Intervention de Stéfane Fermigier

Réunion du mardi 1er juin 2021 à 11h30
Mission d'information sur le thème « bâtir et promouvoir une souveraineté numérique nationale et européenne »

Stéfane Fermigier, co-président du conseil national du logiciel libre (CNLL) :

Le logiciel libre est omniprésent dans les smartphones. L'iOS est basé en grande partie sur de l' open source. Le cas d'Android apparaît plus ambigu. Une partie d'Android, l' Android open source project (AOSP), est libre. Toutefois, différents mécanismes de certification des matériels, mais aussi la nécessité de pilotes informatiques propriétaires et l'existence d'une version d'Android estampillée Google créent des dynamiques qui s'inscrivent dans le prolongement de la question que vous posiez à propos de Microsoft.

Une société de la taille de Google peut très bien produire de l'open source tout en vendant des systèmes propriétaires en complément. Il en résulte une mainmise sur les services qui complètent le logiciel libre de départ.

Plusieurs initiatives, ces dernières années, ont visé la création d'un Android allégé des applications propriétaires de Google, ce qui suppose de modifier le code source d'Android dans l'optique d'éviter toute dépendance vis-à-vis de services proposés par Google, tels que l'authentification, la messagerie électronique Gmail, et tout ce qui relève de l'agenda et des photos. L'utilisateur d'un smartphone s'attend à ce que ces services en fassent partie, alors que son appareil n'est en réalité qu'un terminal grâce auquel il se connecte à des services hébergés dans le cloud.

YesYes, une société française de notre écosystème, vend, depuis deux ou trois ans, un système d'exploitation indépendant de Google tout en intervenant sur le marché du reconditionnement des smartphones usagés. Son modèle économique se base en partie sur la revente de smartphones d'occasion utilisant son système d'exploitation libéré des applications Google. Nous espérons qu'elle pérennisera ses activités et que son approche générera un chiffre d'affaires suffisant.

Une proportion de la population actuelle, de plus en plus réticente à voir ses données personnelles aspirées par l'un ou l'autre des géants du numérique, en revient aux téléphones mobiles à l'ancienne ou feature phones pour échapper aux difficultés liées à la protection de leurs données. Une telle démarche reste néanmoins assez rare, tant la plupart des utilisateurs peinent à se passer des services auxquels ils se sont habitués.

D'autres personnes se tournent vers des solutions alternatives. Pour que celles-ci s'imposent, il faut toutefois qu'un plus grand nombre de citoyens les utilisent. Même si leur notoriété peut s'imposer par le bouche-à-oreille, ces solutions gagneraient à devenir plus connues.

Aujourd'hui, par défaut, les utilisateurs optent pour les géants du numérique, comme ils le faisaient déjà, vingt ans plus tôt, au moment de choisir un navigateur Internet. Microsoft a été condamnée à des amendes significatives par la Commission européenne à cause d'Explorer. À présent, c'est Chrome, le navigateur de Google, qui s'est imposé presque partout. Le contrôle très strict exercé par Apple sur sa plateforme propriétaire d'achat d'applications ne permet pas à ses concurrents d'y proposer les leurs. Il en résulte un nouveau verrouillage du marché qui risque d'exclure, si tel n'est pas déjà le cas, les acteurs indépendants.

Nous espérons que des approches comme celle de YesYes rééquilibreront le marché en proposant une offre alternative au duopole iOS et Android.

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