Intervention de Fabrice Brégier

Réunion du jeudi 25 mars 2021 à 14h00
Mission d'information sur le thème « bâtir et promouvoir une souveraineté numérique nationale et européenne »

Fabrice Brégier, président de Palantir France :

La souveraineté, c'est bâtir cet ensemble de règles, ce n'est pas être opposé à toute évolution technologique, et je sais que vous ne l'êtes pas. C'est utiliser le meilleur de ces technologies, sans lesquelles la France sera définitivement dépassée, c'est une certitude, au plan militaire, de la réforme de l'État, de son efficacité et de la performance de ses entreprises. C'est aussi en définir les règles pour qu'elles soient compatibles avec nos règles d'éthique, pour qu'il y ait un espace de confiance, pour que cela puisse être bâti dans une architecture de souveraineté, avec des supra-acteurs complètement souverains. C'est aussi stimuler un écosystème créateur de valeur pour la France.

La définition pourrait être autre, et j'ai parfois l'impression que c'est le cas. Votre question me le fait penser. Si pour vous, la souveraineté, c'est utiliser des solutions françaises, nous aurons des soucis, et je ne parle même pas de Palantir, je parle des GAFA, pour pouvoir les rattraper et faire en sorte que chaque Français puisse utiliser des logiciels purement français. Là, vous êtes soumis au lobbying des grands groupes franco-français. Ce lobbying est très simple : il consiste à dire que la souveraineté est un point tellement important qu'elle doit être pilotée par des acteurs français. Je pense que c'est une mauvaise définition. La souveraineté est très importante, vous en définissez le cadre. Il est évidemment nécessaire de faire en sorte que des acteurs français émergent, que des start-up se développent au plan national, qu'elles soient soutenues. Peut-être, dans certains domaines sensibles, faut-il seulement des acteurs français compte tenu de cette sensibilité, mais la souveraineté, ce n'est pas faire le lit des lobbyistes des grands groupes français, dont je faisais partie il y a peu de temps.

Je n'ai pas d'acteurs de lobbying chez Palantir. En ayant rejoint Palantir France, je pense que je contribue à la performance de mes clients, à ce que les clients commerciaux jouent d'égal à égal avec leurs grands rivaux. J'ai contribué à ce qu'Airbus, en s'appuyant sur Palantir, pourtant société américaine, relègue Boeing au second plan sur le digital. Demandez aux acteurs du monde de l'aéronautique ce qu'ils en pensent. Il y a cinq ans, Boeing était pourtant très en avance sur Airbus. L'avons-nous fait la « fleur au fusil » ? Non. Nous avons audité cette société, nous avons regardé sa façon de travailler. Dans ce cas spécifique, puisqu'il n'y avait que deux acteurs au plan mondial, nous avons demandé à Palantir d'exclure Boeing de ses clients potentiels. Le résultat est manifeste et démontre que cette association a permis à Airbus de gagner non seulement en performance, mais aussi en relation avec ses clients.

Cette souveraineté peut aussi être au service de l'État. Quand j'aide indirectement un État comme la France à lutter contre le terrorisme, je pense que c'est un acte souverain, que la nationalité du logiciel n'a aucun intérêt et que dans le cas où un logiciel français arriverait à réaliser cette performance pour d'autres raisons, il serait possible de nous remplacer. Nos solutions sont réversibles.

S'agissant de GAIA-X, je l'ai dit, nous ne sommes pas un acteur du cloud. Nous sommes en relation avec ces sociétés du cloud. Nous travaillons avec Amazon, Azure, Google, avec des systèmes propriétaires auprès de nombreux clients gouvernementaux. Nous ne souhaitons pas définir notre propre politique, mais partager notre expérience parce que notre intérêt est que l'Europe se dote de règles claires pour avoir des clouds dits souverains.

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