La question que pose M. Pellevat suscite souvent des débats animés, car l'alimentation est un sujet qui nous touche tous. C'est pourquoi les pères fondateurs avaient prévu un lien particulier entre l'agriculture et la concurrence, dont les règles ne s'appliquent qu'en vertu d'une décision spécifique. Une réglementation différente laisse une marge de manœuvre pour la coopération. Mais pourquoi ne voit-on pas plus d'organisations de producteurs, qui travailleraient à plus d'efficacité dans le stockage et le transport pour réduire les coûts et améliorer la qualité ? Cela leur donnerait un pouvoir de négociation plus fort et une meilleure place dans la chaîne de valeurs. Nous avons vu dans d'autres secteurs combien ces rapprochements pouvaient être utiles.
Concernant les accords commerciaux, nous négocions avec nos partenaires, mais uniquement dans le cadre du mandat de négociation confié par les États membres. Nous devons assurer un équilibre entre les différents secteurs. Nous essayons de promouvoir des accords bénéficiant à tous les États membres. Pour prendre un exemple hors de France, les agriculteurs polonais importent des porcelets du Danemark, qu'ils réexportent ensuite aux États-Unis et en Chine. Cette activité mondialisée est très différente de celle des producteurs qui vendent leur production sur un petit marché à haute valeur ajoutée et bénéficient, par exemple, d'une indication géographique protégée, que nous protégeons dans nos accords commerciaux.
Monsieur Bourlanges, Cécilia Malmström, qui fut commissaire au commerce, a modernisé les outils de lutte antidumping pour gagner en rapidité. Nous voulons remplir nos obligations prévues par les accords de l'Organisation mondiale du commerce (OMC), mais là encore, la rapidité est essentielle. Faut-il faire plus ? Il est évident que nous avons une manière de faire différente de celle des États-Unis. Nous devons être à la hauteur de ce à quoi nous nous sommes engagés. La production étant mondialisée, nous devons travailler ensemble à l'échelle mondiale ; cela nous permet d'appuyer les pays qui en ont besoin, et de travailler ensemble au soutien de nos valeurs. C'est la limite au-delà de laquelle nous n'irons pas dans le renouvellement de notre action. Nous avons l'outil des mesures conservatoires dans notre boîte à outils. Un point important est la charge de la preuve : la Commission doit apporter la preuve de ce qu'elle avance ; nous ne devons jamais faire reposer cette charge sur l'entreprise. Nous avons travaillé à un outil qui rende les preuves irréfragables.
Nous sommes Européens, nous ne faisons pas certaines choses comme les Américains ou les Chinois. C'est ce qui nous a permis de créer le meilleur marché mondial. Le législateur définit les règles : oui, les agriculteurs ont le droit d'utiliser des pesticides, mais uniquement s'ils donnent des garanties concernant la qualité de l'eau potable et la biodiversité.
Notre modèle ne date pas des années 1970, mais des lendemains de la Seconde Guerre mondiale. Les pères fondateurs avaient vu à quel point les monopoles et les concentrations excessives avaient joué un rôle très négatif dans l'économie avant et pendant la guerre. C'est pourquoi même les géants doivent être mis en concurrence, au service du consommateur et du citoyen ; nous protégeons les entreprises contre la concurrence déloyale et les pratiques anticoncurrentielles. Nous affirmons ainsi nos valeurs fondamentales.
Je ne suis pas sûre d'avoir compris l'analogie avec le secteur de la santé. Le patient est-il un consommateur ? Il peut l'être, car certains aspects de la santé peuvent être liés à une activité économique. Mais cela prend une tout autre dimension dans un État providence, où le secteur de la santé est bien différent des autres secteurs purement économiques.
Dans de nombreuses procédures en matière de concurrence, des entreprises pharmaceutiques ont été mises à l'amende pour avoir retardé la mise à disposition de médicaments génériques après l'expiration des brevets. Il peut être difficile dans certains pays de s'assurer de l'approvisionnement des médicaments. Il est donc important d'utiliser tous nos outils pour que les médicaments soient disponibles à un prix abordable.
Le secteur de la pêche est un point très débattu dans les négociations en cours pour l'accord sur la future relation avec le Royaume-Uni. Depuis que ce dernier a déclaré ne pas vouloir prolonger cette période de transition, les choses sont devenues plus intenses. L'été à venir risque d'être très chargé. Mais Michel Barnier est le meilleur pour mener ces négociations à bien : nous sommes dans de bonnes mains.
Le Digital Services Act pose la question des responsabilités qui doivent être celles d'un « gardien ». Lorsque vous devenez une infrastructure essentielle pour un nombre incalculable d'entreprises, il y a forcément une liste de choses à faire et de choses à ne pas faire. La promotion était au cœur de trois procédures impliquant Google : nous devions nous assurer qu'il n'y avait pas de publicité mensongère. Il y a eu sur ce sujet un travail remarquable au sein du Sénat français, dont nous pouvons nous inspirer dans le cadre de la consultation publique que nous avons lancée.
Je vous remercie de votre attention ; ce fut un honneur et un plaisir d'être en votre compagnie.