Intervention de Jean-Noël de Galzain

Réunion du jeudi 11 février 2021 à 11h00
Mission d'information sur le thème « bâtir et promouvoir une souveraineté numérique nationale et européenne »

Jean-Noël de Galzain, président d'HEXATRUST :

Il règne tout de même une grosse hypocrisie sur les questions de prix et de compétitivité. En effet, sans le niveau d'imposition existant en France pour les entreprises, notamment pour les PME, sans certaines contraintes en matière de réglementations et d'obligations, sans le niveau administratif et l'ensemble des prestations sociales prises en compte dans le calcul d'un prix en France, alors nous sommes effectivement plus compétitifs. Les prix doivent être regardés à la lumière de ce qu'ils incluent. Nous ne pouvons pas continuer à admettre une telle distorsion de concurrence, avec des entreprises qui ne paient pas d'impôts, qui vendent sans TVA ou avec une TVA réduite, et qui ne respectent aucune des réglementations qui leur sont imposées, lorsqu'elles ont une entreprise basée en France. Évidemment, certains acteurs industriels globaux arrivent à utiliser ces mécanismes d'optimisation et échappent ainsi aux réglementations des États. Or les PME, start-up et ETI n'ont aucun moyen d'y échapper. Avez-vous envie d'un monde dans lequel règne l'individualisation des profits au détriment de la collectivité ? Je n'en suis pas certain. Je suis plutôt pour un numérique éthique et durable, dans lequel nous respectons les meilleurs aspects de notre modèle de société.

Concernant votre question même, je crois que nous sommes dans un état d'urgence. Les monopoles empêchent nos entreprises de se développer et de se battre à armes égales. Dans cette période de pandémie, où nous devons construire à toute vitesse un environnement numérique fiable, avec des systèmes numériques qui protègent les données et garantissent toutes ces règles, nous sommes dans un moment d'exception. Après l'urgence sanitaire, nous entrons dans une urgence numérique.

Dans ce climat d'urgence numérique, faut-il appliquer le principe de précaution ? Ou plutôt, pourquoi ne pas appliquer le principe de précaution au numérique ? Par conséquent, il convient de se demander si nous devons gagner 1 %, 2 % ou 5 % de fonctionnalités au détriment de toutes les règles de protection des données, de protection de la vie privée et de protection contre les risques liés à l'utilisation de ces données dans des intelligences artificielles qui ne seront pas les nôtres, qui ne respecteront pas nos us culturels, et qui utiliseront du temps de notre vie dans le futur.

Il est important d'introduire des critères de souveraineté dans nos achats. Nous sommes en effet dans une phase de reconstruction. Il est urgent de le faire, parce que c'est la condition sine qua non pour créer un marché européen digne de ce nom. Par ailleurs, en voyageant dans différents pays, avant la pandémie, je me suis rendu compte que certains d'entre eux pratiquaient, dans leurs achats, une primauté des solutions locales. En particulier, lorsque l'argent public est concerné, l'existence de contreparties est vérifiée en matière d'emploi local et de respect des productions locales. Il s'agit de s'assurer que les règles du pays en question sont respectées. Je l'ai vu dans différents territoires, notamment en Asie, en Russie et même aux États-Unis, où il existe une telle primauté sur certains marchés.

Ainsi, pour le cloud gouvernemental américain, des appels d'offres géants ont été lancés. Les acteurs reconnus ont été exclusivement les grands acteurs du cloud américain. Personne n'a cillé sur le sujet. Aujourd'hui, il faut être conscient de notre responsabilité et faire en sorte d'introduire plus de souveraineté dans nos achats.

Ensuite, les clouds sont capables d'être compétitifs, y compris quand il s'agit de clouds souverains. Pour bien connaître les personnes d'OVH, d'Outscale ou d'autres organisations de cette nature, je sais qu'elles sont capables d'apporter, dans des temps très courts, si l'investissement est présent, des solutions compétitives pour nos organisations. Il faut placer aujourd'hui la souveraineté dans les critères d'achat et dans des clauses administratives générales.

Pour étendre le sujet à la sphère privée, les notions de responsabilité numérique environnementale ou de responsabilité sociétale et environnementale nous incitent à utiliser un numérique soutenable, à moyen et à long terme, lorsque nous achetons des ressources numériques.

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