La loi de septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel complète et modifie très largement un arsenal législatif reposant en particulier sur les lois de juin 2011 et de mars 2014, avec la volonté de faire de l'apprentissage, et plus généralement de l'alternance, une voie d'excellence et de qualification.
La réforme de 2018 a considérablement modifié les compétences et les flux financiers en replaçant les branches et les entreprises au centre du dispositif, au détriment des régions.
Par ailleurs, les aides aux entreprises pour l'embauche des apprentis ont largement contribué à son succès ces deux dernières années, et il faudra étudier l'impact de l'arrêt ou de la diminution des aides sur l'évolution du nombre d'apprentis à l'issue de la crise que nous traversons.
Les résultats quantitatifs sont indéniables : 525 600 apprentis en 2020, 660 911 en 2021 et un doublement du nombre de centres de formation d'apprentis (CFA) depuis l'entrée en vigueur de la réforme, avec la création de soixante CFA d'entreprise.
Au plan qualitatif, on note une très forte augmentation du nombre d'apprentis post‑bac et un léger tassement des pré‑bac. S'il est intéressant de développer les formations post‑bac, il ne faut pas négliger les formations infra‑bac, qui permettent d'accéder rapidement à l'emploi et d'ouvrir des perspectives de carrière.
La loi de 2018 avait aussi comme objectif la simplification des démarches administratives. Il reste ainsi à harmoniser les systèmes d'information et les pratiques des OPCO, en particulier en ce qui concerne les retours de dossiers et les retards de paiement.
L'application du coût‑contrat semble répondre aux équilibres financiers des CFA. Cependant, son évolution doit être progressive et pluriannuelle : il doit y avoir une visibilité des CFA sur une période plus longue.
Une autre proposition vise à permettre aux CFA d'utiliser leurs réserves à des fins d'investissement. De même, permettre aux régions la fongibilité des fonds d'investissement et de fonctionnement leur donnerait une capacité à agir en proximité et selon les besoins du territoire.
Concernant l'apprentissage à l'étranger et la mobilité internationale, le dispositif Erasmus + est un excellent dispositif qui a montré tout son intérêt. Cependant, si les chiffres sont en baisse, en raison de la pandémie, il reste un frein à lever : celui de l'autorisation de la mise à disposition limitée à quatre semaines. Nous proposons une prolongation de cette période de détachement.
Par ailleurs, les prépas‑apprentissages sont une réussite au niveau quantitatif et qualitatif.
Enfin, je souhaite évoquer l'architecture institutionnelle et financière du nouveau dispositif, et en particulier de France compétences. Si la création d'un nouvel opérateur unique était une idée louable tant elle était nécessaire – nous l'avions indiqué avec Jean‑Patrick Gille dans notre rapport de 2016 –, sa gouvernance reste contestée en raison d'un quadripartisme qui semble déséquilibré. Néanmoins, malgré un contexte difficile et une mise en place complexe, je dois souligner la pugnacité de tous, et en particulier celle du directeur général, en vue de déployer, avec des moyens humains limités, l'action de France compétences.
Si son pilotage financier est clarifié, sa situation financière reste largement déficitaire, environ 7 milliards d'euros cumulés, avant un abondement budgétaire de 2,7 milliards d'euros. Plusieurs raisons à cela : la crise certes, mais aussi la dynamique de l'alternance principalement et une utilisation croissante du CPF. C'est la raison pour laquelle nous proposons de mieux moduler les financements de l'apprentissage. À titre d'exemple, on peut s'interroger sur le financement de l'apprentissage dans l'enseignement supérieur.
En conclusion, les résultats de cette réforme qui a bousculé le monde de l'apprentissage sont globalement positifs mais ils nécessitent des ajustements. Nous formulons donc, avec Catherine Fabre, quatorze propositions dans le rapport.