Intervention de Dominique Bureau

Réunion du mercredi 19 mai 2021 à 16h00
Commission des affaires sociales

Dominique Bureau :

Je ne pourrai pas répondre précisément à de nombreuses questions.

Je donne d'abord quelques éléments sur le fonctionnement de l'Autorité de la statistique publique. L'Autorité a été créée en 2009 et nous en sommes à la troisième présidente. Notre système statistique français présente la particularité que la base du système est constituée d'une part de l'INSEE, une direction générale du ministère de l'économie, et, d'autre part, des systèmes statistiques ministériels (SSM). Cette organisation a été créée par la loi de 1951.

Ce système peut sembler un peu curieux du fait de la grande proximité du politique, puisque quatre chefs de SSM, dont celui de la DREES, sont des directeurs d'administrations centrales nommés selon les règles applicables aux directeurs d'administrations centrales. Pour autant, la France a dans ce cadre développé un système de qualité appuyé notamment sur les corps de statisticiens de l'INSEE et cette conviction est assez largement partagée en France. Certains soulignent qu'un bon système statistique doit d'abord être constitué de bons professionnels et à l'écoute des attentes des citoyens et du public en général ; c'est quand même la base.

Le dispositif européen a apporté une attention à la qualité, au fait de respecter des règles strictes de méthodologie... Le système français a donc innové en conservant la tradition d'un système statistique publique fondé sur le principe que le citoyen devait avoir confiance dans l'État et qu'il faut organiser l'État pour que l'on puisse avoir confiance en lui. Sans jeter le bébé avec l'eau du bain, nous avons essayé de tirer profit des exigences européennes tout en conservant les atouts du système français.

Il manquait toutefois une pièce maîtresse : un contrôle de l'indépendance. Un contrôle externe a donc été créé et la France est l'un des rares pays à avoir mis en place un contrôle externe par une autorité indépendante. Elle est très légère puisque constituée d'un président à temps partiel et d'un rapporteur mais elle permet d'avoir une bonne séparation des tâches.

Le système est finalement équilibré. La production statistique est réalisée par le système statistique public, c'est-à-dire l'INSEE et les services statistiques ministériels. La tendance actuelle, comme beaucoup de vos questions conduisent à le souligner, est le besoin de coordination. Le système statistique, comme toute l'administration, était un peu fragmenté et cloisonné. Le fait que le système statistique doit être coordonné est une des leçons de la crise, en particulier pour celles de vos questions sans réponse immédiate ; sur les jeunes par exemple, le système statistique de l'éducation nationale s'est impliqué.

La marque « statistique publique » doit être identifiée à l'égal de l'INSEE. Parfois, les gens croient que la source est l'INSEE et ne savent pas que c'est la statistique publique. C'est une bonne chose car cela prouve qu'ils ont la même confiance dans la qualité des données mais, fondamentalement, nous avons besoin de renforcer ce système. Le règlement européen assigne à l'INSEE la mission de coordonner le système statistique public. L'une des tâches de l'ASP ces dernières années a d'ailleurs été de mieux insérer les services statistiques ministériels dans leur ministère avec des décrets mais des décrets qui reconnaissent l'indépendance professionnelle et le rôle de coordination de la statistique publique. Je pense que cela sera précieux pour les années à venir.

Sur un sujet tel que la délinquance par exemple, nous n'avons pas pu faire cette année l'enquête sur la victimisation, qui est une enquête en face‑à‑face, car il faut être sûr que la personne qui répond est vraiment la personne enquêtée, en particulier pour la mesure des violences intrafamiliales. Curieusement, c'est au travers de l'enquête EpiCov que nous avons essayé de rattraper ce manque en insérant dans cette enquête des questions sur ce sujet. Nous avons donc tout intérêt à essayer de mieux coordonner et de mieux mailler le travail des différentes statistiques ministérielles sous l'égide de l'INSEE.

Le rôle de l'ASP est vraiment d'assurer un contrôle externe. Le rôle exécutif est confié à l'INSEE et aux SSM sous la coordination de l'INSEE. En revanche, à chaque incident, l'ASP peut rendre publics tous ses avis. Elle a une compétence assez large pour aller examiner tout ce qui pourrait constituer un incident ou une entorse au respect des différents principes. Elle est chargée à la fois de l'indépendance professionnelle et de la qualité. Elle fait par ailleurs chaque année un rapport adressé au Président de la République, aux présidents des deux assemblées... Finalement, le système français est donc bien équilibré.

