sachant que la MSA n'intervient pas uniquement pour des publics agricoles, mais travaille également en interrégimes, dans le cadre de partenariats noués avec la Caisse nationale d'assurance maladie (CNAM), les Caisses d'assurance retraite et de la santé au travail (CARSAT), les caisses primaires d'assurance maladie (CPAM), ou encore la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL). La MSA travaille avec des acteurs locaux bien connus, tels que les centres communaux d'action sociale (CCAS), les centres locaux d'information et de coordination (CLIC), les départements, etc.

Elle a mis en place des associations de santé, d'éducation et de prévention sur les territoires (ASEPT), qui constituent des relais politiques pour les MSA et qui nouent des partenariats interrégimes.

Enfin, la réussite des actions de la MSA repose sur 800 travailleurs sociaux sur l'ensemble du territoire, territoires d'outre-mer (TOM) compris. Ils sont souvent dotés d'un diplôme d'assistant social, ou de conseiller en économie sociale. Ces personnels, qui sont principalement féminins, ne font pas que de l'accompagnement individuel. Ils portent aussi des projets d'ingénierie sociale, et développent une méthode appelée le développement social local (DSL), sur laquelle je reviendrai ultérieurement. Si les actions de prévention ne font pas l'objet d'une méthode spécifique pour l'intervention sur les territoires, elles ne peuvent pas fonctionner.

Les projets de DSL sont très nombreux, concernant notamment les chartes des aînés, qui font l'objet d'un travail avec tous les acteurs concernés – élus, citoyens, associations, établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD), secteur médico-social –, pour définir un projet adapté pour un territoire donné.

On ne parlera jamais assez également des maisons d'accueil et de résidence pour l'autonomie (MARPA), qui sont aussi très ancrées sur les territoires, font l'objet d'un travail avec un ensemble de partenaires, et sont généralement localisées dans des centres bourgs, pour permettre aux résidents d'accéder à la pharmacie, au café, etc., mais sont également ouvertes aux différentes associations qui peuvent intervenir. Ces structures sont placées sous la responsabilité de maîtresses de maison, qui restent présentes en permanence.

Les « MARPA vie » sont dédiées aux adultes handicapés vieillissants. Une seule « MARPA école » existe en France, à mon grand regret, à Souvigny-de-Touraine, en Indre-et-Loire ; cette structure est construite à l'intérieur même d'une école.

La MSA développe également différents services, comme Bulle d'air, un service de répit à destination des aidants, les séjours Part'âge, organisés en partenariat avec les maisons familiales rurales (MFR), dans lesquels des étudiants en BTS, notamment dans le domaine des services à la personne, élaborent des projets avec des habitants pour permettre à des aidants ou à des personnes âgées de partir en vacances. Ensemble, ils créent des projets de départs en vacances de manière mutualisée.

Ces projets sont multiples, et s'adaptent à des contextes, à des territoires et à des partenaires divers. Tous les professionnels de la MSA, qu'il s'agisse de travailleurs sociaux ou de conseillères en économie sociale et familiale, sont formés à la méthode dite de développement social local ; cette méthode est unique et transposable, et comporte trois temps.

En premier lieu, un travail est mené avec un territoire – plusieurs communautés de communes, une communauté de communes, une commune –, pour analyser les besoins, identifier les ressources, les points forts, mais aussi les points de vigilance. En concertation avec les acteurs du territoire, ils définissent des orientations pour mettre en place un projet. Dans une deuxième phase d'appropriation du projet, un travail transversal est mené avec l'ensemble des acteurs, qui seront chargés de le mettre en œuvre. Cette démarche participative permet d'élaborer ensemble un ou plusieurs projets. La troisième phase est celle de l'action et de l'évaluation. Ces projets sont mis en œuvre par l'ensemble des partenaires, qui auront au préalable défini un plan d'action.

Le fondement de cette méthode est la pérennisation des actions sur le territoire par les acteurs locaux concernés, c'est-à-dire que les professionnels des MSA impulsent, accompagnent, aident les acteurs à identifier les projets les plus pertinents, puis se retirent, laissant les acteurs du territoire animer les projets dans le temps long. Cette méthode repose donc sur l'appropriation des projets par les acteurs locaux, et les forme ainsi à porter eux-mêmes les projets. Le travailleur social impulse, accompagne, puis se met en retrait. Cette méthode est très importante, car elle constitue véritablement le facteur de réussite et de pérennité des projets.

Je vous présente ici quelques photographies de la « MARPA » école, de l'initiative de la MSA Sud Aquitaine sur les « randos fauteuil », regroupant trois ou quatre EHPAD, pour des personnes en situation de handicap, mais également d'autres personnes des villages qui ne souffrent pas de handicap, afin qu'elles comprennent les difficultés associées aux déplacements en fauteuil roulant. La dernière illustration montre comment le service Bulle d'air est implanté en France, avec une première instauration par la MSA Alpes du Nord ; cette disposition vise à soulager les aidants des personnes avec des handicaps lourds.

Après ce premier volet sur les actions de prévention de la MSA, j'ai souhaité mettre en exergue dans cette mission tout ce que la MSA pouvait apporter au développement de l'accueil familial. Je salue ici Mme Mireille Robert, qui m'a accompagnée dans cette mission et a été très présente pendant les auditions.

Les difficultés de l'accueil familial tiennent au fait qu'il s'agit d'une solution alternative peu connue au maintien à domicile et à la prise en charge en établissement, sous‑développée en France, puisqu'il n'y a que 18 000 places et 10 000 accueillants. Des difficultés structurelles existent, dont le manque d'attractivité, et un problème de statut important, puisque les aidants familiaux ne peuvent pas percevoir d'allocation chômage ou d'indemnité journalière. Selon moi, l'accueil familial constitue un habitat alternatif domiciliaire, qu'il faut absolument développer.

Ses avantages ont trait au faible coût d'investissement nécessaire, au faible reste à charge et au fort potentiel à développer sur nos territoires. La MSA peut apporter son expérience, sachant qu'il existe déjà un dispositif, mis en œuvre par la MSA du Nord-Pas-de-Calais, appelé l'accueil à la ferme, créé avec le département et la chambre d'agriculture. Il s'agit de permettre à des exploitants de faire de l'accueil familial, en parallèle de leur activité ou lorsqu'ils l'arrêtent. Ce type de mesure n'est pas suffisamment développé sur le territoire.

J'ai demandé à la MSA de proposer un dispositif à l'Assemblée des départements de France (ADF), que j'ai auditionnée. Certains départements sont très intéressés par le développement de l'accueil familial, mais ne le mettent pas en œuvre pour diverses raisons ; la proposition d'un service par un opérateur tel que la MSA leur paraît pertinente.

L'idée serait de promouvoir le dispositif auprès du grand public par le réseau de la MSA, de soutenir l'accueil familial par la proposition d'un parcours d'accompagnement pour les accueillants et l'offre de solutions de répit, sachant que les outils existent déjà, mais aussi d'animer un réseau. L'exercice de l'accueil familial est souvent isolé, et la présence d'un animateur de territoire, ayant la connaissance des différents acteurs, permettrait d'éviter l'isolement des professionnels.

Cela reste une réflexion que j'ai soumise, et qu'il serait intéressant de développer.

Je ne serai pas plus longue, même si beaucoup pourrait encore être dit, et suis à l'écoute de vos questions. Je remercie encore les personnes ayant accepté de participer aux auditions.

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