Intervention de Stéphanie Combes

Réunion du jeudi 18 février 2021 à 9h30
Mission d'information sur le thème « bâtir et promouvoir une souveraineté numérique nationale et européenne »

Stéphanie Combes, directrice du groupement d'intérêt public Plateforme nationale d'accès aux données de santé (Health Data Hub) :

Mener des projets et produire des résultats de recherche concrets va donner du sens à notre démarche. La critique adressée au Health Data Hub s'agissant de Microsoft intéresse l'écosystème du numérique français et les acteurs nourrissant des craintes sur la protection des données – ils peuvent être rassurés par les avis apportés par les autorités prescriptrices. Les gens comprendront pourquoi nous avons mis en place le Health Data Hub quand nous pourrons mettre en avant des résultats de recherche convaincants et concrets.

Les enjeux numériques, aujourd'hui extrêmement passionnels et mal compris, doivent être mis au second plan par rapport aux finalités que les plateformes poursuivent. Il en va exactement de même pour StopCovid : les gens se sont d'abord interrogés sur la manière dont cette application traiterait leurs données personnelles. Mais il faut surtout et avant tout se demander à quoi sert cette application. Nous devons, nous, tous les acteurs du numérique, travailler à rendre l'usage final très clair.

Nous continuerons donc à travailler sur le chantier de l'infrastructure et à produire des résultats. Un écosystème très enthousiaste nous suit, et regrette que notre développement soit trop lent ; nous recevons énormément de réponses à nos appels à projets ; nous enregistrons une très forte participation à nos événements fédérateurs comme le colloque, le data challenge, la winter school.

La vraie difficulté du Health Data Hub pour les prochaines années est ailleurs. Nous sommes face à un problème culturel de réflexe en ce qui concerne les données de santé. Les données de santé n'appartiennent à personne et personne ne le sait. Certains écosystèmes de santé et établissements pensent que les données leur appartiennent parce qu'ils ont fait l'effort de collecte et qu'ils ont soigné les patients. Les acteurs ne savent pas quand ils ont le droit ou non de traiter les données. Cela est extrêmement complexe et constitue un vrai frein à l'innovation en santé. Ainsi, certaines personnes ne respectent pas le cadre applicable et certaines autres personnes sont frileuses, car elles ne maîtrisent pas le cadre. Si nous ne cassons pas cette spirale, le Health Data Hub sera un prestataire d'outils de data science pour quelques projets et nous passerons à côté de l'ambition du dispositif.

Nous avons donc besoin d'un écosystème institutionnel autour de la donnée de santé, avec une politique nationale et des financements dédiés. Je citerai l'exemple de la UK Bio Bank, une base de donnée anglaise reconnue au niveau international et dont les données sont utilisables par tous. Les contributeurs à cette base n'ont aucun réflexe de propriétaire. Pourquoi ? Le financement de cette base est pérenne et ne dépend pas des publications des acteurs qui sont à l'origine de la base. Ainsi, n'émergent pas chez les acteurs des comportements pervers qui impliquent de réserver les données pour eux-mêmes car ils ont besoin des financements associés aux données. Le Plan national pour la science ouverte est porté au plus haut niveau par le ministère de la recherche, mais il doit être associé à des dispositifs incitatifs : il n'est pas concevable, pour les chercheurs, d'ouvrir la science mais d'encore devoir lutter pour trouver des financements. Le hub peut porter mais ne peut pas être maître d'œuvre de cette politique de la science ouverte et de la santé – cela n'est pas notre rôle. À titre d'exemple, le Ségur du numérique ne prévoit pas d'enveloppe pour les données de santé de recherche – et ce, même à l'issue d'une crise sanitaire.

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