Je voudrais dans un premier temps rappeler le cadre en vigueur et, en tout premier lieu, le contexte de création de ces SCMR. Nous considérons que le dispositif des SCMR est directement ancré dans la politique de réduction des risques liés à l'usage de drogues, lancée dans les années 1980 en réaction à l'épidémie de sida.
Dans ce contexte, et bien que l'objectif de la réduction des risques n'ait été gravé dans le marbre de la loi qu'en 2004, la France a progressivement et tardivement autorisé la vente libre de matériels stériles, y compris des seringues, puis leur distribution par des associations, ainsi que la mise à disposition de traitements de substitution aux opiacés.
Les salles de consommation s'inscrivent pleinement dans cette démarche de réduction des risques. Elles ne peuvent se comprendre et se concevoir que dans le cadre d'un dispositif plus global et dans une logique de parcours de soin du patient, devant être un parcours tant médical que social.
Depuis 1986 et la création de la première salle de ce type à Berne en Suisse, douze pays ont expérimenté une SCMR. La France est le dixième pays à avoir fait ce choix. Au total, plus de 130 salles existent aujourd'hui dans le monde, en Europe, au Canada et en Australie. Trois pays en particulier concentrent de tels dispositifs : les Pays-Bas, l'Allemagne et la Suisse. De nombreuses études ont accompagné la mise en place de ces centres étrangers, concluant à un bilan positif de ces dispositifs du point de vue de la santé publique.
Je souhaite à présent rappeler l'expérimentation votée par le législateur et prévue en 2016. La genèse de l'expérimentation prévue par la loi de 2016 remonte en réalité à 2012, car l'expérimentation d'une SCMR était prévue par le plan gouvernemental de lutte contre les drogues et les conduites addictives pour 2013-2017 — la ville de Paris s'étant préalablement déclarée candidate pour porter un tel projet.
En octobre 2013, alors que le projet parisien était prêt à être mis en œuvre par voie réglementaire, le Conseil d'État a rendu un avis rappelant la nécessité d'une mesure législative pour autoriser cette expérimentation, au vu de l'interdiction pénale de consommation de drogues telle qu'établie par la loi de 1970. C'est donc avec la loi du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé que cette expérimentation a finalement vu le jour.
Je voudrais à présent mentionner le droit en vigueur pour cette expérimentation. L'article 43 de cette loi de janvier 2016 dispose qu'à titre expérimental, des centres d'accueil et d'accompagnement à la réduction des risques pour usagers de drogues (CAARUD) peuvent ouvrir des SCMR dans des locaux distincts de ceux utilisés dans le cadre de leurs missions de droit commun.
Ces CAARUD doivent être désignés par arrêté du ministre chargé de la santé, en concertation avec le maire de la commune (ou le maire d'arrondissement le cas échéant) et après avis du directeur général de l'agence régionale de santé (ARS).
Mentionnons également que la responsabilité pénale des usagers comme des intervenants a été aménagée par la loi afin de permettre le fonctionnement de ces salles. Une immunité pénale est ainsi prévue pour les usagers des SCMR, limitée aux faits d'usage et de détention pour usage commis dans l'enceinte des salles. Parallèlement, aux abords de la structure, seules les personnes fréquentant les salles de consommation et pouvant le prouver peuvent bénéficier, non d'une extension d'immunité pénale, mais d'une politique pénale adaptée tenant compte de l'objectif de réduction des risques poursuivi. Ainsi, seul le transport d'une quantité de produit destinée à une consommation personnelle par un usager se rendant à la SCMR peut être admis aux abords immédiats de la salle. Dans ce périmètre, défini par les procureurs de la République concernés, la poursuite des personnes se rendant à la salle peut être considérée comme inopportune.
Pour les intervenants, la loi prévoit également une immunité pénale, limitée aux faits de complicité d'usage illicite et de facilitation de l'usage illicite de stupéfiants.
Un cahier des charges a été défini par voie réglementaire à la suite de la loi. Il fixe notamment les missions de ces salles, leurs conditions de fonctionnement, la composition de l'équipe pluridisciplinaire, les produits autorisés ainsi que le protocole à suivre. Ce cahier des charges prévoit notamment que l'usager doit énoncer et montrer à l'intervenant au moment de l'accueil le produit qu'il souhaite consommer, afin d'éviter qu'il n'entre dans la SCMR sans substance et incite au partage des produits. Une seule session de consommation (injection ou inhalation ou consommation par voie nasale) est autorisée par passage. Surtout, ce cahier des charges rappelle que les intervenants ne peuvent procéder eux-mêmes aux gestes de l'injection. Il précise également les partenariats et conventionnements (avec le SAMU, les urgences, les structures sociales et médico-sociales, etc.) qui doivent être formalisés. Enfin, il prévoit qu'un comité de pilotage local doit être institué pour chacune de ces salles.
Dans le cas d'espèce, les collectivités territoriales ont pris en charge les dépenses d'investissement liées à la mise en place des SCMR. En revanche, leurs dépenses de fonctionnement sont à la charge de l'assurance maladie, par le biais de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM) médico-social dit « spécifique » qui finance les structures médico-sociales d'addictologie.