Intervention de Jean-Louis Touraine

Réunion du mardi 8 février 2022 à 17h20
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Louis Touraine :

Je reviens sur la question des déserts médicaux qui est prioritaire aujourd'hui. Ce problème se pose maintenant non seulement dans les zones rurales mais aussi dans les zones urbaines. Malgré tous les efforts développés – qui sont importants – dans Ma santé 2022 et dans la loi d'organisation et de transformation du système de santé, malgré les différentes mesures prises, notamment le contrat d'engagement de service public et son extension, le dispositif de médecin adjoint…, malgré l'augmentation du nombre de formations d'étudiants, les résultats ne sont malheureusement pas à la hauteur des besoins.

La Cour des comptes a estimé que les mesures incitatives à l'installation, encore assez peu évaluées, ont finalement démontré une relative inefficacité et je voudrais savoir ce que vous en pensez. Quel premier bilan pouvez-vous tirer de ces mesures incitatives ?

Pour aller plus loin, j'ai récemment rencontré des étudiants en médecine qui m'ont décrit des dispositifs d'incitation trop nombreux, dissuasifs, trop complexes, qui devraient gagner en visibilité. Tous ceux que j'ai rencontrés m'ont dit que, de ce fait, ils n'avaient pas opté pour l'un ou l'autre de ces dispositifs, même si cela aurait pu être utile pour eux. Cela ne les attire pas.

Je voudrais donc savoir s'il est possible d'envisager de simplifier le processus et de développer, plutôt que des systèmes qui s'ajoutent les uns aux autres, ce que les étudiants eux-mêmes demandent, c'est-à-dire un accompagnement sur mesure des étudiants et des médecins, avec bien évidemment des stages dans les territoires sous‑dotés.

Enfin, puisque ces incitations montrent leurs limites, ne pourrions-nous pas dès maintenant envisager une autre modalité, consistant par exemple en des financements diversement apportés aux professionnels en fonction des zones ? Nous pourrions par exemple laisser la consultation à 25 euros pour les médecins libéraux qui s'installent dans des territoires sur-dotés, la fixer à 30 euros pour ceux qui vont s'installer dans des territoires sous-dotés et prévoir un niveau intermédiaire de 28 euros dans les territoires intermédiaires. Je pense que ce serait un système simple, qui constituerait une incitation financière directement au niveau de l'exercice médical. Combiné avec un complément de stages dans les territoires opportuns, avec plus d'accueil par des maîtres de stage, cela pourrait permettre une meilleure répartition sur le territoire.

En ce qui concerne les praticiens hospitaliers, ne serait-il pas également envisageable de moduler les salaires pour favoriser les lieux les plus en déficit, les hôpitaux en grande souffrance avec des taux de postes vacants qui dépassent largement 30 % à certains endroits ? Nous pourrions aussi favoriser les spécialités les plus en tension puisque, lorsqu'un hôpital ou un établissement privé a plusieurs chirurgiens mais pas d'anesthésiste, il est évidemment incité à adopter ces mauvaises solutions d'intérimaires.

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