Intervention de Laura Buffet

Réunion du mercredi 18 novembre 2020 à 17h00
Commission des affaires européennes

Laura Buffet, ONG Transport et environnement :

Je vais répondre à la question nucléaire, à la question sur le système de certification et donnerai peut-être un dernier éclairage sur l'aviation.

Ma présentation soulignait que le mot nucléaire n'apparaît pas dans la stratégie européenne et que tous les objectifs européens en termes de production chiffrée sont des objectifs pour l'hydrogène renouvelable. Cela montre que la France est un cas particulier en termes de mix énergétique par rapport à d'autres pays européens. Par exemple, l'Espagne, le Danemark et l'Allemagne ont vraiment l'hydrogène renouvelable comme priorité. Pour se replacer dans le contexte européen, la France a une perspective très particulière, du fait de la place du nucléaire dans le mix électrique.

En ce qui concerne les coûts, il est intéressant de rappeler qu'il y a eu de très fortes réductions de coûts pour l'électricité renouvelable. Le dernier rapport de l'Agence internationale de l'énergie sur les énergies renouvelables montre que le coût de l'énergie solaire a diminué de 80 % entre 2010 et maintenant. Ce processus va s'accélérer. C'est aussi pour cela que l'on considère que c'est l'énergie d'avenir et que c'est là-dessus que l'Europe et les pays doivent se baser pour la production d'hydrogène.

S'agissant des transports, il est important de rappeler que c'est la directive Énergies renouvelables qui gouverne les carburants alternatifs. Cela explique pourquoi on se focalise sur le sujet des renouvelables. C'est dans ce cadre que sont créés des outils incitatifs pour le secteur du transport. Le nucléaire n'y a pas sa place, puisque ce n'est que l'électricité d'origine renouvelable qui sera prise en compte pour l'utilisation dans les transports.

Pour avoir une position plus générale sur le nucléaire, il faudrait se reporter aux positions de nos membres français, comme le Réseau action climat ou France nature environnement. Ils ne considèrent pas que l'électricité nucléaire soit une électricité d'avenir pour des raisons de risques industriels, de coûts de la filière et de problèmes liés à la gestion des déchets. Ce sont ces ONG nationales qui ont l'expertise sur ces questions.

Il n'existe pas encore de système de certification complètement développé au niveau européen pour l'utilisation de l'hydrogène dans le transport. En revanche, des discussions sont en cours. Il est très important d'arriver à un système qui permette d'établir clairement que pour qu'un hydrogène soit considéré comme renouvelable et bénéficie d'un label, il faudra prouver qu'une capacité renouvelable additionnelle a été placée sur le réseau. L'idée n'est pas d'utiliser le renouvelable pour l'hydrogène et plus de fossiles pour d'autres secteurs de l'économie. L'association Transport et environnement travaille au niveau européen, notamment auprès de la Commission européenne, qui pour le moment est leader sur ces questions. Je pourrais vous envoyer plus de détails sur ces questions de certification en matière de transports.

Il est important de mentionner aussi le sujet des importations. Un système de certification européen doit prendre en compte la complexité des importations. Nous l'avons vu dans le domaine des agro-carburants, sur lequel nous avons beaucoup travaillé. Dès qu'on regarde les importations, les critères de durabilité sont beaucoup plus difficiles à vérifier et il y a beaucoup plus de risques de fraude. Nous espérons qu'au niveau européen, des critères spécifiques seront pris en compte si l'on importe de l'hydrogène.

Par ailleurs, à nos yeux, l'importation d'hydrogène renouvelable de pays extérieurs à l'Union européenne est possible. Mais cela ne doit pas conduire à ralentir la décarbonation de ces pays du fait de la demande européenne. Il faut s'assurer que ces pays vont pouvoir décarboner leurs économies en priorité, et que la demande européenne ne va pas mettre en péril leurs efforts visant à réduire par exemple l'impact carbone de leur système électrique.

Il y a eu récemment des annonces sur l'avion à hydrogène à l'horizon 2035, ce qui est une perspective très prometteuse. Cette énergie n'est pas adaptée aux long-courriers. C'est pour cela qu'on essaie de regarder quelles peuvent être les solutions pour les avions actuellement en exploitation. C'est aussi pour cela que nous espérons que les carburants alternatifs produits à partir d'hydrogène seront peut-être le premier « pilier » dans le secteur aérien. L'horizon 2035 est encore lointain et il faut aussi des solutions à plus court terme pour diminuer les émissions de gaz à effet de serre du secteur, même si toutes les technologies zéro émission ne sont pas encore sur le marché.

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