Intervention de Olivier Micheli

Réunion du jeudi 4 mars 2021 à 14h00
Mission d'information sur le thème « bâtir et promouvoir une souveraineté numérique nationale et européenne »

Olivier Micheli, président de DATA4 :

La première raison pour laquelle les grandes villes comme Paris, Francfort, Londres, Amsterdam, etc. rassemblent de nombreux data centers est qu'elles constituent des hubs majeurs où tout converge, et notamment les réseaux de télécommunications. Il est tout à fait logique, en effet, que les data centers se développent là où sont situés les grands « nœuds » Internet : à Madrid, Milan, Paris, Francfort, etc. Il est possible sur une carte de voir physiquement tous les réseaux de télécommunications converger dans ces villes. Toutes les données y arrivent, et sont donc ensuite stockées dans des data centers.

La deuxième raison est économique. Les sièges sociaux des grandes sociétés françaises sont situés à Paris. Chaque région ou grande métropole en France accueille une grande société, mais Paris en concentre un nombre considérable. De très nombreuses équipes informatiques y sont donc également situées, et elles souhaitent que leurs équipements informatiques soient à proximité, afin qu'elles puissent y intervenir. Même si nous pouvons réaliser de nombreux gestes de proximité pour nos clients, eux-mêmes interviennent également sur site. Or, une société dont le siège social est situé à la Défense ou à Vélizy interviendra beaucoup plus rapidement sur un data center parisien que sur un data center situé dans la Creuse, à Lyon ou à Marseille, etc.

Vous avez parfaitement raison par ailleurs d'évoquer la question des compétences. Notre secteur est confronté à une réelle pénurie de compétences. D'ici 2025, cette pénurie est estimée dans le monde à près de 500 000 salariés spécialisés dans les data centers. Or, c'est à Paris que le plus grand nombre de personnes formées, compétentes et qualifiées (ingénieurs, techniciens, etc.) se trouvent. Ce n'est pas nécessairement là qu'elles sont les plus qualifiées, mais c'est là qu'elles sont les plus nombreuses.

Néanmoins, je crois beaucoup au développement des data centers en région. Ils n'atteindront certes pas la taille des « méga data centers », de plusieurs milliers de mètres carrés, que l'on trouve dans les grands hubs. Toutefois, pourquoi faire remonter les données de Lyon à Paris avant de les faire redescendre à Lyon, ou de Bordeaux à Paris avant de les faire redescendre à Bordeaux, etc. ? Les grandes villes françaises auront ainsi de plus en plus besoin de disposer de leurs propres data centers, de taille plus modeste, mais quand même importante, pour répondre aux besoins de leurs entreprises régionales, mais aussi aux besoins des villes et des territoires intelligents. En effet, tout se numérise : les entreprises, mais aussi les villes et les services, qui sont de plus en plus accessibles par l'intermédiaire de plateformes numériques. Et plutôt que d'être renvoyées vers de grands hubs comme Paris, les données afférentes devront être traitées localement, ne serait-ce que pour des raisons techniques de latence. Pour certaines applications (par exemple celles destinées aux voitures autonomes), le temps de latence entre l'émetteur et le récepteur doit ainsi être le plus court possible. Une distance de 400 kilomètres peut avoir un impact à cet égard. Si tout est traité au niveau de la ville même, le temps de latence sera réduit et la qualité du service encore améliorée.

Je suis plus dubitatif, en revanche, concernant la possibilité d'implanter des data centers dans des régions plus reculées comme la Creuse ou la Corrèze, etc. Je ne saurais toutefois me prononcer sur l'avenir au-delà de 2030. D'ici là, je prévois le développement de méga data centers dans les grands hubs, mais aussi de data centers de taille plus raisonnable dans les grandes villes et métropoles françaises.

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