C'est justement pour répondre à ce type de questions que nous sommes ravis de partager nos perspectives avec les autres pays et d'enrichir le débat national. De notre point de vue, la menace chinoise en Europe n'est pas encore bien comprise. En Lituanie même, la perception de la Chine en tant que menace est relativement récente. Il y a quelques années, notre présidente se rendait en Chine avec une délégation de chefs d'entreprise et d'industriels à la recherche d'opportunités commerciales pour notre pays. Désormais, notre perception a évolué en sens contraire. Comme vous l'avez probablement entendu, nous avons officiellement quitté le format 17+1. Nous commençons à appréhender la Chine au travers du prisme sécuritaire, alors même que de nombreux pays européens continuent de privilégier un équilibre entre opportunités économiques et sécurité. Avec notre nouveau gouvernement entré en fonction il y a six mois, nous avons pris la décision tout à fait consciente d'appréhender notre coopération avec la Chine par le prisme de la sécurité, incluant les volets de cybersécurité et de dépendance technologique. Il me semble que c'est un défi que nous devons relever dans toute l'Europe. Pour les Américains, qui comprennent parfaitement les défis de long terme avec la Chine, la stratégie est relativement claire. En Europe, nous accusons un certain retard. Sitôt que nous aurons réellement compris la nature de la menace chinoise, nous façonnerons nos politiques en conséquence et serons beaucoup mieux préparés pour relever ces différents challenges.
Vous m'interrogez ensuite sur la Russie. S'il peut être intéressant d'évoquer le cas russe dans un échange sur la souveraineté technologique, force est de constater que la Russie n'est qu'un acteur marginal dans ce débat. Qu'il s'agisse de souveraineté technologique ou de dépendance aux technologies, nous ne considérons pas la Russie comme un acteur de premier plan, même si les Russes ont choisi de travailler avec la Chine dans ce domaine. Le fait est que la menace russe est parfaitement comprise – et depuis très longtemps – en Lituanie. Personne n'achète de technologies russes pour l'équipement des infrastructures critiques. À l'inverse, la Chine équipe toujours nos infrastructures, et nous devons nécessairement faire évoluer nos mentalités. Cela dit, la Russie joue bien un rôle majeur en matière d'activités cyber malveillantes et représente une réelle menace pour la Lituanie.