Avec 1 500 000 consommateurs réguliers de cannabis, la France figure sur le podium des pays les plus touchés par le cannabis en Europe. Parmi les jeunes, la tendance est identique : quasiment un jeune de dix-sept ans sur deux a déjà expérimenté le cannabis. Ce phénomène cristallise les contradictions de notre société, où de nombreux interdits coexistent avec de nombreuses attitudes de transgression.
Les travaux de la mission d'information, dont je suis vice-présidente, ont duré plusieurs mois. Ils ont confirmé le constat d'un manque de réalisme de l'État à ce sujet. Les forces de l'ordre et les pouvoirs publics en général ne cessent de dire la frustration provoquée par les résultats si peu satisfaisants d'une politique de prohibition très répressive et incapable d'approcher les objectifs affichés par les gouvernements successifs.
Aucune politique de prévention de santé publique de grande ampleur ne pourra voir le jour tant que nous n'accepterons pas de regarder la réalité en face. Le narco-banditisme et la souffrance sociale, dans les quartiers, se sont aggravés, sans qu'aucune des dispositions répressives en vigueur n'aide leurs habitants, qui peinent parfois à se réapproprier leur espace public, dont on peut dire qu'il est occupé. En tout état de cause, nous ne pouvons que déplorer l'attitude de M. le ministre de l'intérieur consistant à marteler, à l'approche des échéances électorales, des discours sécuritaires faisant fi de nos travaux et du constat d'échec que nous avions partagé.
La principale préconisation de nos travaux est de faire évoluer notre législation. Le projet de décret présenté par le Gouvernement visant à mettre notre droit en conformité avec l'arrêt du 19 novembre 2020 de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) est encore un raté : il ne permettra pas de développer une filière de chanvre de qualité, qui constituerait pourtant un bénéfice certain pour nos agriculteurs et nos entrepreneurs. Dans ma circonscription de l'Ardèche, plusieurs agriculteurs et entreprises travaillent à la structuration d'une filière respectueuse du travail agricole et de l'environnement ; ils ne demandent qu'à être accompagnés.
Qu'il s'agisse du cannabis thérapeutique, du CBD – dont la réglementation est appelée à évoluer – ou du cannabis récréatif, la France reste à la traîne. Nous le déplorons. J'aimerais interroger Mme et MM. les rapporteurs sur l'avenir de la filière à la lumière des décisions de justice précitées, d'une part, et, d'autre part, sur les préconisations de notre mission d'information en matière de prévention en santé à l'école. Les dégâts provoqués par la consommation de cannabis sur les adolescents nous inquiètent. Rappelons que l'objectif de nos propositions est de reprendre la main sur les problèmes soulevés par la consommation de cannabis, pas de l'encourager.
Notre groupe est très favorable à la publication de ce rapport d'information et à des avancées de la législation. Je me joins aux remerciements adressés par notre président à ceux ayant contribué à ce travail, qui nous a vivement intéressés. Il propose des pistes nouvelles, qu'il faudra saisir au bond pour avancer sur cette question importante.