Les technologies blockchains sont un ensemble très vaste de technologies, avec des caractéristiques de décentralisation des règles de protocole qui peuvent être très différentes d'une blockchain à l'autre. Cependant, il existe des caractéristiques communes et intéressantes, notamment quant à la souveraineté numérique : la transparence, la traçabilité, l'auditabilité, qui est un aspect souvent méconnu et mal interprété de ce que sont les blockchains et les transactions sur crypto-actifs. Il est très facile de retracer les parcours des crypto-actifs sur les blockchains et d'arriver à auditer facilement ces transactions. L'automatisation par les smart contracts permet aussi, de façon très intéressante, de conditionner ce que peuvent être ces transferts dans le cas de politiques liées à des cas d'usage, mais aussi dans le cas d'une réglementation, ce qui apporte une sécurité juridique supplémentaire, grâce à la technologie.
La technologie – la façon dont sont réalisés les transferts et les transactions, la possibilité de pouvoir fractionner les actifs – apporte une certaine liquidité. Le fait que l'accès à ces actifs soit également facilité par la technologie apporte une profondeur de marché à ces crypto-actifs, qui peut parfois manquer pour certains instruments, dans le monde financier traditionnel.
L'industrie française s'est déjà très bien saisie de ces caractéristiques pour essayer de développer des cas d'usage des entreprises. Aujourd'hui, l'écosystème français des crypto-actifs se compose de 150 à 200 entreprises spécialisées dans ce domaine. Notre association compte une soixantaine de membres actifs, dont l'activité principale est liée aux crypto-actifs, tandis que d'autres membres s'y intéressent de façon périphérique. Ces soixante membres actifs représentent environ un tiers de l'écosystème global. Leur relative jeunesse et leurs effectifs relativement réduits constituent la caractéristique commune aux entreprises dont l'activité principale est liée aux start-up – on parle plus souvent de TPE, et un peu de PME. Cet écosystème est donc en maturation.
Si je dois donner quelques exemples de membres de l'ADAN et des activités que représente l'écosystème des crypto-actifs en France, ce sont bien sûr des conservateurs, des plateformes d'échange, des fournisseurs de liquidités pour ces plateformes, sur l'aspect plutôt financier, en soutien technologique des fournisseurs de solutions technologiques, d'informations, mais aussi de services de ménage que l'on voit se développer, et des produits basés sur la blockchain, mais pas nécessairement financiers, comme le transfert de capacités de calcul et de stockage grâce à la blockchain.
Nous représentons cette industrie assez hétérogène. Si l'on doit la comparer avec l'industrie américaine, nous sommes en retard de quelques cycles de marché, ce qui s'explique principalement par le fait qu'en termes de financement, il existe une énorme différence entre ce qui se passe aux États-Unis, avec une structure de financement largement occupée par les marchés, et ce qui se passe en France et en Europe, où le financement bancaire prévaut. Finalement, ce financement est beaucoup plus important dans l'industrie blockchain et crypto-actifs qu'il ne l'est en Europe, ce qui a permis le développement plus rapide de l'industrie américaine. Aujourd'hui, elle est un peu plus établie que l'industrie européenne. La maturité générale du marché américain est plus avancée. Par exemple, l'une des plus importantes plateformes crypto américaine, à savoir Coinbase, est valorisée à 40 milliards de dollars, avec 500 millions de dollars investis. La plateforme d'échange française Paymium représente 1,1 million de dollars investi, soit 0,1 % de ce que l'on voit sur Coinbase. L'ordre de grandeur est donc très différent, et explique cette différence de maturation et de maturité entre l'écosystème français et l'écosystème américain.
Pour nous montrer plus positifs en ce qui concerne l'écosystème français, nous avons pu voir, durant l'année 2020, que cette industrie se renforce, gagne en visibilité et en reconnaissance. La crise de la Covid-19 explique aussi cette croissance, avec une démocratisation plus importante des technologies blockchain et des actifs numériques durant cette période. La croissance perdure malgré le contexte. L'industrie est établie en France grâce à son cadre légal, une expertise, une ingénierie largement reconnue, ainsi que la structuration autour de l'association afin de lever quelques obstacles au développement de l'écosystème.