Intervention de Daniel Gutmann

Réunion du jeudi 9 juillet 2020 à 10h40
Commission des affaires européennes

Daniel Gutmann :

L'IFI, limitée à l'immobilier, a peu d'équivalents en Europe, mais les impôts sur les actifs immobiliers sont en revanche très fréquents. La spécificité française est plutôt le cumul des impositions sur l'assiette immobilière et une forte imposition du capital en France en comparaison des autres États-membres.

S'agissant de la double imposition, la jurisprudence de la Cour de Justice est très claire : rien dans les traités n'interdit à deux États-membres de taxer le même revenu. Il n'y a là aucune discrimination, laquelle n'existe que si un État-membre applique une règle différente selon les situations, interne ou transfrontalière. Le seul moyen pour résoudre le problème de la double imposition est procédural. La directive de 2017 est un premier pas mais il est très insuffisant.

La question de Mme Aude Bono-Vandorme portait sur le caractère public des rescrits et des déclarations pays par pays. Sur ce sujet, il y a beaucoup d'idées fausses et d'incompréhension. En premier lieu, je voudrais insister sur le fait que la Commission européenne a mis un terme, sur le fondement des règles en matière d'aide d'État, aux rescrits fantaisistes dont ont pu bénéficier nombre d'entreprises. Les travaux de l'OCDE, en particulier sur les prix de transfert, l'ont également aidée. Au final, il y a un décalage entre les coups de projecteur médiatique sur les rescrits fiscaux, qui sont des pratiques passées, et la réalité présente.

En deuxième lieu, il est vrai que les rescrits et les déclarations pays par pays ne sont pas publics. En 2016, la loi Sapin 2 imposait de rendre ces dernières publiques mais elle a été censurée sur ce point par le Conseil constitutionnel, qui y a vu une atteinte disproportionnée à la liberté d'entreprendre. En effet, tant ces déclarations que les rescrits comportent des informations hautement confidentielles qui ne peuvent être mises à disposition du public et, donc, des concurrents des entreprises concernées. En outre, une telle publicité présente le risque que se développe un « name and shame » incontrôlé, comme on a pu le voir s'agissant des établissements bancaires dont les déclarations pays par pays sont d'ores et déjà publiques. Les ONG qui les ont analysées ont commis des erreurs factuelles majeures.

Le droit de la concurrence existe aussi d'une certaine manière en matière fiscale. Depuis le Code de conduite fiscalité des entreprises de 1997, on admet la concurrence mais pas la concurrence fiscale déloyale. Il y a pour cela deux outils, les aides d'État, qui peuvent mener à une procédure d'infraction, ce qui est du droit dur, et le Code de conduite, qui est du droit mou, mais néanmoins très efficace. Les États qui ne respectent pas les règles du Code de conduite doivent rendre des comptes auprès de leurs pairs. Ce Code donne les critères de transparence, d'évaluation des avantages. Il ne faudrait pas voir la concurrence fiscale que sous l'angle de l'évasion ou de la fraude, et à ce titre l'exemple de la TaSCom est éclairant, puisqu'elle conditionne la localisation des entreprises. En Europe à l'heure actuelle, la concurrence fiscale n'est pas sans frein.

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