L'une des questions posées en 2008 était de savoir s'il fallait regrouper le contrôle extérieur avec le CNIS, une instance d'orientation et d'écoute des attentes des différentes parties prenantes qui définit le programme de la statistique publique. Finalement, ce sont bien deux métiers assez différents. Le cadre institutionnel mis en place en France est intéressant car il oblige à un dialogue, l'ASP devant rendre son rapport annuel après avoir auditionné le directeur général de l'INSEE et le président du CNIS.

L'idée est donc d'avoir un cadre institutionnel balancé, assez similaire à celui qui existe au niveau européen, puisque l'équivalent de l'INSEE, Eurostat, est un coordonnateur de données – mais pas un producteur – et est accompagné par deux instances, d'une part le conseil consultatif européen pour la gouvernance statistique (ESGAB), lequel est l'équivalent de l'ASP, d'autre part le comité consultatif européen de la statistique (ESAC), qui est une instance de consultation en amont. L'organisation est donc la même avec l'exécutif, la consultation en amont pour définir les programmes d'enquête et le contrôle ex post.

Nous pensons que le système statistique progresse dans ce cadre institutionnel et la manière dont il s'est saisi des nouvelles données est plutôt exemplaire. Les statisticiens sont par exemple assez fiers de ce qu'ils ont réalisé sur les mouvements de population au moment du premier confinement. Il se trouve que l'INSEE développait alors des partenariats avec les opérateurs de téléphonie mobile pour savoir comment utiliser leurs données. Cela s'est révélé immédiatement utile puisque cela a permis d'observer les mouvements de population. De manière générale, nous pensons que le système est équilibré et qu'il faut surtout le conforter, notamment par la capacité de professionnels.

Cela ne signifie pas que certains points ne doivent pas être changés. Ainsi, la mission Bothorel avait étudié dans le passé le passage au big data. Nous pouvons aujourd'hui passer assez facilement au big data puisque les services statistiques ministériels peuvent avoir accès aux données du SMDS (switched multimegabit data services), par exemple. Nous avons aussi la possibilité d'obliger à répondre aux enquêtes. La loi sur le numérique a assuré la transition puisqu'elle permet de passer au dématérialisé pour consolider les enquêtes dont les données étaient obtenues antérieurement par des méthodes non dématérialisées.

Toutefois, nous n'avons pas imaginé que le système statistique soit en fait en évolution permanente. Assurer uniquement la consolidation de l'existant ne répond donc pas tout à fait au problème. L'attente du public augmente et il faudrait pouvoir étendre la possibilité de rendre obligatoires certaines enquêtes ou pérenniser des dispositifs liés au covid qui sont appelés à durer. Il faut finalement agir à la marge d'un système institutionnel qui, fondamentalement, fonctionne assez bien et est équilibré.

Depuis toujours, le principe de la statistique est que les données produites par la statistique publique sont accessibles à tous, aux ministres comme aux citoyens et aux citoyens comme aux ministres, exactement dans les mêmes conditions. Il n'existe pas d'accès privilégié, mis à part les embargos qui permettent aux ministres de ne pas être mis en difficulté par des journalistes qui les interrogeraient un matin à huit heures et cinq minutes sur un chiffre sorti à huit heures. Ces accès privilégiés sont explicites et sont limités.

La contrepartie au fait que nous obligeons les gens à répondre à certaines enquêtes est que nous leur garantissons le secret et le respect de la vie privée. Le système statistique français est donc fondé sur un bon équilibre et ne peut pas être un moyen de contourner des obligations fixées par la CNIL pour la confection de certains fichiers. Le double principe reste l'accès de tous à ce qui est produit par la statistique dans le respect de la protection de la vie privée, cette protection étant plutôt renforcée dans le cas des enquêtes INSEE.

Cela n'empêche pas que nous cherchions à renforcer l'accès pour la recherche. L'INSEE est impliqué dans l' open data gouvernemental et s'est doté d'un dispositif dénommé Centre d'accès sécurisé aux données, qui vise à favoriser l'accès des chercheurs aux données de l'INSEE. À l'inverse, lorsque se pose un enjeu de protection de données, cela passe forcément par le comité du secret, qui se réunit régulièrement de façon à concilier ces deux objectifs contradictoires d'accès aux données et de protection.

