Vous nous interrogiez notamment sur la pertinence de l'outil centralité et public en lien avec les rescrits fiscaux. Ma circonscription, la troisième de Meurthe-et-Moselle, jouxte les frontières belges et luxembourgeoises. Les rescrits y sont donc un vrai sujet. Ils ont posé des problèmes politiques en 2014 et ont même entraîné la démission de Jean-Claude Juncker, à l'époque Premier ministre luxembourgeois, remplacé par Xavier Bettel.
L'outil existe auprès des administrations fiscales, grâce à des actions résolues proposées par l'Union européenne, notamment en matière d'échanges d'informations. J'estime qu'il est bien dommage de ne pas rendre cet outil public ; il permettrait de comparer, d'évaluer, de flécher les entreprises vers les États membres. Le fait que ces informations ne soient pas publiques m'interroge particulièrement au regard du manque d'information. Lorsqu'on parle de fiscalité, la transparence me semble une évidence.
Dans la perspective des réformes fiscales initiées sur la fiscalité des entreprises, l'Union applique la logique du reporting pays par pays, introduit par le dispositif BEPS de l'OCDE. Il permet de connaître le montant de la richesse taxable des entreprises, en l'espèce le bénéfice, qui est l'assiette taxable de l'IS. Cet outil existe. La lutte contre la fraude fiscale est un sujet qui devrait être évoqué au sein du Parlement européen.
Concernant le système de vérification centralisée au niveau de l'Europe, il existe et doit probablement être amélioré. L'affaire qu'évoquait M. Chassaigne des rescrits luxembourgeois et belges de 2014 a posé des problèmes. Un rescrit est une prise de position du fisc sur un cas compliqué ou inhabituel. Il confère une sécurité juridique aux entreprises mais peut octroyer des avantages fiscaux pour attirer certaines sociétés holding par des taux d'imposition très faibles.
Pour autant, à la suite de l'affaire Luxleaks, la Commission a adopté le paquet de transparence fiscale, et plus spécifiquement l'extension de l'échange automatique aux rescrits. La directive DAC 3 du 8 décembre 2014 a imposé un échange automatique pour les rescrits accordés à des entreprises pour le traitement fiscal d'opérations transfrontalières. De fait, chaque administration doit transmettre ces informations aux services de contrôle fiscal.
M. Chassaigne disait qu'aucun pays européen ne figure sur la liste des paradis fiscaux. Tout le monde a signé les conventions, mais la question est de savoir si ces accords sont véritablement respectés.
Dans ce rapport, nous soulevons parfois plus de questions que nous n'apportons de réponses, car nous sommes dans une organisation à vingt-sept. Chacun a une approche différente. Voilà pour y répondre de la manière la plus précise possible.
Pour répondre aux sujets soulevés par M. Chassaigne, notamment sur le prélèvement de l'impôt, cela reste anecdotique mais il faut rappeler que l'Union européenne prélève l'impôt sur le revenu des fonctionnaires européens. Elle récolte aussi les droits de douane. Dans cette architecture, il est possible de prélever l'impôt ; il n'y a pas de raison de penser qu'elle ne serait pas en mesure de le faire. Quand il s'agit justement de prélever plusieurs milliards, l'Europe peut se structurer.
Nous évoquions hier la taxe sur les surfaces commerciales (TaSCom) et la difficulté de considérer les entreprises comme imposables dans le pays, la problématique est la même à l'échelle nationale comme à l'international.
André Chassaigne a parlé de chimère pour qualifier l'harmonisation fiscale. Certes, notre rapport soulève plus d'interrogations qu'il n'apporte de solutions. Nous devons avoir une réflexion globale et considérer les positions de nos voisins.
Je voudrais revenir sur la taxe GAFA telle que la France l'a instituée. Même si asseoir cette taxe sur le chiffre d'affaires n'est pas forcément pertinent, tel n'est pas le sujet, pas plus que son montant, 350 ou même 500 millions d'euros. Ce qui est important est le message politique qui est porté. En l'instituant, la France a relancé le débat au niveau européen, et montré le chemin puisque des pays comme le Royaume-Uni, l'Autriche ou la Pologne ont également créé une telle taxe. Les négociations sont en cours au niveau international, même si leur issue est fortement liée au résultat de l'élection présidentielle américaine.