On a beaucoup parlé jusqu'à présent de financements publics ou parapublics, mais je voudrais insister sur le fait que le décalage entre les investissements et les besoins provient en majeure partie d'un déficit de financement privé. Il faut donc absolument arriver à mobiliser les financements des banques, des compagnies d'assurance et autres investisseurs.
Ce déficit d'investissement privé me semble résulter d'une double défaillance. D'une part, la défaillance des autorités publiques en matière d'envoi de signaux clairs. Pour que les acteurs économiques de l'économie réelle et les acteurs de l'économie financière s'engagent en faveur de la transition énergétique, ils ont besoin d'une stratégie. La transition énergétique est en effet un phénomène complexe, qui va modifier tous les secteurs de l'économie, nos modes de vie et de consommation. On ne peut donc être opérationnels sans une vision globale de long terme.
La seconde défaillance que je constate est celle des marchés, les prix et les taux d'intérêt actuels ne reflétant absolument pas les risques climatiques tels qu'on peut les percevoir. Cela s'explique, d'une part, par le fait que l'horizon des acteurs financiers est un horizon à court terme tandis que les risques climatiques s'inscrivent dans un horizon à moyen et long termes, et, d'autre part, par le fait que les méthodologies d'évaluation de ces risques ne sont pas encore au point.
Quelles solutions pouvons-nous envisager ? Premièrement, les pouvoirs publics doivent envoyer des signaux clairs. La définition de plans de transition sectoriels, tels que celui sur lequel travaille l'ADEME, pourrait être un signal très important pour les acteurs économiques, dès l'instant où l'ensemble des pouvoirs publics s'appuieraient dessus, afin de leur donner une véritable crédibilité. Deuxièmement, pour que les acteurs financiers prennent réellement en compte les risques climatiques, il faut certainement accélérer le développement de méthodologies robustes et convergentes pour les évaluer. L'intervention des régulateurs et des superviseurs, dans un contexte d'urgence, est certainement un levier très important.
Au-delà, il faut mobiliser des ressources publiques pour réduire les risques d'un certain nombre d'investissements et leurs coûts. Certains projets verts trouveront des financements tout seuls, presque naturellement, auprès des acteurs privés ; d'autres auront besoin de l'intervention publique pour leur apporter une garantie et réduire leurs coûts. En France, les montants de l'épargne réglementée sont très importants. Aussi faut-il certainement réfléchir à la façon de mieux mobiliser une partie de ces fonds au service de la transition énergétique, comme la loi PACTE a commencé à le faire. Cette question renvoie aussi à des points qui ont déjà été évoqués : les labels, la lisibilité ou encore l'information des consommateurs.