S'agissant des causes médicales de décès durant le covid, une mission d'inspection est en cours. Je ne pense pas que des erreurs se soient produites. Simplement, au début du covid, les résidents des EHPAD n'ont pas été testés et la déclaration a été faite sur le fondement des symptômes, avec sans doute en cas de comorbidités une certaine variabilité selon la personne signant le certificat de décès pour savoir si elle privilégiait le covid ou la comorbidité connue. L'objectif de la mission en cours sur les causes médicales de décès est de construire un dispositif permettant de répondre à ces questions.

Je pense que cela occupera les chercheurs pendant un certain temps car les questions qui se posent sont très compliquées. Il existe, en plus de la surmortalité du covid, des surmortalités induites par le fait que des personnes ne se sont pas soignées mais, a contrario, un certain nombre de décès ne se sont pas produits. Des recherches avec des modèles de simulation seront nécessaires pour préciser progressivement cette surmortalité et toutes ses facettes afin de parvenir à un bilan net vraiment détaillé tenant compte des différents phénomènes.

Le dispositif d'enregistrement statistique des causes de décès ne répond qu'avec dix‑huit mois de délai et pas du tout en temps réel. L'une des priorités d'un projet statistique est sans doute de remettre à niveau ce processus. En plus du certificat de décès, nous disposons d'autres sources ; des éléments sont notamment disponibles à la CNAM. Toutefois, le fait de disposer de beaucoup d'éléments partout ne permet pas de créer un système statistique sans une organisation qui étudie comment les champs se recouvrent.

La comparabilité des statistiques à l'échelon européen est un sujet récurrent. Malheureusement, il n'existe pas de définition européenne de ce qu'est un EHPAD par exemple et, même sur des sujets économiques comme celui des entrepreneurs individuels, la France et l'Allemagne n'ont pas exactement la même manière de comptabiliser la partie entreprise et la partie ménage de l'entrepreneur individuel. Procéder à cette normalisation est le travail d'Eurostat et c'est l'une des difficultés des comparaisons internationales. Le dispositif n'était pas en place antérieurement et, si ce type de pandémie s'inscrit à l'avenir dans une tendance, nous devrons nous doter d'outils pour faire des comparaisons. Je pense que ce sera le cas dans les mois qui viennent.

En ce qui concerne la collecte des recensements, le problème est que les enquêtes en face‑à‑face n'ont pas pu avoir lieu. Il n'était pas imaginable que les enquêteurs de la statistique publique soient à l'origine d'un cluster. La question se posait de savoir si une situation de crise justifie de s'affranchir des règles. Finalement, les évolutions des programmes statistiques ont été approuvées par le CNIS avec des procédures d'urgence qui préexistaient et nous avons donc pu actionner des leviers sans que ce soit simplement le directeur général de l'INSEE qui décide de supprimer la collecte de recensement de l'année 2020. Il faudrait que vous interrogiez plus précisément le directeur général de l'INSEE à ce sujet. Sur un an, l'INSEE peut faire des projections et croiser différentes informations pour disposer des données de recensement les plus nécessaires, même si ce sont des données provisoires, de façon à assurer la continuité des données.

La question des modifications de comportement sur le télétravail, les transports, etc. sera le sujet de travaux par le système statistique. Le rapport France, portrait social a essayé de donner une première synthèse des éléments collectés durant la crise mais beaucoup d'autres viendront. Verrons-nous un retour à la normale sur le télétravail ? Sans doute pas et les enjeux sont importants puisque tous ne sont pas égaux devant la possibilité de télétravailler. Cela aura aussi des conséquences sur le système de transports, sur les formes des villes...

Madame Pételle, vous avez cité la baisse des moyens de 12 %, la santé scolaire... Notre premier message est tout de même le besoin d'un projet plus construit pour la statistique sanitaire. Il faut que les besoins soient adaptés à ce projet mais je suis sûr que,lorsque nous remettrons par exemple à niveau le système sur les causes de décès, il faudra y mettre les moyens. L'ordre de marche de l'ASP n'est pas de venir en appui à des demandes budgétaires ; notre souci est que les projets soient pertinents, efficaces et que les moyens soient mis sur ces projets.

