Nous avons effectivement des personnes extrêmement créatives en France, capables d'apporter des activités nouvelles, de créer des pépites. C'est incontestable. Souvent, ces personnes arrivent à démarrer une activité, y compris à faire financer un premier stade de croissance de leur activité mais, dès qu'elles atteignent une certaine taille, elles n'arrivent plus à trouver matière à se développer suffisamment. Elles se heurtent à quantité d'obstacles.
Très franchement, le code des marchés publics ou la directive 2014-25 relative à la passation des marchés par des entités opérant dans les secteurs de l'eau, de l'énergie, des transports et services postaux induisent des manières d'acheter qui passent par des procédures longues, souvent pas très cohérentes avec la durée de vie de ces entreprises et la nécessité de trouver des marchés assez rapidement. Lorsqu'un marché est passé, ces entreprises deviennent extrêmement dépendantes d'un client, avec parfois des marchés trop gros pour elles. Cette mécanique est peu adaptée en matière d'achats, pour les aider à grandir à un rythme qui leur convienne, avec des niveaux de marché qui leur conviennent.
Elles ont donc du mal à placer leur offre et, de plus, lorsqu'elles veulent se développer et rechercher des marchés à l'international, elles ont beaucoup de mal, au-dessus d'une certaine taille, à lever ces capitaux à cet effet. C'est la raison pour laquelle elles recherchent des financeurs. Il existe dans le monde des entreprises qui « scannent » partout les personnes créant des activités innovantes et elles viennent les racheter ou leur proposer de les racheter.
C'est une difficulté pour nous, si nous nourrissons nos pépites pour qu'elles partent trop rapidement, sans que nous ayons le retour sur investissement pour la collectivité.
Certains pays ont une stratégie consistant à faire grossir les start-up pour qu'elles se revendent, y compris aux Américains ou autres. C'est le cas d'Israël. Toutefois, ils ne le font que lorsque les entreprises ont atteint une taille suffisante, sont au moins des licornes, de sorte que leur valorisation soit suffisante pour rapporter à l'économie du pays qui les a soutenues pendant la phase de croissance. Ils font en sorte que ces entreprises puissent grossir jusqu'au stade de la licorne. Nous avons visiblement un problème de ce côté.
Nous voyons des gens brillants, qui travaillent parfois à l'Agence nationale de sécurité des systèmes d'information (ANSSI) ou chez nous, dans nos propres entreprises, aller créer des spin-off de leur activité, créer une activité utile pour tout le monde. Ils arrivent à la faire grossir un peu et sont rachetés par d'autres. C'est un problème majeur si nous voulons donner à notre pays, et plus généralement à l'Europe, plus de force dans le monde du numérique.
C'est notre analyse en tant que clients. Ce n'est pas le résultat d'un rapport.