Intervention de Simon Polrot

Réunion du mardi 27 avril 2021 à 10h00
Mission d'information sur le thème « bâtir et promouvoir une souveraineté numérique nationale et européenne »

Simon Polrot, président de l'association pour le développement des actifs numériques (ADAN) :

La loi PACTE a été un signal très positif pour le développement de l'écosystème. Elle a encouragé de nombreux entrepreneurs à se lancer. en 2018 et 2019. Un peu moins d'un tiers des membres de l'ADAN ont été créés durant ces deux années, ce qui est un signal positif. La mise en place du régime a été et reste compliquée. Cela prend du temps. Dans un secteur innovant, il est compliqué de mettre en place une régulation nouvelle. Les régulateurs doivent s'adapter, se former. Les acteurs doivent aussi se former, car les exigences de régulation sont parfois mal comprises. Les acteurs ne viennent pas du monde bancaire et financier et les obligations sont adaptées de ces mondes-là.

La période d'ajustement, qui est toujours en cours, a été très difficile pour le secteur. Quelques acteurs ont dû fermer boutique car ils ont perdu trop d'argent pendant la période durant laquelle ils ont dû arrêter de travailler. Depuis le 18 décembre, tous les acteurs qui ne sont pas enregistrés ont interdiction d'exercer en France. Ceux qui n'ont pas eu le temps de ou qui n'ont pas réussi à s'enregistrer avant cette date ont dû de facto cesser leur activité. Pour certains d'entre eux, cela a été fatal à l'activité. Ces difficultés de mise en place peuvent se comprendre, mais il est dommage que nous n'ayons pas pu mieux anticiper. Peut-être la responsabilité est-elle partagée dans l'industrie avec les régulateurs, mais le résultat est qu'il y a eu des effets de bord plutôt négatifs de la réglementation.

Pour autant, ce qui manque est plutôt l'effectivité complète de ce régime. Le régime encadre les acteurs. Il faudrait que le reste de l'industrie, et notamment l'industrie bancaire, en prenne la pleine mesure, et qu'il y ait un droit effectif au compte, qui permette aux acteurs de se développer et à l'industrie d'avoir accès aux crédits, à des instruments bancaires performants, etc. C'est aujourd'hui un fort blocage dans le secteur. Il serait important de renforcer le soutien public de l'industrie aux crypto-actifs.

Des enjeux de souveraineté s'attachent à l'existence d'une infrastructure de marché des crypto-actifs en France. Cet enjeu n'est pas encore identifié par les décideurs. On voit se dessiner une infrastructure financière de demain, qui le sera au moins partiellement sur la base des crypto-actifs. Le fait d'avoir une maîtrise, une visibilité, une surveillance possible des flux – que ce soit les flux qui concernent les citoyens ou les entreprises – nous semble essentiel. C'est un enjeu de souveraineté très important.

Pour que cette industrie fonctionne et que l'on puisse rattraper le retard par rapport aux équivalents européens et asiatiques, l'un des axes serait de renforcer le soutien du secteur public aux crypto-actifs. Nous avons constaté que le soutien du secteur public portait davantage sur la technologie. Il est évidemment très important de maîtriser la technologie, mais le cas d'usage le plus important des crypto-actifs est souvent mis de côté, un peu mal vu : son importance est diminuée et on le voit comme quelque chose d'annexe. Nous parlons beaucoup blockchain mais pas crypto-actifs, blockchain mais pas bitcoins, etc., ce qui est pour nous une erreur stratégique, car ces marchés concentrent des enjeux de souveraineté majeurs pour le futur. Voilà les éléments que je voulais évoquer : le soutien public à l'industrie, que ce soit par les financements ou par des accès à des marchés, et le droit effectif au compte bancaire, qui permettrait aux acteurs de se développer.

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