Le mandat du président de l'Autorité est de six ans et est non renouvelable. En six ans, nous n'avons jamais écrit qu'un SSM n'avait pas assez d'argent. Dans le cas de l'INSEE, nous avons plaidé voici quelques années pour qu'il ait un contrat d'objectifs et de moyens ; c'est le cas maintenant et tout le monde s'en félicite car cela permet une meilleure gestion mais nous n'avons pas écrit qu'il manquait structurellement d'argent. Le code de bonnes pratiques nous demande d'ailleurs à la fois de nous assurer que les moyens sont suffisants et que l'argent est utilisé efficacement.

Dans la gestion de crise, que la DREES soit au front et accompagne le ministère pour aider à la remontée des données était évidemment utile. L'arbitrage est souvent assez difficile pour savoir qui doit être intégré ou non à la cellule de crise. Il est délicat de trouver le partage optimal entre ceux qu'il faut protéger pour qu'ils fournissent de la statistique de qualité et ceux qui sont plus au four et au moulin. Le choix fait a été d'assurer d'abord l'appui nécessaire pour la gestion de crise mais nous voyons bien que, pour avoir de la statistique de qualité, il faut que certains aient le temps de se concentrer sur la production des chiffres et d'assurer la méthodologie.

CovidTracker a montré une grande agilité pour assurer une diffusion de chiffres correspondant très bien aux canons de la statistique, pour produire des chiffres interprétables dans lesquels les variations hebdomadaires sont bien corrigées. Pour avoir des projets qui fonctionnent, il faut que les responsabilités et les tâches soient bien affectées, que les gens puissent se concentrer sur leur tâche principale.

En tant qu'ancien président de l'ASP, je ferai passer le message des questions que vous posez sur la protection de l'enfance comme sujet de préoccupation particulière. Je pense que vous avez raison car la question de savoir comment les enfants sortiront de cette crise est un sujet très grave. Vous avez ainsi raison de dire qu'il faut développer les statistiques dans ce domaine.

Le problème des certificats de décès pose aussi la question des polypathologies. Pour faire de la bonne statistique sanitaire, il faut des personnes qui sachent produire de la bonne statistique, faire remonter les données des EHPAD et des mairies, mais aussi quelqu'un qui vérifie la cohérence du certificat de décès. C'est l'une des raisons qui avaient conduit à s'appuyer sur le CépiDc, notamment pour avoir des capacités en sémiologie. La statistique thématique nécessite à la fois des compétences de personnes qui connaissent ce qui est mesuré et de personnes qui appliqueront des méthodes statistiques aux données. Le dispositif doit conserver cet équilibre. Sans rendre plus administratif le certificat de décès, il faut toutefois qu'il fournisse une information exploitable. En ce qui concerne les données de mortalité, la normalisation internationale est assurée en grande partie par l'Organisation mondiale de la santé et pas seulement par Eurostat.

Une question importante a été posée sur l'utilisation des GAFA. Le service statistique a mis en place un data lab et essaie d'utiliser au mieux les nouvelles données. Toutefois, pour avoir des données qui permettent réellement d'éclairer la décision publique, il est important qu'elles soient sans biais, robustes dans ce qu'elles mesurent et comparables sans rupture de série. Or, les données provenant du numérique, même si elles sont intéressantes, sont souvent affectées de biais, en particulier parce qu'elles sont financées par la publicité.

C'est une question lancinante pour la statistique publique depuis des années. Même dématérialisées, les enquêtes sont chères ; la question se pose donc de se passer des enquêtes et d'utiliser plus directement les chiffres. Comme l'explique notre rapport, c'est ce que nous faisons et un projet a été conçu pour utiliser les données de caisse pour l'indice des prix. Malgré les espoirs que nous avons sur la possibilité d'éviter de grosses enquêtes en utilisant mieux les sources de données administratives au sens large, y compris celles des opérateurs, la mise en perspective avec l'augmentation des attentes des citoyens conduit tout de même à la conclusion que les différentes sources sont complémentaires plutôt que substituables. Nous ne pouvons pas lâcher la proie pour l'ombre et, pour avoir des données robustes qui renseignent vraiment sur les évolutions structurelles, il faut avoir mis en place l'instrumentation statistique nécessaire. Les données des GAFA permettent donc d'enrichir la statistique mais pas de se passer d'enquêtes qui restent irremplaçables.

