Le dernier Conseil européen est globalement perçu comme assez positif. Je reste prudent pour ménager la sensibilité de tous les groupes mais, en ce qui concerne les groupes de la majorité, il est même perçu de façon très positive.
Bien que l'Union européenne ait toujours eu des voisins, c'est-à-dire des États tiers avec lesquels elle partage une frontière terrestre ou maritime, c'est seulement à partir de 2003 que leurs relations ont fait l'objet d'une politique spécifique. Certes, avant cette date, le processus de Barcelone encadrait – très souplement – les relations de l'Union européenne avec les pays méditerranéens ; quant aux relations avec les pays d'Europe centrale et orientale, elles relevaient pour l'essentiel d'une autre politique : la politique de l'élargissement.
En 2003, donc, alors que l'élargissement de l'Union européenne à 10 pays était imminent, celle-ci a institué un cadre unique rassemblant l'ensemble des pays voisins à l'exception des pays ayant vocation à adhérer, opérant ainsi une distinction radicale, quoiqu'ambiguë, on le verra, entre politique de voisinage et politique d'élargissement.
Ce cadre a été fixé en 2003 par une communication de la Commission européenne, à laquelle ont succédé depuis deux autres communications, celle de 2011 et celle de 2015.
L'analyse de ces trois communications successives met en évidence l'évolution profonde qu'a connue cette politique, à la fois dans ses objectifs et dans ses moyens, en lien avec les nombreuses crises ayant affecté les pays du voisinage.
En 2003, l'heure était à l'optimisme. La Stratégie européenne de sécurité adoptée cette année-là commençait ainsi par ces mots : « l'Europe n'a jamais été aussi prospère, aussi sûre, ni aussi libre ». C'est donc logiquement que l'Union européenne a cherché à étendre sa prospérité et ses valeurs aux pays de son voisinage, extension qui était considérée, à juste titre, comme la condition de sa sécurité. L'objectif affiché de la PEV était, par une interdépendance accrue, à la fois politique et économique, de créer – je cite « un espace de prospérité et de bon voisinage – un cercle d'amis ».
Tels étaient les mots utilisés par la communication de 2003, centrée sur le développement du commerce et la promotion de la démocratie. Le terrorisme n'était pas un sujet, pas plus que les migrations, lesquelles étaient d'ailleurs présentées de manière positive.
En 2010, le « Printemps arabe » est la première des crises qui ont frappé les pays du voisinage. Elle a entraîné une première réforme de la PEV, avec une nouvelle communication adoptée en 2011. Celle-ci a été rapidement dépassée par la multiplication des crises, si bien qu'en 2015, une nouvelle communication est publiée qui réforme profondément la PEV. Tout en conservant le soutien à la démocratie et à la promotion des valeurs européennes, elle donne une priorité nouvelle à la sécurité, angle sous lequel sont désormais aussi traitées les migrations.
Cette communication de 2015 est éclairée par la Stratégie européenne globale pour la PESC, publiée en 2016, qui fait de la résilience des pays du voisinage, définie comme « la capacité d'États et de sociétés à se réformer, et donc à résister à des crises internes et externes et à se remettre de celles-ci », l'objectif ultime de la politique de voisinage. L'ensemble des instruments de la PEV : dialogue politique et coopération sécuritaire, soutien aux réformes et aide macro-financière, accord de libre-échange… doivent y contribuer.