Parmi les difficultés qui vont résulter du Brexit, la question du régime fiscal applicable à partir du 1er janvier 2021 à la liaison fixe transmanche revêt des enjeux économiques et juridiques importants.
La liaison fixe transmanche, aussi appelée « tunnel sous la Manche », est un système de fret routier régi par un statut particulier dépendant d'un traité conclu avec le Royaume-Uni, le traité de Cantorbéry, et d'un accord de concession quadripartite. Les terminaux au départ et à l'arrivée disposaient de magasins Duty Free jusqu'au 1er juillet 1999, date à laquelle le Duty Free est devenu complètement interdit à l'intérieur de l'Union européenne.
Au 1er janvier, quand s'achèvera la période de transition, le Royaume-Uni sera pleinement considéré comme un État tiers. Cela ouvrira la voie à la vente de produits Duty Free au profit des voyageurs circulant entre le Royaume-Uni et l'Union européenne. Toutefois, les directives encadrant la fiscalité indirecte ne parlent expressément de magasins Duty Free que dans les « ports » et les « aéroports ». Le Brexit n'ayant pas été anticipé, rien n'est dit sur la situation du Tunnel et sur la possibilité d'y ouvrir de nouveau des magasins Duty Free.
Ce vide juridique crée un risque de distorsion de concurrence entre le tunnel et le port de Calais, ce qui est insatisfaisant du point de vue des règles du marché intérieur et nuisible pour l'activité d'un secteur qui a beaucoup souffert de la crise.
Nous aimerions montrer que le vide juridique né d'un retrait non anticipé du Royaume-Uni crée un risque de distorsion de concurrence à Calais, qu'il serait nécessaire, dans l'idéal, de réviser les directives encadrant la fiscalité indirecte pour éviter les distorsions de concurrence entre les différents modes de transport et que, dans l'immédiat, une interprétation souple des directives devrait permettre d'appliquer au tunnel le régime prévu pour les ports et d'y autoriser les ventes hors taxes dès le 1er janvier.
Nous avons reçu le soutien précoce et inattendu de Dominique Riquet, Vice- Président du groupe Renew, et de Karima Delli, Présidente de la commission du transport au Parlement européen, qui ont adressé hier à ce sujet un courrier au commissaire en charge de la fiscalité et des douanes dont nous avons pu prendre connaissance sur les réseaux sociaux. En des termes très proches des nôtres, à tel point que c'en est troublant – je rappelle que nos projets de conclusions n'ont pas vocation à être rendus publics avant leur adoption – M. Riquet et Mme Delli attirent l'attention de la Commission sur la nécessité de permettre le Duty Free dans le terminal français du tunnel. La position que nous défendons est donc transpartisane ; elle a déjà reçu un écho important au sein du Parlement européen.