En ce qui concerne les moyens humains et financiers, notre diagnostic est qu'il faut construire un projet. C'est aux responsables de l'exécutif de le construire et c'est eux que vous devrez auditionner pour savoir si le projet a avancé et connaître les directions prises. Selon les endroits, les besoins peuvent porter sur les moyens humains ou sur les moyens financiers. Les moyens financiers sont des moyens pour faire des enquêtes. Les moyens humains consistent à avoir des capacités statistiques. Nous avons besoin de moyens humains, c'est-à-dire de personnes compétentes en statistique. Malgré tout, certaines enquêtes sont faites avec des tours de table trop compliqués, ce qui rend malheureusement plus aléatoire leur fréquence.

En ce qui concerne les angles morts, la tendance jusqu'à présent a été d'utiliser au mieux les données facilement accessibles en espérant que, avec un peu d'astuce, nous parviendrions à construire un système. Nous avons par exemple labellisé les données de médicaments de la CNAM mais elles ne concernent que les médicaments qu'elle rembourse. Ces données ne tiennent compte ni de l'hôpital, ni des médicaments non remboursés. Nous pouvons essayer de compléter mais il faut à un moment s'assurer de la cohérence des données et leur fragmentation devient problématique.

Nous insistons donc vraiment sur cette idée de projet. Il existe beaucoup de données dans le système sanitaire français et dans le système social français mais elles sont trop fragmentées. Il faut créer une architecture et que quelqu'un pilote l'ensemble. Il ne faut pas simplement mieux bricoler mais aussi s'assurer des angles morts, par exemple les jeunes.

La prolifération des chiffres est réelle. Effectivement, nous ne devons pas seulement être bavards et avoir plein de chiffres. Par exemple, nous avons labellisé certains chiffres de Pôle emploi. A contrario, nous n'avons pas labellisé des données de gestion ou de suivi de plans d'action qui ne nous semblent pas avoir suffisamment de pérennité pour venir dans la statistique comme instrument d'éclairage.

Si nous mesurons deux objets différents, nous devons avoir deux séries différentes. Si nous mesurons un seul objet, plusieurs sources peuvent être utilisées mais le code de bonnes pratiques de la statistique insiste que pour les différentes sources soient comparées et réconciliées. Il existe suffisamment de raisons pour que les personnes soient submergées de chiffres et que les mauvais chiffres l'emportent sur les bons pour que nous évitions d'avoir trop de chiffres.

Nous avions par exemple, dans le passé, deux services qui produisaient des chiffres de l'emploi à partir des mêmes données mais selon deux méthodologies statistiques distinctes. Ils arrivaient à des résultats assez proches mais différents ce qui était totalement incompréhensible par le public. Nous y avons mis fin. Pour les chiffres du chômage, les chiffres de Pôle emploi et les chiffres de l'enquête INSEE/Bureau international du travail (BIT) sont complémentaires mais nous avons demandé à l'INSEE de réconcilier les chiffres et de vérifier que les personnes répondaient sur leur situation au chômage dans l'enquête BIT d'une façon conforme à leur enregistrement à Pôle emploi. Si ces chiffres diffèrent, c'est parce qu'ils ne mesurent pas la même chose. Il est donc important de coordonner les résultats pour disposer de statistiques et non pas de plein de chiffres.

Sur l'adaptation du cadre juridique, j'ai évoqué la pérennisation des données mais, pour moi, le premier problème est de bien faire fonctionner le système statistique dans le cadre institutionnel existant. Nous pouvons l'améliorer par le développement de la cartographie des risques pour nous poser par exemple la question de la résilience. Je ne pense pas que la mesure des causes de décès puisse se faire en temps réel mais j'espère que nous aurons ex post des analyses plus fines et des systèmes statistiques plus appropriés.

Madame Limon, je transmettrai à Fabrice Lenglart, chef du SSM, et à Jean-Luc Tavernier, directeur général de l'INSEE, votre question sur ce qui touche aux jeunes dans toutes les facettes : le sanitaire, la victimisation, le travail, l'éducation... C'est une question tout à fait actuelle et légitime que de savoir comment les jeunes sortiront de cette crise.

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